Il y avait il y avait la Sinfonia composée en 68
par Luciano Bério avec des citations parlées, murmurées,
criées, paroles d’amérindiens extraites du Cru et du Cuit,
extraits de l’Innommable de Sam Beckett, de slogans de Mai
et du nom en boucle de Martin Luther King assassiné le 4 avril,
le jour même où Daniel Cohn Bendit dit Dany le Rouge faisait ses 23 ans.
Il y avait Belle du Seigneur, Le Vol d’Icare et l’Œuvre au noir,
qui venaient de paraître.
Il y avait ces camarades communistes qui avaient programmé
leur Révolution qui ne pouvaient être menée que par leurs prolétaires
et qui me disaient en pestant :
avec vos conneries vous nous faites perdre dix ans (texto)
Il n’y avait pas que le slogan obscène CRS SS
Il y avait aussi CRS DESSEREZ LES FESSES
Il y avait l’humour toujours l’humour
Mai 68 À la recherche du Temps pas perdu
Il y avait l’amour toujours l’amour
FAITES L’AMOUR PAS LA GUERRE
Make love not war
Siempre el amor Jamás la Guerra
L’orgasme apaisera le futur (anagramme)
Il y avait mon père qui avait connu 36
Côté paysan (une rareté)
Et qui était toujours en Mai 68
La souche que je m’efforçais de prolonger
En usant du fameux rhizome deleuzien
Il y avait ma mère qui me faisait toujours
mes chaussettes mes bonnets au crochet
et naturellement les bocaux de pâté
et les terrines de foie d’oie ou de canard
gavés au maïs maison
Il y avait le métalangage des graffiti
Et toutes les choses désacralisées
Qui redonnaient du mordant
À notre fièvre de compréhension
Il y avait cette qualité suprême
Qui tournait sans cesse dans ma tête
LA F R A T E R N I S A T I O N
Un mot une vertu qu’ont perdu
Tous ses ex-soixante-huit-tards
Devenus par leurs positions de Gagnants
Des Louis-Phippards
Il y avait Il y a une fois une seule
Cette page définitivement tournée
Mais que personne ne sera capable
Tant que vivray De récupérer !