NOS NILS NOIENT NOS NUITS NÉES NEIGES
Sans cap mais sans trêve je vogue vers l’Islande des livres qui, la nuit, remarque Borges, est comme une voûte entre la veille et le sommeil.
Sans cap mais sans trêve, chaque « journuit » faisant fête aux réminiscences et jeux de langages tel ce tautogramme inventé, dit-on, par Robert (le diable) Desnos : Nos Nils noient nos nuits nées neiges.
Et que n’ai-je vingt vies qui se fondent simultanément dans cette isle-lande façonnée par des matelots, bateliers, pasteurs sans dieux, bouchers, boulangers, aèdes de maintes Odyssées, romanichels, romanciers, chevaliers shakespeariens, croisant l’épée et l’invective, forgerons, « livreur » (qu’enfant Gaston Puel prenait pour un « faiseur de livres »), chercheurs des temps perdus, dormeurs du val et de l’amont, emmerdeurs à l’espoir jamais rassasié.
Le jeu se termine à présent par l’échange des anneaux, d’or et d’argent, d’ivoire et de lune. Un jeu nécessaire pour que dans l’avenir subsistât cet échange qui à tout prix doit demeurer ; dans le trouble et la sérénité, la non-assurance et la confiance de deux personnes « en absence », qui, à distance croisent leurs lignes et leurs esquisses, pour en lisant, en écrivant, savourer leur vulnérable et féconde proximité.
Gaston Puel (1924-2013) Le journal d’un livreur Editions l’Arrière Pays (1997) Pauline Dorio (née en 1986) La plume en l’absence (Le devenir familier de l’épître en vers de 1527 à 1555) Editions Droz 2020
https://www.leseditionsdunet.com/livre/un-dictionnaire-part-moi