DES SONS ET DES MOTS EN FORME D’HAÏKUS

1 À contre-courant Poème tranchant le ciel La terre et le feu

2 À contre-courant S’écrivent nos métaphores Nos transports des sens

3 Accroître ses pages Bouquet d’une anthologie Fleurs du mal rouies

4 À première vue Une aurore boréale Mais c’est un Rothko

5 Au cœur de la nuit Fantôme dans mon linceul Un fou shakespearien

6 Au creux d’un platane L’enfant lit prince perché Saint Exupéry

7 Balades Ballades En vers de cinq et sept pieds Sur mer et sur rades

DANSON LA GIGUE DES HAÏKUS

20 La vie orpailleuse Empoisonne la rivière Des Yanomamis

21 Dansons la gigue Disait dans Streets Paul Verlaine C’était à Soho

22 Je m’éveille las Fatigué de ruminer En perte d’amour

23 Bruit fait bruissement Le vent court sur le peuplier Le saule pleureur

24 Marcher sur la grève Porter un livre de sable Un grain de folie

25 Entre mots et maux Un dictionnaire à part moi Mes pas de côté

https://www.leseditionsdunet.com/livre/un-dictionnaire-part-moi

J’ÉCRIS opus 22





J’écris comme Jean Jacques Dorio

rencontré naguère dans un atelier

où l’écriture ravageait nos vies en poésie





J’écris travaillant l’écriture au corps

Traversé de haïkus et d’aphorismes

J’écris sur le court d’un tennis

Marqué à tout jamais par l’empreinte

du champion Bjorn Borg :

La balle est ronde

Le jeu est long





J’écris long renvoyant dans les cordes

les jeunes hommes pressés

et les jeunes filles en fleur





J’écris de ci de là

en ne pensant qu’à ça





J’écris sous les combles

Sous un vasistas

Où la lumière pleut

(et neige parfois)





J’écris en imaginant Bartok

écrivant ses partitions des Microcosmes

J’écris créant ce microclimat

propice aux pages d’écriture

faisant la navette entre micro et macrocosme





J’écris dans un camping-car Volkswagen

Qui m’a mené naguère

(avant la prise de pouvoir par les Ayatollahs)

Jusqu’à Téhéran





J’écris en oubliant d’écrire souvent

J’écris en me jouant du temps

J’écris en le laissant filer

Ou en l’arrêtant





J’écris sur une table Louis Philippe

ronde en noyer

trouvée sur le bon coin





J’écris sur du papier clairefontaine extrastrong

acheté à Bureau Vallée





J’écris sans confondre mes textes quasi bibliques

avec les bibelots abolis du bon Mallarmé

J’écris avec et contre les sonnets en X

les phrases incises et les ellipses





J’écris sans l’ombre d’un bruit

exceptée cette langue qui caquette

et qui bruit





J’écris sans réfléchir une première ligne qui déclenche le reste

J’écris anche en songeant à mon ami Rambour qui habite rue Franche

J’écris France du nom d’une bergère rencontrée en Mai 68

J’écris Bergère Ô Tour Eiffel

comme Guillaume Apollinaire





J’écris cette aubade inachevée

J’ÉCRIS opus 6





J’écris sur les murs du Grand Mai et sur les pavés des cathédrales

J’écris sur la plaque d’égout de Pont à Mousson à Pont Saint Esprit


J’écris à dire vrai en attendant ces mots cachés qui soudain m’apparaissent et que je couche sur le papier


J’écris ce dialogue intérieur d’un scribe qui pratique la déformation systématique, la moquerie, la gibe

J’écris à ce corps éphémère sous l’espèce de persévérance que Spinoza, si j’ai bien lu, appelait l’éternité :


De ce qu’un peu auparavant j’ai été il ne s’ensuit pas que maintenant je doive être le même

J’écris appuyé sur un grand livre à la couverture moutarde

J’écris aspiré par le bord de la nuit à pas de loup dit le haïku


J’écris à la renarde qui passe entre les lignes d’un poète animalier


J’écris l’été de mes douze ans dans un chalet loué en Gaspésie

J’écris petit moineau à qui on donne la becquée


J’écris à côté du laboratoire central becquets et paperolles sur  de petits papiers


J’écris à la Nébuleuse de l’Aigle à sept mille années-lumière

J’écris en aveugle sur le banc des accusés de fuite en avant dans le poème






 




 




LA PIE LE PALMIER ET LE FAUX PSALMISTE

trois haïkus allongés








Lundi temps gris

Une pie disparaît dans le palmier

qui remue

comme les lames

d’un gamelan

de Bali





J’ai observé la scène

ici rapportée

les pieds en l’air

sur ma table pleine de livres

à tricoter





C’est

-quoiqu’on en pense-

le bon temps de la vie





20/01/2020

11h36





Sur le palmier triste

sous la petite pluie

la pie est revenue





Mais si c’est bien la même

et ce n’est pas le même observateur

qui l’écrit





Pourtant il a toujours

les pieds posés

à hauteur de sa table de rumination





Mais ses livres anciens

ont perdu leur aura





et le bontempsdelavie

n’est plus que du chinois

24/01/2020
11h34




avec le mistral
qui secoue le palmier
la pie est interdite
d'accès
elles n'est plus capable
de venir se poser
sous les palmes
en l'écrivant
ma plume se félicite
de l'excellence
(pour cette fois)
de la perception 
d'un humain
05/02/2020
09h32

les instruments de ce dessin de pauvre
sont posés sur le sable
Fos sur Mer

plage du Cavaou
23/01/2020
16h12