Laissant sans fin courir son imagination Parfois l’assaillait la vision d’un idiot (deux lipogrammes en e vous aviez remarqué) Un idiot momo à Nyouyork au Moma Un Dorio loriot pratiquant l’art brut-plaisir d’Artaud Tarahumaras hallucinations Jusqu’au tournis d’Achab poursuivant Moby Dick Qui soufflait sur l’horizon lapis-lazzuli Bijoux d’azur bols pour ablutions nuit sur nuit Laissant courir sans fin mon imagination Italiques extraites de La Disparition Georges Perec
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SUR LE COURS MIRABEAU
J'ai souvent écrit sur le cours Mirabeau Mais jamais à califourchon dans les platanes 1 J’ai écrit sur des ronds de bière Et sur l’écorce des mêmes arbres (et au retour dans l’atelier sur des planches où j’avais passé préalablement le rabot) J’ai écrit au célèbre café des 2 G Mais jamais à mes chers G.Perec et G.Perros J’ai écrit en haut du Cours au Roy René Pour l’informer que les pigeons Ornaient sa couronne de déjections Mais il n’a pas compris Mon langage (trop) fleuri Sous le pont Mirabeau coule la Seine Sur le cours Mirabeau roulez poèmes 1 Pierre Lartigue (1936-2008)
SI ON NE SAIT Y RÉPONDRE ON PEUT ZAPPER CET ÉCRIT
on ne cesse jamais de répondre à ce qui a été écrit hors de toute réponse : affirmés puis mis en rivalité, puis remplacés, les sens passent, la question demeure… Roland Barthes le cri l’écrit sur le papier et dans la nuit le cran l’écran ça va cranter dit le mécréant tout en créant cette variation digne de Rabelais de Perec de Queneau et de tous les dicos d’onomatopées c’est du blabla mais c’est d’un clic que dame souris envoie cet écrit apparaître sur l’écran énigmatiquement
SONNET DES PIÈGES FASCINANTS DU BONHEUR
Ils vivaient dans un monde étrange et chatoyant
L’univers miroitant de la civilisation mercantile
Les prisons de l’abondance
Les pièges fascinants du bonheur
Georges Perec
Ceux-là plutôt fauchés s’endormaient pourtant sur leurs lauriers
Rêvant chaque nuit de faire fortune
Pour s’offrir le bonheur à portée d’images
Offertes par Madame Express
Simples peignoirs de bain griffés de solitude
chaussures british à la patine exceptionnelle
et plus tard quand quelque argent leur viendrait
le divan Chesterfield avec les gants de pécari
le mobilier les bibelots les achats à la mode
Ceux-là étaient nés trop tôt pour lancer le pavé de mai 68
Qui auraient redonné sens à leur petite histoire
Ceux-là s’étaient condamnés à n’exister
Que sur le théâtre d’ombre
Des « Choses »
UNE FICTION brume insensée où l’on cherche son inspiration 35, 36, 37
trente-cinq
EN CE MOMENT J’ÉCRIS COMME JE RESPIRE. Et je respire selon l’attention que je porte à ma respiration. La plupart du temps, aucune.
Mais la nuit, en revanche, après avoir passé une heure à écrire comme je respire, toujours au lit et appuyé sur mon oreiller, quand j’arrête le flux, éteins la lampe de chevet, je m’aide pour tâcher de me rendormir, de l’attention que je porte alors à ma respiration (inspiration, expiration), faisant ainsi barrage aux pensées qui essaient de traverser mon esprit.
-Alors, avant de plonger dans ton sommeil qu’as-tu écrit cette nuit ?
J’ai écrit ce que personne ne lira jamais dans les écoles.
J’ai écrit, comme je les ai lus, plusieurs textes en un, ouverts à l’interprétation et aux malentendus.
J’ai puisé de mémoire dans mon rouleau de citations long comme les Champs Élysées un 14 juillet.
J’ai écrit comme je respire et sans masque à papier.
trente-six
JE ME RÉVEILLE, ce vendredi 2 octobre 2020, et je n’ose ouvrir mes volets, car j’entends le vent de la mer, prélude à une tempête.
Aussi, avant d’avaler mon petit déjeuner, j’avale les phrases d’un romancier catalan écrites en espagnol (castellano), extraites d’un roman dont le titre est puisé dans le début d’un vers de Raymond Queneau.
Non l’original « cette brume insensée », mais sa traduction.
Je lis, laissant aller, m’amusant des embrouillaminis dessinés par ce narrateur fictif, qui pour vivre, au sens littéral de gagner sa croûte, fait deux métiers à nul autre pareils.
1 Celui de « traducteur préalable », il prévoit les difficultés de traductions, qu’il envoie au traducteur vedette, dont le nom paraîtra sur la première page.
2 Celui de fournir des citations (son dada), toujours de manière subalterne, à un auteur « star » de la- littérature-qui- se-vend.
Bon, il est temps d’ouvrir mes volets parme, et d’éviter, le temps de refermer ma fenêtre, la bourrasque.
trente-sept
C’EST QUAND ON EST PERDU dans une forêt ou un texte touffu, que l’on fait appel à un souvenir heureux, une maxime, une citation, un instant précieux que l’on vécut comme une épiphanie.
Je sais bien que ce début fait un peu charabia mais je l’ai écrit. Et en l’écrivant, j’ai entendu « le mobile » qui m’annonçait un nouveau message :
Le romancier ne doit pas être un donneur de leçons, mais à partir de ce qu’il « détecte », poser
les bonnes questions. »
Je traduis de l’espagnol une phrase supposée dite par l’auteur « d’Orange Mécanique ».
-Gracias Enric, te contesto muy pronto. (Merci Henri, je te réponds bientôt)
Ça a été ma première idée d’un e-mail immédiat, mais réflexion faite, et compte tenu de la situation
brumeuse dans laquelle j’étais pris, j’ai ricoché vers mon vieux Queneau. (vieux comme un breuvage
qui s’améliore avec l’âge). Et, hasard des recherches, j’ai fait d’une pierre deux coups.
« Cette brume insensée où s’agitent des ombres, comment pourrais-je l’éclairer ? »
La phrase écrite par Raymond Queneau est mise en exergue par Georges Perec, W ou le souvenir d’enfance 1975, et par Enrique Vila-Matas, qui, de plus, a fait des trois premiers mots, le titre de son roman « Esta bruma insensata » 2019.