DEUX ÉPITAPHES EN VIS À VIS

Claude Brugeilles ELLIPSES

ÉPITAPHE

Faute de mieux je fais des vers
Des verts des jaunes des « en couleur »
Je fais des vers d’amour de grâce
Et de disgrâce sans valeur

Pourtant je sue je m’évertue
J’épuce les dictionnaires
Mais depuis que je deviens vieux
Je n’ai plus la faveur des dieux

D’autres que moi sont honorés
Leur chef orné de la couronne
Du mol rameau d’un olivier

Ci-gît JJ qui n’eut pas fame
Fut fol usant en vain ses gammes
Et pi mourut… sans épitaphe

JJ Dorio En vis à vis 

LES PANTOUFLES DE CALVINO

106  LES PANTOUFLES D’ITALO Italo Calvino me voit cette nuit hésitant sur le chemin des mots, cherchant la forme d’une histoire  à proposer à un hypothétique lecteur. Amical Italo s’approche et me glisse sous les pieds ses pantoufles. Or, comme chacun sait et surtout Monsieur Palomar, ce sont pantoufles dépareillées. Je me lève alors, et feint de boiter un peu sur le chemin cahotant des essais et du compagnonnage avec un auteur illustre. Pas de forme dans l’informe, mais une paire de pantoufles dépareillées…(Le livre d’une vie Une autrebiographie en mille et un fragments) JJ Dorio en cours d’écriture

Italo Calvino (un brin narquois)

PALIMPSESTE

PALIMPSESTE « Écrire sur soi peut-être aussi une façon de s’effacer, comme un palimpseste sans transparence. » Gérard Genette « Apostille » Rien de plus imparfait que le texte « à venir ». Il naît de mon bric-à-brac personnel, à nul autre pareil :  -ceci dit sans la moindre forfanterie – livres qui se tournent le dos, émissions de radio que l’on peut réécouter, mémoire trouée et têtue et ce stylo noir qui court la poste des gens isolés et des fugitifs des nuits transfigurées. Pensée sauvage et Bricollages – que j’écris depuis un texte patchwork de 1970 avec deux ailes. Comme si chaque nuit, vous réveillant d’un premier somme, vous vous confiiez à la main qui écrit, et qui va, chemin faisant, vous révéler ce à quoi, sans cet outil fragile et précieux, vous n’auriez jamais pensé.

JE SUIS JE NE SUIS PAS

Je suis par hasard né Dorio
Et non Tardieu (Jean) ou Marx (Harpo)

Je ne suis pas le veuf le ténébreux l’inconsolé
(mais tout de même un peu)

Je suis cet obstiné qui s’invente
Mille et une identités
Parce que chaque fois qu’une apparaît
Il s’écrit : Sacrebleu mais ça ce n’est pas moué !

Je ne suis pas sur la photo des déportés du Camp des Milles
Mais j’aurais aimé être celui qui a dessiné un cœur percé d’une flèche
Avec trois mots à l’intérieur :
La Liberté La vie La Paix

JE ME SOUVIENS DE MONA LISA ET DES BIDONVILLES DE CARACAS

Je me souviens de Mona Lisa Gherardini épouse de Francesco del Giocondo
Je me souviens de Franco la Muerte
Je me souviens des arènes de Nîmes de Madrid (la Monumental) et de celle du Nuevo Circo à Caracas qui vit le triomphe des frères Girón
Je me souviens des ranchitos les bidonvilles de la capitale du Venezuela où les enfants disputaient la nourriture aux buitres ou zamuros les oiseaux charognards
Je me souviens du faucon hagard 

Je me souviens du fleuve de l'Oubli le Léthé 
Je me souviens d'Estate que Nougaro reconvertit en Un été
Je me souviens de la petite espagnole du quartier
Je me souviens de Je hais les dimanches
Je me souviens qu'il faut savoir finir une grève
La grève de faire ces listes sans fin de mes
Je me souviens

liste initiale 11/09/2021 
Bayeux hôte du poète Jean Louis Rambour*
revisitée ce 06/09/2023 aux Martigues

* Quand nous écrivions le poème sur une feuille
Ce que nous marquions c'étaient nos doigts
Notre main notre poing 

L'ÉPHÉMÈRE CAPTURE