La langue à moi-même j’ai jamais eu disait Jak Kerouak canadien français venu au monde à New England (Nouvelle Angleterre)
Causant d’abord Joual sa langue de parole à la graphie phonétique qu’il usa en utilisant sa plume à qui mieux mieux (inédits de Kerouac en "français ")*
Langue parolière et parolée des conteurs savoureux qui fit notre écrivain se lancer dans l’écriture sur un rouleau de 36 mètres de long de On the Road dans une langue anglaise tard trouvée
Cette langue à soi-même (comme un autre) qui fait la saveur des écrits qui coulent en nous, qui flottent, qui nous font naviguer et dériver de nos belles aubes en tristes soirs…
* Dans l'moi d'octobre 1935 dans la nuit de nos vras vies bardasseuses y'arriva une machine du West de Denver sur le chemin pour New York
(Cette version de Sur la route intitulée comme cet extrait le révèle Sur le chemin)
Category Archives: la prose du monde
LES RUES D’PARIS
À Paris il y a de drôles de rues
Il y a la rue Gramme
au 17 vécut Benjamin Peret
l’astre noir du Surréalisme
Il y a la rue de Javel
désinfectant notoire
mais pour Jean Echenoz
une succession de blocs hétéroclites
en matériaux désassortis
sans état d’âme
Il y a la rue Rosa Bonheur
femme peintre aux titres éloquents :
Labourage nivernais
Le marché aux chevaux
La foulaison du blé en Camargue
Il y a la rue Crevaux
où vécut Leblanc Maurice
le créateur d’Arsène Lupin
Guillaume Apollinaire résida rue Gros
en buvant cet alcool
brûlant comme sa vie
Il y a la rue des Arènes
propice aux vues de Michel Leiris
qui fit de la Littérature
un pendant de la tauromachie
Il y a la rue Madame
de l'homme révolté
Il y a la rue Racine
Cioran affirme qu'il y jeta
dans une bouche d'égout
Un de ses tapuscrits
Et la rue Sans Souci
Ou je prose ces vers
Au ralenti
UNE DÉCENNIE SANS TOI
Ce soir il y aura dix ans que tu t’es éteinte
Pour l’évoquer j’ai trouvé un image
à laquelle je n’avais pas encore songé
J’ai vu une actrice traverser un paysage irréel tenant une bougie
Elle fait des pieds et des mains
pour maintenir en vie la petite flamme
Jusqu’au moment où ce n'est plus qu'un point noir
L’actrice tombe alors à terre
Comme foudroyée
***
Je t'ai raconté ce rêve où j'allais à mon enterrement, joyeux, puisqu'entouré d'ami.e.s. Et puis,tu le sais mieux que moi désormais, à la fin quand la fête est finie, tout le monde se retire, reprend ses cliques et ses claques, retourne à ses pénates. Sauf toi, ma belle endormie.
-Tu es maintenant la seule à ne pouvoir nous suivre, te dit le dernier des fêtards.
Et pour moi, qui ne rêve plus, en relisant cette histoire, je me dis aujourd'hui qu'il se fait tard, il se fait tard.
Martigues 2 août 2014 et 25 mai 2024
DANS LA MÉMOIRE DE JOSIANE DORIO
C’est ainsi que je vais regrouper les textes et poèmes qui te sont consacrés, en dehors de mon livre hommage (sous forme abécédaire), publié sous le titre Poèmes à ma morte, aux éditions l’Harmattan. (2017)
Chaque poème était précédé d’une citation. Celle de Vladimir Jankélévitch, à la source du poème « Viatique », est une « majeure ».
Nous l’avons lue, avec grand soin, chaque fois que nous allions à Paris, passant devant l’immeuble du Quai aux Fleurs, où le philosophe, si attachant, vécut :
Celui (Celle) qui a été ne peut plus désormais ne pas avoir été : désormais, ce fait mystérieux et profondément obscur d’avoir été est son viatique pour l’éternité.
ENTRE DEUX SOMMES
Sommeil interrompu
Je me réveille
La poésie de mon
dernier rêve
tombe dans la prose
sur mon papier
J’entends le bruit
des acouphènes
grésillements auditifs
qui riment avec phosphènes
troubles visuels
Oui décidément
la poésie boîte en prose
elle a mal à ses pieds
L’ENTRÉE À RAFAH
On écrit bien que seul. Sans personne alentour. Sans personne à qui parler. Forcément.
On écrit mal aussi. Mille choses nous assaillent. On ne sait par où commencer. Penché sur le jardin d’herbes folles, le journal de papier que l’on vient de sortir de la boîte à lettres, ainsi que deux livres. Un troisième à moitié lu, emprunté à midi à une amie. Et pour compléter ce tableau, de la musique tournant dans ses oreilles appareillées.
Oublions. Arrêtons. Avant de vraiment commencer.
Le nouveau c’est en même temps l’ancien : dans le nouveau l’ancien se reconnaît et devient facilement intelligible. Théodore Adorno
Le nouveau c’est : L’entrée d’Israel à Rafah fragilise l’espoir de trêve. Le Monde mercredi 8 jeudi 9 mai 2024