Autour de minuit une énergie molle
Je m’étais endormi je me réveille déjà
La nuit sera longue ou ne sera pas
En attendant j’abandonne mes vers
Pour lire dans le marc de thé
Issu du Sichuan si j’en crois l’étiquette
Je l’étale sur ma page
Et savoure son breuvage
Fait de yin et de yang
Vibrations ondulations
Des signes et des caractères
Porteurs de métaphores
Qui filent entre les doigts
de Round Midnight
Category Archives: poème
UN VRAI POÈME
Un vrai poème ne raconte pas d’histoire
Il médite il se joue des mots de la tribu
Un vrai poème s’écrit sans se prendre pour un poème
Il rythme il parabole il caracole
Puis il reste en suspens
La langue bien pendue n’est pas de son ressort
Un vrai poème creuse sa tombe
Comme s’il s’agissait d’un commencement qui n’en finit pas
Elle est fleurie d’ un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur
LE PRINCE DES ÉPÎTRES
Je relis Marot
Le prince des épîtres
J’écris haro
Sur le baudet
Je fais le pitre
.
Je pointe Poutine
L’affreux Nain jaune
Au cerveau reptilien
Massacrant le peuple
Héroïque Ukrainien
.
Je ressors mes carnets d’écriture
Vieux d’une décennie
Je redécouvre des textes touchants
Ou ratés :
Je me dis que l'auteur
de l'adolescence clémentine
m'aiderait à faire le tri
.
À LIVRE OUVERT
À livre ouvert mais sans trop de pouvoir sur ces lignes qui se déroulent et s’échappent comme des serpents
À livre ouvert faisant crisser les mots gros-gras-grand-grain-d’orge qui nous remettent en tête nos années théâtre en Mai 68 où nous chauffions nos voix d'acteurs amateurs
À livre ouvert aux aurores rose du ciel comme avant une journée d'été brûlante
À livre ouvert pages arrachées et qui s’envolent capricieuses offertes à notre humaine condition qui en ces temps crépusculaires aiment plus que jamais célébrer les couleurs les lumières et les sons

Hans Reichel (9 août 1892-7 décembre 1958)
Composition 1954
aquarelle et encre de Chine sur papier
19,3x27,3 cm
découvert avec enthousiasme au musée de Lodève ce 12 juin 2025
FILTRES À CAFÉ

C’est la première fois que j’écris sur un filtre à café brun marron
Ça m’oblige à faire des lignes courbes et d’imaginer des mots à la place
des grains de café réduits en poudre :
Et nous les os devenons cendre et poudre. François Villon.
Recopier des vers anciens que j’ai en tête et qui viennent au hasard de mes rêveries,
m’irriguer de leurs sens toujours renouvelés.
La main écrit, s’arrête, reprend, parle, se tait, se répète, file la métaphore,
nous conduit au-delà de ce que nous sommes et nous ne sommes pas.
Labyrinthe, parcours labyrinthique, à tâtons, j’avance et je me heurte, j’interprète, je me trompe ou je réussis, le bel hasard me guide, ou me trahit.
Traité des Tropes de Du Marsais, pour y voir plus clair
ou trébucher – tropezar – dit-on en Espagne.
Le tout est de se relever. Relever ses filets de voix et de manières de dire.
Arborescences, buissonnements, puis, ce rameau d’arbre effeuillé l’hiver,
par la mort de sa compagne, et qui par l’opération de l’Écrit devient cristallisation
chère à l’amour stendhalien.

Sans Prétention manuscrit sur papier filtre à café fond « mola » tissée
don de Michel Perrin ethnologue : Tableaux Kuna (Arthaud)
*
SANS PRÉTENTION
Sans prétention
Mais non sans dynamisme
.
Sans tension
Mais non sans attention
.
Sans plan préétabli
Mais non sans
materia prima
sur l’établi
.
Sans prétexte
Mais non sans texte
qui file sous les cinq doigts
de la main qui écrit
.
Sans signes
mais non sans défi
aux singes grammairiens
.
Sans savoir
Mais non sans saveurs
des mémoires de l’oubli
.
Sans poésie
Mais avec cent poèmes
appris et désappris
.
Sans prix
à la foire
des poètes couronnés
Mais non sans semences
des clous du sabotier
.
Avec le rythme des saisons
de mon petit jardin imparfait
mais jouissif
.
Sans réelle reconnaissance
Mais non sans pensées joyeuses
qui font la sarabande
.
Sans fond en apparence
Mais non sans cette forme
goutte à goutte
qui fond sur un filtre à café
.
Sans accord
Mais non sans ces coups
de raccrocs et de rabots
sur la planche du vide et du chaos