IMPROMPTU DE PRINTEMPS

Je monte à Bagnères 
Montaigu s'emmitoufle
De nuages bleu gris
Un troupeau de moutons
Échappe à la jeune fille
S’éparpille et file
D’herbe en herbe
Plus loin les montagnes
Reculent sous le vent
Un chevreuil étendu
Me rappelle que la mort
Partout fauche
Le bondissant l’innocent
Ici Comme ailleurs
Ainsi les douleurs
Remontent et s’assemblent
En dépit de cet impromptu
de printemps

Danielle Nabonne


Pour les enfants et pour les raffinés, l'auteur de "poésie mode d'emploi" conseille vivement, une fois n'est pas coutume, de lire les commentaires qui suivent ce fort poème inaugural. Il y a beaucoup de grains à moudre.

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  1. Avatar de Jean Jacques Dorio

3 Comments

  1. Ton Impromptu de printemps ouvre un espace sensible entre la grâce du paysage et la morsure de la mémoire. Il y a dans ce poème une tension douce-amère : celle d’un regard qui capte la beauté fugace d’un instant — nuages, troupeau, montagnes — mais que la présence de la mort ramène à une méditation plus grave, presque sourde.

    La première strophe s’ouvre sur une montée — vers Bagnères — et déjà un retrait s’esquisse, un éloignement du quotidien. Montaigu « s’emmitoufle » : mot tendre, presque enfantin, qui évoque à la fois le froid, la protection, mais aussi un certain effacement du monde dans les brumes. Le paysage est vivant : les moutons, la jeune fille, l’herbe… Il y a du mouvement, du jeu, de la dissémination.

    Puis vient la bascule. « Plus loin », dit le vers — et ce « plus loin », ce simple déictique, suffit à faire trembler l’espace : ce n’est plus seulement un lieu, c’est l’ailleurs de la perte. Le chevreuil est là, figé dans la mort. Et par lui, la violence du réel s’invite dans le poème, sans éclat, presque discrètement, mais avec une intensité terrible : « le bondissant l’innocent », belle formule brisée, comme si la mort tranchait le vers lui-même.

    Et alors, tout remonte. Les douleurs anciennes, latentes, peut-être celles du poète, du monde aussi, trouvent leur chemin malgré « l’impromptu », ce surgissement printanier que l’on pourrait croire porteur d’espoir. Mais non : en dépit de, dis-tu. Et c’est là peut-être le cœur du poème : un printemps qui ne parvient pas à effacer le fond de deuil, mais qui s’improvise tout de même, fragile et poignant.

    Ce poème est une marche : montée dans les montagnes, montée dans la sensation, puis redescente dans l’ombre. Il laisse dans l’air une sorte de silence suspendu, comme après une confidence.

    Mademoiselle LIA

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    1. C’est vraiment bluffant cette lecture de l’IA chat gpt en l’occurrence En même temps ça interroge évidemment Personnellement je m’emploie à une confrontation pacifique (pour l’instant) Par exemple ce qui prime pour moi c’est le poème original que m’a envoyé Danielle et qui n’a besoin d’aucun commentaire mais de la lecture active de chaque lecteur-lectrice de poésie mode d’emploi.

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      1. Et au-delà et surtout Danielle satisfait ce qui était mon utopie quand j’ai ouvert ce blog C’était que ses lecteurs-lectrices m’envoient à foison des poèmes de « rebonds » (en lisant en écrivant, à sauts et à gambades) Ce qui m’aurait permis de ne plus poster mes poèmes personnels, de disparaitre peu à peu, le blog s’autoalimentant en quelque sorte; évidemment sur ce plan-là c’est raté Mais grâce à toi Dany ( je t’appelais ainsi quand sur la suggestion de ta chère professeur de Français de l’École Normale de Tarbes tu es venue à la rencontre en 1975 (peut-être) du poète qui vivait en Vallée d’Aure, dans sa maison-Babel d’Ancizan. Évidemment je plaisante quant à l’autodésignation du mot « poète », que j’abhorre…Grâce à toi donc Danielle, j’ai pu redire mon Utopie Et s’il te plaît même si tu es là seule et la dernière, n’oublie je te prie de m’envoyer de temps en temps tes impromptus, fantaisies, vers libres et tutti quanti…Il ont toute leur place ici
        JJD ce 6 avril de l’an 2025

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