Il y avait des tracts qu’on se mettait à réécrire
en les distribuant
et des bombages permanents sur les murs et murailles :
LA VIE VITE…
Il y avait une vitrine de galerie de peinture
où on pouvait lire ENTREZ LIBRE
Il y avait des braderies de troc uniquement
(le pognon n’avait pas droit de circulation)
Il y avait ni auto ni boulot ni flics dans les rues
en dehors des manifs
si bien qu’on y faisait des groupes de discussion sur la vie
jusqu’à des heures de nuit pas possibles
Il y avait des nanas
avec des chaussettes blanches jusqu’aux genoux
et des mini-jupes ras le cul
sur lesquelles on pouvait lire :
L’INDÉCENCE N’EST PAS DANS LA TENUE
MAIS DANS LE REGARD
Il y avait parmi les livres de Maspéro
qui circulaient entre nous
et dont on causait sans fin
Libres enfants de Summerhil
Il y avait Mouna Aguigui
Qui passait sur sa bécane
En proclamant ses inévidences
Qui faisaient rire le chaland
Y a des écoles pour apprendre à conduire des bagnoles
Y a pas d’école pour apprendre les mômes à conduire leur vie
Il y avait des A.G. pour changer le monde
Et des A.G. magiques
Où les mandarins étaient changés en mandarines