EN MARMOTTANT métamorphoses et métalepses 53

cinquante-trois

à André Bellatorre,





MUSITANDO (EN MARMOTTANT) je mélange la littérature avec ce que l’on appelait naguère, (avant l’invasion des ours de l’autofiction), des récits de vie. Je suis d’abord visité par Kafka, dont j’avais zappé l’épisode du Père, bombardant son fils, le petit monstre, de pommes pourries qui maculent son corps. Les fruits se métamorphosent ensuite en une myriade de grains de grenade, dégustés hier soir, à l’heure du téléjournal, pendant la prestation du pitre de la Maison Blanche, lançant depuis son balcon, son harangue, à la foule des casquettes rouges, tel un Néron d’opérette. 

Puis, c’est le film du soir, un tramway nommé Vertigo, passe sur l’écran plat (« l’étrange lucarne » d’antan), durant une scène d’anthologie (elles le sont toutes), de Sir Alfred.

Enfin, c’est le moment qui donne le plus de sueurs froides, je vois un type bondir sur la pelouse en herbe du stade de Séville, une nuit chaude, bouillante, de juillet 82. Il se dirige vers le portier allemand, un certain Choumacher.e, (ça ne s’invente pas), et en un geste digne d’un Atelier d’Écriture concocté par le maître de l’Orphéon, vide le chargeur de son revolver, en criant : Schumacher salaud, le peuple a eu ta peau ! C’est, le lecteur dopé à la Métalepse l’aura saisi, un rêve récurrent.

En marmottant, musitando.





de Martigues, ce dimanche 11 octobre 2020.

POÉSIE FEINTE POÉSIE VRAIE









la véritable poésie est la plus feinte




La véritable poésie est la plus feinte

Feintes, mots changés en images de belettes

ou de chameaux, comme la forme des nuages,

Songe une nuit d’été le personnage de Hamlet.





Poésie au couteau sans manche et sans sa lame

Lame de fond changée en étoffe lamée

D’hyacinthe et d’or le monde s’endort

Hypotypose Ordre et Beauté là, mais.





Et que dit le silence entre deux quatrains

Quand on secoue avant la reprise

le kaléidoscope de nos figures ?





Tableau en trompe l’œil

Anamorphoses.

Tant va le vers vers sa métamorphose

Qu’à la fin il s’envole ou se brise.





Italiques Baudelaire

SOYEZ INDULGENT









Soyez indulgent

envers le poète

des Métamorphoses

exilé de force

près de la Mer Noire





Soyez indulgent

envers le poète

qui fit des ballades

sous les arbres

où se balançaient

des pendus





Soyez indulgent

envers le poète

effaré

qui inventa une

cinquième saison

pour les mômes

affamés

leurs culs en rond





Soyez indulgent

envers le poète

lisboète

qui signa de cinq noms

son œuvre impersonnelle





Soyez indulgent

envers le poète

qui épuisa sa police

politique

puis se tira une balle

en plein cœur

(ou peut-être

dans sa tête)





Soyez indulgent

envers le poète

ci-devant

qui passa sa nuit

dernière

à consoler

sa jeune captive

la tête sous la guillotine





Soyez indulgent

envers le poète

qui écrivit ses lignes

tout un dimanche

de sa vie

répétitivement