AVANT Y AVAIT DES OISEAUX

Avant y avait des oiseaux
Qui chantaient charmaient nos oreilles
Ou passaient tels un arc-en-ciel
Sur le jardin de printemps même l’hiver
-Les chardonnerets les pinsons les préverts-
C’était avant les millions de morts
Pour cause de pesticides
Et de pluies acides
Aujourd’hui ils battent de l’aile
Les oiseaux
Ils s’effacent	
On les compte et recompte
Mais le conte s’épuise
Comme les poètes qui naguère
Leur écrivaient des odes d’amour
En langue d’Oc
Rossignolet que cantos Sur la branco pausat
Qu’es plazé que t’encatos Auprès de ta mitat
É you plè de tristesso Lou cor tout enclabat
É perdut ma mestresso É soun désespérat
Rossignolet qui chantes Sur ta branche posé
Quel plaisir tu m’enchantes Auprès de ta moitié
Et moi plein de tristesse Le cœur tout enclavé
J’ai perdu ma maîtresse Je suis désespéré

Rossignolet que cantos ce lundi 24 avril 2023

LE LAPS DES ANS NOUS A PARU D’ÉTERNITÉ

898 AU CREUX DE LA NUIT Ocre océan Où les voix des poèmes Ondulent En lettres blanches Sur fond noir Avec les dés Qui sonnent dans nos têtes Les Correspondances Des sons et des sens Et le grand écart de l’Unité Futur : Erreur d’éternité  Michel Leiris

899 LE CARNET SE TERMINE Face à la feuille de papier kraft – mer en deuil sur laquelle je flotte – Il y a la couverture de plastique noir C’est le carnet quatrième Qui désormais va tel un crabe Être épinglé Sur la planche haute de ma bibliothèque Au détour des nuits Le carnet cinquième – ni tout à fait le même ni tout à fait un autre – S’ouvre sur ce vers inspiré Par le poète du Tout-Monde Le laps des ans nous a paru d’éternité. Edouard Glissant 06 octobre 2015  Carnet des nuits IV du  11 août 2015 page 405 au 06 octobre 2015 page 571

900 LE LAPS DES ANS NOUS A PARU D’ÉTERNITÉ Edouard Glissant Lapant le lait des Chats sauvages Pinçant les cordes d’Apache sur une guitare branchée sur la fée Électricité Une à une nous avons pendu les vieilles araires au clou Elles geignent au vent d’autan Le Progrès depuis belle lurette a fermé son étable sur le dernier des paysans L’éternité danse le rock and blues

SEPT POÈMES SANS TITRES


1
Pourquoi dites-moi se formaliser
De la bataille des vers souverains
Quand passe une femme brune et plus belle
Qu’un camion de pompier à Brooklyn Clean
me dit un.e poète dont je tairai
le nom Nom de Nom Mon nom est Personne
C’est un épicène Suis-je homme ou femme ?

2

Suis-je homme ou femme Je lève le pouce
Je suis celle qui fut mendiante rousse
Je suis celui atroce albatros 
Je me fie à l’écriture inclusive
Sur le sable jeté.e je suis Adamève
Camarade drôle tendre bucolique
Filant la métaphore un poème à mes lèvres

3

Un poème à mes lèvres mes livres dans la nuit
À l’index au secret suivis par une poignée
D’exégètes des deux sexes Amoureux amoureuses
Des formules où l’on traque l’ennemi
Qui assassine la poésie Aimant plus que tout
Le doute et les expériences en terres inconnues
Exorcismes brisements navigations en nos espaces d’écritures

LE TEMPS L’AMOUR L’ASCÈSE

Depuis le temps qu’on les écrit
Jour après jour et chaque nuit
C’est comme une douce habitude

Les lignes s’enchaînent ou s’arrêtent
Des fois ça peut durer deux jours
C’est comme une lettre d’amour
Avec des vers formant l’épître

Les mots sautent comme cabris
Mais faut les passer à la forme
Et à la fin recopier
Avec ses douas sur le clavier

On hésit’encor tant c’est balaise
De nommer : le temps l’amour l’ascèse



LES POÈMES QUE L’ON RÉCITAIT À L’ÉCOLE PRIMAIRE

FIGURES QUI BOUGENT (encore) UN PEU, c’est le beau titre d’un recueil de poèmes de James Sacré, né à Cougou (Vendée) en 1939, dit la notice. Il reste dans l’obscurité de nos contemporains lecteurs, qui en suivant, hélas, le tapage des industriels du livre relayés par leurs plumitifs, ne savent pas qu’il se publie encore des centaines de livres de poésie, bon an, mal an. La Figure 10 évoque les poèmes un peu mièvre qu’on récitait à l’école primaire… Et cependant dans la neige qui tombe il y a toujours le thème de l’oiseau mort. Ça devait être une récitation de François Coppée ajoute Sacré. Moi, dont le nom est encore plus méconnu dans la galaxie noire de la poésie contemporaine, je me souviens alors, du sujet d’une « composition française »donnée au cours complémentaire de Montesquieu Volvestre. Je devais développer la phrase suivante : les sveltes peupliers qui se mirent dans l’eau. Ce n’est que cette nuit, un demi-siècle après, que j’en compte les douze pieds, comme nous disions alors. On ne m’avait pas dit que c’était un alexandrin de ce satané François Coppée. Merci Sacré !

https://www.leseditionsdunet.com/livre/un-dictionnaire-part-moi