Boire seul sous la lune, écrit Li Bo, qui la prend pour amie et avec l’ombre qu’elle lui procure, les voilà trois.
Que n’inventons-nous pas pour peupler notre solitude ?
Assurément cette main qui court le papier, maniant le pinceau du poète-calligraphe,
ou bien l’ancienne plume et son encrier, avant le stylo pointe fine.
Écrire seul en silence, calé sur son oreiller, la lune à la fenêtre, les volets grands ouverts. Suggérer les activités joyeuses de jadis : la toupie sur les carreaux de la cuisine,
le jeu de barres dans la cour de l’école et la construction d’une cabane.
Hier après-midi, quand mon petit-fils a vu que sa cabane imaginaire,
quelques branches appuyées contre un tronc de pin, avaient été enlevées,
il m’a dit en secret : c’est un coup des hyènes.
Li Bo réapparaît, nuit de lune sur le fleuve, il vacille en buvant une nouvelle coupe de vin de Sin-fong.
Un dernier coup de rame, ma barque de papier ne sert plus que de marque-page,
les images des rêves, comment les épuiser ?
Li Bo (Li Po, Li Bai) 701-762

"Boire sous la lune" manuscrit premier jet
fond : composition Dorio
"hypnographies" néologisme inventé par JJ Dorio
collage sur papier glacé de revue

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