UN REMÈDE AU SPLEEN





Quand le ciel est trop lourd 
La peine trop profonde
Quand le fumier déversé par les news
Emplit de puanteur les écrans et les ondes
Parmi les chacals, les panthères, les lyces,
Dans la ménagerie infâme de leurs vices 1

À l’écart
Je fais silence et j’oublie mon blues

Je marche dans les bois
Je longe la plage où l’hiver
Nul ne bronze

Et plus tard
Le cœur apaisé
Je relis les yeux fermés
Les poèmes sans âge
Lyriques et anti-lyriques
Connus et inconnus
Avec ou sans virgules

Je relis des yeux, de la voix,
Les fleurs du mal, la chanson du mal-aimé,
J’embarque dans le bateau livre

La barque pleine à ras bord de mes livres dédicacés
Par celles et ceux qui font encor marcher de nos jours
La machine poétique
Et l’émotion créée 
Par l’espèce fabulatrice 2

Quand le ciel est trop lourd
Mon esprit se déleste
Flotte et chavire
Dans les mémoires vives
Ô mes navires !


1 Baudelaire 2 Nancy Huston