Ma poésie ne fait pas de vagues Elle vogue de nuit en nuit Sur une barque invisible Aux yeux des profanes Fanal, feu latent, exercice, Mon poème, s’il n’avance guère, Maintient le secret des formes, Dans le labyrinthe d’un rêve éveillé. C’est l’impératif premier crié par Villon, Aux hommes barbares, aux cœurs endurcis, Et le rêve dernier murmuré À l’oreille de nos belles endormies… Un secret pour chaque nuit suffit* * Alain Grandbois (1900-1975) poète québécois
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LA NUIT TOURNE SES PAGES
trois fragments d’une vie en cours d’écriture
673 LES MOTS DÉBORDENT Je les retiens Les mots du bord Qui crient détresse Je les contiens Les hache menu Trois feuillets par nuit Trois poignées de sable Pour ce dictionnaire Où l’imaginaire Sans fuir dans les mots faciles Tient tête au réel
674 L’ATELIER DE POÉSIE On s’amusait dans l’atelier Sans hâte liés aux mots aux gestes qui nous multipliaient Aux grandes feuilles collectives Aux petits carnets de nos secrets Je te donne euphorie Tu lui donnes promesse Elle murmure boa Ou peut être bois Et la magie opère Il faisait un temps de poèmes Et la saison semblait éternelle
675 LA GRANDE OURSE secoue son collier D’où se détache la Croix du Sud On entend un éclat de trompette venu du Bœuf sur le Toit Un cri nu sur la toile L’oiseau sort d’une goutte de sang La nuit tourne ses pages
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SISYPHE DE LA NUIT
ÉCRIRE LE DÉTAIL LE DÉTAIL DU DÉTAIL au risque de se perdre d’esquisses en esquisses Reprises de fragments d’une perle baroque au passé composé : longtemps on s’est hasardé à confondre les états de veille et les états de rêves, leurs écarts et leurs résonances Longtemps on a tissé leurs pièces décousues et ( comme dit la chanson) On a roulé carrosse On a roulé sa bosse Telle le roc des ténèbres d’un Sisyphe de la nuit Celui que l’auteur du mythe revisité imagina « heureux » 1 Libre de colporter, dans ses réécritures acharnées, sensations et images, personnes et personnages, souvenirs réactivés dans leurs moindres détails Un lecteur créatif 2 s’est nourri de ces voix qui promettent des mondes, celles qui parlent dans les bibliothèques, et celles qui disent : c’est ici qu’on vendange « Les fruits miraculeux dont votre cœur a faim » 3
1 Albert Camus (Le mythe de Sisyphe) 2 Marcel Proust à propos de Baudelaire 3 Charles Baudelaire
LA NUIT QUARTIER LIBRE À LA FOLLE DU LOGIS
VIVRE DE NUIT dans la lumière de pensées au ralenti, rêves éveillés, lectures déraisonnables, écritures à la main qui transmet ce qui parle dans la tête au papier. Étendu dans son lit, tête posée sur l’oreiller, recouvert de son linceul 1 bleu, jaune ou vert. Vivre de vocabulaire vérifié, amplifié, d’étymologies, de la folle du logis à qui l’on donne tout pouvoir d’opérer sur la feuille de papier. Avant d’éteindre les feux et de piquer un petit somme. Puis recommencer. Nouvel éveil, nouvelle ballade d’Orphée qui doit aller de l’avant, sans se retourner. 1 en occitan le drap est appelé linçol selon le sens premier de linceul : petite pièce de « lin » et non drap funéraire.

sur la toile aussi on laisse aller « la folle du logis » dorio 17/11/2022
SEUL DANS LA NUIT
Comme un art poétique une fantaisie Seul dans la nuit je suis perdu Mais si je l’écris ça va mieux C’est un moyen frappé d’instinct De convoquer nos petits dieux Sans en faire tout un tintouin Temps retrouvé ou Temps perdu Seul dans la nuit j’écris sans art Je laisse aller selon la plume Sans ornements sans métaphores Je prends des mots je les allume À la chandel de Bachelard Ou bien j’amorce l’anaphore Seul dans la nuit j’ai ébauché Pour l’étranger qui veille en moi Pour Poésie mode d’emploi 1 Ces quelques lignes maladroites Enfant qui agite son hochet Puis qui se rendort sous sa coite 1 Blog de JJ Dorio un poème par jour depuis le 8/01/2006