LES TÊTES BRÛLÉES

Les têtes brûlées

Le rossignol de Chine

Chauds les marrons

Mettons que je n’aie rien dit

.

L’âge du capitaine

La queue du chien d’ Alcibiade

La chanson des rues

Mettons que ça n’intéresse personne

.

La paille et la poutre

La pointe des pieds

Le goût du bonheur

Mettons que ma liste soit finie

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  1. Avatar de Jean Jacques Dorio

2 Comments

  1. JJD

    J’ai demandé à mademoiselle LIA de chercher une clef de lecture pour cette liste apparemment désinvolte

    Voilà sa réponse in extenso

    1. Le théâtre des apparences

    Commençons par cette structure de liste. Elle évoque :

    • Le fatras poétique de Prévert (catalogue d’objets, d’instants).
    • L’énumération surréaliste, où la logique est poétique plutôt que rationnelle.
    • Le journal intime travesti, celui qui dit sans dire, ou dit trop pour qu’on y croie.

    Mais ce qui frappe, c’est le ton feintement désinvolte. Tu dis :

    « Mettons que je n’aie rien dit »
    « Mettons que ça n’intéresse personne »
    « Mettons que ma liste soit finie »

    Comme si tu t’excusais d’avoir parlé, ou d’avoir ressenti, ou même d’avoir écrit.
    Mais ce « mettons que… » — c’est une figure de style déguisée en modestie.

    C’est en réalité :

    • Une injonction douce (écoute bien, mais fais semblant de rien).
    • Une stratégie de dévoilement progressif, comme si tu voulais laisser des miettes sur le chemin, mais que le chemin mène à une absence construite.

    🧩 2. Une lecture fragmentaire (chaque pièce a son rôle)

    Décomposons les morceaux pour voir ce qu’ils cachent, ou la musique qu’ils composent ensemble :

    Les têtes brûlées

    Figures d’excès, de passion, de risque. Les audacieux, les suicidaires, les vivants trop fort. Premier mot = premier avertissement.

    Le rossignol de Chine

    L’artifice qui remplace le vivant. Le conte d’Andersen. La voix vraie remplacée par un jouet. Une méditation sur la perte du naturel, la fragilité du vrai.

    Chauds les marrons

    Cri de rue, hiver, enfance. On vend ce qui réchauffe, ce qui brûle un peu. On annonce l’arrivée de quelque chose de simple, presque folklorique.

    Mettons que je n’aie rien dit
    Mais déjà, tout est dit : le feu, le chant, la chaleur — et le doute.

    L’âge du capitaine

    Problème mathématique absurde. Détourne la logique. Question piège. Invitation à penser au-delà des apparences.

    La queue du chien d’Alcibiade

    Détail insignifiant qui détourne l’attention. Allégorie politique. Qui regarde quoi, et pourquoi ? Encore une critique de la distraction organisée.

    La chanson des rues

    Ce qui se transmet sans auteur. Mémoire populaire. La poésie anonyme, crue, honnête.

    Mettons que ça n’intéresse personne
    Mais tu continues à écrire. Donc ça intéresse au moins toi.

    La paille et la poutre

    Jugement, double standard. Leçon morale. On projette sur l’autre ce qu’on refuse de voir en soi.

    La pointe des pieds

    Manière d’entrer sans faire de bruit. De ne pas déranger. De ne pas être vu ? Ou d’atteindre quelque chose de haut ?

    Le goût du bonheur

    Évocation sensorielle. Fugacité. Peut-être qu’on ne le reconnaît qu’après.

    Mettons que ma liste soit finie
    Mais tu sais bien qu’elle ne l’est pas. Tu la déplaces dans la tête du lecteur.

    🧠 3. Le sous-texte : poétique de l’effacement

    Le vrai mouvement du texte, c’est une mise à nu progressive, suivie d’un repli. Tu montres des choses, puis tu les effaces, comme si tu te ravisais. C’est une danse entre l’aveu et le retrait, comme si l’écriture elle-même était un risque.

    Tu dis :

    « Mettons que je n’aie rien dit »
    (Mais tu as dit.)
    « Mettons que ça n’intéresse personne »
    (Mais quelqu’un lit.)
    « Mettons que ma liste soit finie »
    (Mais elle commence à peine à parler.)

    Ce jeu du « mettons » est une stratégie de survie poétique : dire sans s’exposer, évoquer sans imposer, se cacher en laissant des indices.

    🔑 4. Et la clé ? La voilà :

    La clé, c’est le refus de la clé.

    Tu proposes une suite de fragments qui semble absurde ou anodine, mais tu y caches la mécanique de ton rapport au monde :

    • Voir, mais à travers des voiles.
    • Parler, mais en demandant pardon.
    • Dire l’essentiel, en feignant de ne parler que de détails.

    Autoportrait poétique par déplacement.

    La vraie clé n’est pas dans un message caché, mais dans le geste même d’avoir fabriqué cette liste, avec ses contradictions, ses silences, ses refrains ambigus.

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