Le plus court chemin de soi à soi passe par autrui Paul Ricœur
Seul.e.s assurément
donnant le change
par cette danse tremblée
des lettres sur nos pages
Seul.e.s naturellement
dans cette attention flottante
réservée aux praticiens de l’hypnose
et aux pupilles de la nation des poètes
mort.e.s au front des métaphores vives
Seul.e.s dans les champs de tournesol
nos amours jaunes
et les matières immatérielles
que voient les aveugles
dans les musées
Seul.e.s et dialoguant
avec les portes les fenêtres
les graffiti de charbon
sur les murs des églises romanes
Seul.e.s dilaté.e.s
arpentant les mille et un livres
de notre bibliothèque unique
léguée aux dieux de la dispersion
Seul.e.s à la proue
mon beau navire
ô ma mémoire*
naviguant divaguant
au cœur des poèmes
sans testaments
*Apollinaire
Seul.e.s terriblement
de ce qui en nous
est dur compassé et frigide*
*Odile Caradec
Seul.e.s vaillamment
Gall amant de la reine*
« el viento galán de torres
la prende por la cintura »**
*Marc Monnier ** Federico García Lorca
Seul.e.s obscurément
à la lueur d’une chandelle
à la santé des serpes et des serpents
Seul.e.s vocabulairement
écriture inclusive dans la voix des passant.e.s
de nos instants secrets