CE QUI ARRIVE

CE QUI ARRIVE

Ce qui arrive de convenu et dinattendu Ce qui arrive dans un roman 1 où une grand-mère veille toute la nuit un fusil à deux coups à ses côtés pour tirer sur ses cochons darbres qui profitant de lobscurité avancent en douce vers sa maison afin à la longue dy pousser et de la détruire Ce qui arrive sur mes carnets dapprentissage où jai noté des vols doiseaux désordonnés, des sensations dans des lieux antiques où lon essaie XX siècles après de donner une forme visible à linvisible Ce qui arrive quand lon attend sa jeune fille à la gare dAix en Provence avec à lhorizon la Sainte Victoire blanche à midi avec des nuances de rose Ce qui arrive en ouvrant les volets de son porte-fenêtre donnant sur la haie de pittosporum et quune tourterelle qui passait par là bloque soudain son vol, surprise (un petit miracle naturel dune image réelle gracieuse) Ce qui arrive dans le ciel vu de son hamac tissé par une amérindienne de lethnie Panaré, dont on revoie le jour de léchange, le sourire malicieux Ce qui arrive dans un présent sans futur qui ne fait que passer

1 Méfiez-vous des arbres Daniel Apruz 1983 Dédicace : Cette petite histoire où les interlignes sont des abîmes à lire entre bois et écorce

https://www.leseditionsdunet.com/livre/un-dictionnaire-part-moi

QUELLE MAGNIFIQUE SOIRÉE

Il avait dit, je préfère ne pas, commençant ainsi sa résistance par anticipation.

Antonio Tabucchi (Tristano muore)

Il y a un an que je n’ai pas vu le monde, me balançant, depuis mon hamac. Pour la date, vous n’êtes pas obligé de me croire, mais pour la pièce tissée (et bariolée) que j’ai ramené du Venezuela (petite Venise), oui. Après l’avoir arrimé ici et là, le hamac (el chinchorro l’appellent les paysans du llano), a, depuis un bon lustre, trouvé sa place définitive, entre l’amandier (au sud) et l’abricotier (dans l’axe de l’étoile polaire).

Alors voilà, de mai 2021 à mai 2022, « il s’en est passé des choses », comme aurait pu dire la Françoise de la Recherche, mais l’essentiel, c’est qu’une année après, j’ai le plaisir de réamorcer cette « écriture de hamac » que je poursuis depuis de nombreuses années (cinq lustres, pour le coup, cette fois). C’est réglé comme du papier à musique, un livre m’accompagne et, moitié le lisant, moitié regardant ce qui m’entoure (les martinets, ce soir, le panache des avions qui tracent vers l’Afrique, les feuillages et troncs de mes arbres…) j’arrive aussi, à faire de brèves bouffées d’écriture sur les pages blanches ou dans les marges du livre qui m’accompagne. Pour ce recommencement il s’agit de Tristano muore (« Tristan meurt » a choisi comme titre le traducteur). Che magnifica serata sembra proprio preparata da una fata delicata (« quelle magnifique soirée qui semble avoir été préparée par une fée délicate ») : c’est le début du livre, mais ce n’est pas de son auteur,  il s’agit des paroles d’une chanson populaire des années d’avant-guerre, (celle de l’an quarante). Voilà, cette année tout (re)commence par une chanson.

une voix sans personne

UN POST HORS THÈME





Este río de Urubamba
Quasi quasi me ha llevado
Una linda profesorita
En sus brazos me ha salvado

Folklore péruvien


J’ai dormi sur les pierres de Macchu Pichu et de Pachacamac

J’ai bercé mon pitchou en lui chantant des berceuses dans son hamac

Je me suis baigné dans la rivière Urubamba
Avec ma linda profesorita

À qui je dédie post mortem
Ce post hors thème


"Cette rivière d’Urubamba
A failli failli m’emporter
Une belle petite professeure
En ses bras m’a sauvé"

CELLE QUI N’EST PLUS LÀ





Je vois celle qui n’est plus là

Je vois celle qui file la laine
Dans sa clairière de l’Amazonie
Les seins nus autour du fuseau
Se balançant dans son hamac 
Couleur de rocou

Je vois celle qui s’accroupit devant la poste
Comme un fantôme enveloppé d’un fichu
À tête de taureau

Je vois celle qui lie les bottes de paille
Et les gerbes de blé

Celle qui lit Roule Galette

Celle qui s’enfonce dans la mer