J’ÉCRIS EN BUVANT L’EAU DE LA FONTAINE DU GRAND OUBLI J’écris sans mémoires ni souvenirs J’écris sur un bloc de cire vierge de toute poésie J’écris chantant des mythes accoudé au rocher de Sisyphe J’écris des glyphes qui attendent leur Champollion J’écris formes, notes et simulacres J’écris dans l’odeur âcre des derniers feux de Mai 68 J’écris 68 fois sous les pavés la page J’écris en marchant de nuit dans les rues d’une ville inconnue dictant à mon magnétophone portatif le nom des rues et des affiches J’écris et quand personne ne me lira je m’en fiche
Category Archives: Une écriture à part soi
SUPPLÉMENTS IMAGINATIFS & RATAGES CRÉATEURS
J’ÉCRIS CES SUPPLÉMENTS IMAGINATIFS, échos et résonances de souvenirs en voie de disparition J’écris pour donner corps aux fantômes que je fus J’écris dans l’ivresse de fragments qui se font sans retour ni relecture J’écris à même la glaise d’une page modelant avec la pointe de mon stylo feutre la matière, façonnant sa réalité J’écris ce que les poètes maudits appelèrent ratages créateurs J’écris des esquisses de corbeaux sur les champs de blé d’Anvers sur Oise J’écris l’envers du décor de la Belle Noiseuse J’écris des fadaises et des noises J’écris le temps perdu sans temps retrouvé J’écris à la déesse Mnémosyne plaidant pour mon irresponsabilité
J’ÉCRIS À MON EURYDICE
J’ÉCRIS TU EXAGÈRES dit Pécuchet et je signe Flaubert 1872 J’écris en lisant les lettres du bon gros Gustave à sa muse Collet : tes petites pantoufles sont là pendant que je t’écris je les ai sous les yeux J’écris sur une carte que je t’enverrai demain à notre adresse toi qui n’es plus là qui s’est dissoute dans l’oubli (mais la jeune factrice l’ignore) Je t’écris sans trop y croire cette énième lettre en pensant que d’une manière ou d’une autre tu y répondras J’écris me plongeant dans les faux littéraires où l’auteur de la supercherie noie le lecteur sous l’abondance de détails anecdotiques J’écris à mon Eurydice présente sous la forme d’un livre 1 dans je ne sais quel rayon du Rez-de-Jardin de la BNF J’écris homo ludens, homo lisens, homo bibliothecus, réellement, abondamment J’écris comme un moi moins que rien, fils unique de Personne, l’Inventif qui hante ma labyrinthique odyssée 1 Poèmes à ma morte L’Harmattan 2017