LE CADEAU SANS FIN


J’entre pour la vingt quatre millième fois (évaluation chiffrée non garantie) dans un livre
Il est nouveau je viens de le choisir dans l’unique librairie de ma ville de 50 mille habitants
Le livre me renvoie d’entrée (l’auteur titre élégamment Ardoise d’entrée) à un fragment de Borges tiré d’Éloge de l’ombre
Un peintre écrit-il lui avait promis un tableau il vient d’apprendre que le peintre est mort et le tableau par conséquent perdu
À sa place préétablie Borges se dit qu’après tout ce tableau non lié à ses couleurs et formes existe en quelque façon non comme vanité matérielle mais comme promesse immortelle
The unending Gift

10 avril 2025 18h12

POURQUOI J’ÉCRIS DES POÈMES

 

POURQUOI J’ÉCRIS DES POÈMES
 
Je ne me suis jamais posé la question.
Oui, mais voilà, c’est venu sous la plume.
Aussi, face à ce qui se dérobe,*
Je vais tâcher, poussant le paradoxe,
De ne pas (me) dérober.
 
J’écris des poèmes parce que
Ça m’amuse
Bien que le jeu me prenne tout entier
Et sérieusement
Durant son exécution
 
J’écris des poèmes parce que
C’est – ne riez pas – une vocation.
À mesure que la poésie disparaît de nos sociétés,
C’est, à rebours, porter haut son jeu incantatoire
Et son univers quotidien
Fragile et capricieux,
Qui importe.
 
J’écris des poèmes parce que
C’est toujours une promesse de découvrir
Une part cachée de soi
Qui sort d’une formule inattendue,
D'une étincelle qui couvait
Sous la cendre,
Le livre de sable**
D'un dictionnaire infini.
 
J’écris des poèmes parce que
Je m’abreuve et m’enivre
Des milliers de poèmes
Brinquebalant dans le grand véhicule
Où s’accouplent ballades et chansons au ton bref
 
J’écris des poèmes parce que
Je ne veux pas mourir***
Je souffle et souffre
La mort la vie
L’envers l’endroit
Qui se concilient ou se déchirent
En silence
 
J’écris des poèmes parce que
J’aime enjamber l’aurore
Après une nuit consacrée à l’invisible
Confondant le commencement et la fin
D’une voix qui se décline sans personne****
Et avec chacun
 
 
*Henri Michaux ** Borges ***
Anne Sylvestre : chanson : Écrire pour ne pas mourir
**** Jean Tardieu



nb : pour les enfants et pour les raffinés

ce poème dans cette version non définitive
a été écrit à la main sans ratures
commencé dans la nuit du 12 septembre
(au lit)
continué l'après-midi assis sur le mur grec de Saint Blaise
(commune de Saint Mitre les Remparts)
parachevé ( après de longues hésitations
marquées par des ajouts et suppressions )
sur le clavier de l'ordinateur
ce vendredi 13 septembre
à cinq heures du matin