Ils ne seraient pas, selon moi, mes lecteurs, mais les propres lecteurs d’eux-mêmes. Marcel Proust Oui, mais comment, chère lectrice, cher lecteur, lire en toi-même, si ce n’est en lisant ton « livre de signes inconnus », si ce n’est en écrivant pour toi-même, à ta manière, après avoir été stimulé par le poème sous tes yeux, dont tu t’évades pour t’adonner à « la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, (celle de) la littérature ». guillemets Marcel Proust (Le Temps retrouvé) Cette vie qui en un sens, habite à chaque instant chez tous les hommes aussi bien que chez « l’artiste ». Mais ils ne la voient pas, parce qu’ils ne cherchent pas à l’éclaircir. M.P.
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PAGES D’ÉCRAN
Soyez prudent Avec les pages Qui sur l’écran S’affichent Virtuellement Un simple clic Et elles passent À la trappe À l’attrape nigaud Des lecteurs solitaires Et glacés Soyez ouvert Aux caractères qui flottent À ces fragments d’existence Que l’on se plaît À partager Entre lecteurs Solidaires chaleureux
LE TEXTE ET SES LECTEURS
Le texte grandit avec ses lecteurs.
Il a été écrit loin d’eux, sans penser à personne, pour ce qu’on cherche en soi d’essentiel, mais le texte achevé, sans l’épreuve d’une lecture accomplie par les autres, il reste lettre morte, un jeu solitaire et stérile.
Ainsi, merci chère Marie et cher Jean-Marie, chère Esther et cher Marcel, […] par vos lectures bienveillantes de le raviver.
AUTREMENT DIT
Je passe toute la journée à ne pas écrire, mais ici et là en lisant je recopie de brefs passages sur un carnet noir à spirales papier kraft 18×13 cm Je passe la journée dans les bois et les arbres du baron perché, vicomte pourfendu et chevalier inexistant.1
Mais la nuit, le moi qui a attendu pendant qu’on était avec les autres, 2 le moi se déploie : ni ego (niego je nie l’ego), ni cogito (je ne pense pas l’être, je peins le passage 3), ni poèmes colligés des revues mortes…
Mais la nuit je tisse avec obstination et persévérance les petites pièces d’un puzzle personnel qui en dépit des apparences, n’est pas un jeu solitaire. 3
1 Italo Calvino 2 Marcel Proust 3 Montaigne 4 Georges Perec
CETTE LANGUE ÉCRITE
Cette langue écrite qui tamise, raffine, épure… Nathalie Sarraute Les fruits d’or Cette langue écrite qui se fraie (ou se fraye) un chemin de traverse dans le maquis du langage qui nous étouffe Cette langue mon dieu auquel je ne crois qui dévie et jubile avec sa plume qui parle sans barguigner au papier Cette langue écrite destinée aux lecteurs et lectrices solitaires qui la prolongent dans leur tête ou la recopient sur leurs carnets secrets Cette langue miroir tendu par l’écrit sur cet écran qui incite les lecteurs et lectrices de passage à devenir les lecteurs d’eux-mêmes* *Paul Ricœur
MES LECTEURS SONT MUETS
Mes lecteurs sont muets Muettes mes lectrices C’est dommage Si leurs oreilles transformaient mes mots en leurs murmures personnels Ça nous ferait un peu de grain à moudre en commun On ferait ensemble des barcarolles à trois temps Embarqués dans cette douce caravelle Évoquée par Michaux Mais mes lecteurs se contentent d’un « j’aime » Ou d’enregistrer en douce Chansons ou poèmes dits Postés ici Ainsi plupart du temps Bien que leur écriture Soit ouverte à la multiplicité des sens Poèmes passent et puis se perdent Nonobstant qu’ils disent avec Villon J’en appelle...

