UN NOUVEAU DICTIONNAIRE À PART MOI

PRÉFACE

J’ai un dictionnaire tout à part moi

Montaigne

J’ai écrit des suppléments imaginatifs, des résonances de souvenirs en voie de disparition J’ai écrit pour donner corps aux personnes que je fus et à celles qui m’ont quitté J’ai écrit dans l’ivresse de fragments que l’on pourrait considérer aussi comme autant de ratages créateurs J’ai écrit dans un temps qui jouit des dernières douceurs de vivre en bonne santé J’ai écrit dans le mouvement qui me fait passer au travers de périodes séparées de ma petite histoire J’ai écrit pièce par pièce ce qui ne peut-être rapiécé

JJ Dorio

LE RECOURS AU DICTIONNAIRE

Jamais je n’écris un texte sans avoir recours au moins une fois au dictionnaire. Cette nuit par exemple il s’agissait de m’assurer de l’adjectif insigne. Mes livres Poèmes à ma morte et Un dictionnaire à part moi, suivent la forme abécédaire. Je feuillete essentiellement Le Petit Robert, je me perds dans  ses étymologies, je lis l’alphabet phonétique pour vérifier la prononciation standard. Je m’égare dans le personnage perecquien de Cinoc, le tueur de mots qui partent à la casse, je pastiche le chanteur Sansévérino, qui répète la cigarette la cigarette la cigarette et moi le dictionnaire le dictionnaire le dictionnaire Ma diction erre de cadavres exquis en enchanteur pourrissant, dans l’impitoyable partage entre les mots et les choses, bric à brac et frictions entre réel et fiction.

D’UNE TRAITE ET JOYEUSEMENT

Mettons que je n’ai rien dit. Mettons que je m’appelle Ishmaël et que pour chasser le cafard, l’envie me prend de naviguer et que j’embarque sur un baleinier. Mettons que cette navigation se fait en mode survie. Mettons qu’elle se perd dans Méandre fils d’Océan et de Thétis. Mettons qu’elle se change en exercice d’écriture et  que je traverse ainsi mes intimes altérités, croisant personnes et personnages, lieux, paysages, époques, pensées perdues et retrouvées, scènes autres et nourrissant mes feuilles d’ombre. Mettons qu’à la différence de l’écriture d’une poésie qui requiert un temps infini de retouches et variations, ce dictionnaire à part moi s’écrit d’une traite et joyeusement. Mettons en effet que n’ayant rien dit j’ai tout écrit.

https://www.leseditionsdunet.com/livre/un-dictionnaire-part-moi

CENTON 26 à 30

CENTON & MISCELLANÉES

(en cours d’écriture)

CENTON Pièce faite de fragments d’étoffes rapiécés, si l’on veut. Ou bien l’étoffe se transforme en textes divers puisés dans nos livres et que l’on « colle » l’un après l’autre. Des ajoutages lit-on dans les notes accompagnant les paragraphes mis bout à bout, d’une œuvre qui n’en finit pas d’être rafistolée. 

J’invite lectrices et lecteurs au gré de leurs lectures d’apporter à leur tour leurs petites pièces, leurs petits bouquets de citations.

JJ Dorio Martigues 18 novembre16 décembre 2023

les citations, greffes capricieuses en apparence, impriment une magnifique éloquence au discours : les citations résidus culturels, s’incorporent de façon prodigieuse dans la structure car, au lieu de s’ajouter tranquillement au reste du texte, elles font en sorte que tous les deux s’entrechoquent, prennent une puissance imprévue et se transforment en un nouveau chapitre du livre. Enrique Vila-Matas Paris no se acaba nunca Paris ne finit jamais

26

Avec quelque peu de bonne volonté, en tirant les mots au sort, dans un dictionnaire, et en comptant sur ses doigts le nombre de syllabes nécessaires pour former un vers, on a de grandes chances d’atteindre la perfection dans le genre et de devenir un très brillant poète décadent.

27

Écrire Écrire

Vivre en mots

Et en noir

Envers et contre tout

Tout contre

Jusqu’à la brûlure

28

En nous bruissent mille mots épars

Qui constellent tombent en trous noirs

Lent brûloir de braises d’histoires

De visages mouvants qui s’effacent

Nous laissant là sur l’ombre des traces

29

Domaine du calme. J’y étais alors.

Vraiment.

Non pas en passant, mais comme si à

la manière d’une partie d’assemblage,

j’avais été enclenché dedans.

Accru, nouveau, total.

Calme du fondamental.

Retour à la base.

L’Inutile enfin dissipé.

30

Ce que la hache désunit la braise le renoue, fibre à fibre.

Ainsi le feu tisse les paroles.

26 Léon Vanier (27 décembre 1847-11 septembre 1896)

27 Danielle Nabonne (29 octobre 1954-…)

28 Jacqueline Saint-Jean (1° avril 1938-… ) poème in Spered Gouez 29

29 Henri Michaux (24 mai 1899-19 octobre 1984)

30 Claude Brugeilles (22 mai 1944-… )

CENTON 21 à 25

CENTON & MISCELLANÉES

EN COURS D’ÉCRITURE

CENTON Pièce faite de fragments d’étoffes rapiécés, si l’on veut. Ou bien l’étoffe se transforme en textes divers puisés dans nos livres et que l’on « colle » l’un après l’autre. Des ajoutages lit-on dans les notes accompagnant les paragraphes mis bout à bout, d’une œuvre qui n’en finit pas d’être rafistolée. 

J’invite lectrices et lecteurs au gré de leurs lectures d’apporter à leur tour leurs petits bouquets.

JJ Dorio Martigues 18 novembre

les citations, greffes capricieuses en apparence, impriment une magnifique éloquence au discours : les citations résidus culturels, s’incorporent de façon prodigieuse dans la structure car, au lieu de s’ajouter tranquillement au reste du texte, elles font en sorte que tous les deux s’entrechoquent, prennent une puissance imprévue et se transforment en un nouveau chapitre du livre. Enrique Vila-Matas Paris no se acaba nunca Paris ne finit jamais

21

À la fin de ma vie je voudrais m’être servi de tous les mots du dictionnaire.

22

Va-t-on bientôt bombarder les anges ?

Préparons-nous à entendre l’espace crier.

23

On me dit que j’ai l’allure d’un flâneur. Je laisse dire, je ne flâne jamais. Je cours sans cesse après le temps qui court. (…) Si je flâne cependant, c’est sur l’autre rive de moi-même, dans ces terrains vagues où se déploient lentement et sans mon consentement les souvenirs de celui que je fus.

24

On voit à l’entrée du jardin public de Tarbes cet écriteau : Il est défendu d’entrer dans le jardin avec des fleurs à la main. On le trouve aussi de nos jours à l’entrée de la littérature.

25

Il y a des livres contre lesquels on se blottit, ils vous protègent, avec eux, on peut se laisser aller.

21 Georges Perec (7 mars 1936-3 mars 1982)

22 Henri Michaux (24 mai 1899-19octobre 1984)

23 Gilles Lapouge (7 novembre 1923-31 juillet 2020)

24 Jean Paulhan (2 décembre 1884-9 octobre 1968) Les fleurs de Tarbes

25 Maurice Nadeau (21 mai 1911-16 juin 2013)