PAS DE RATURES S’IL VOUS PLAÎT

Pas de ratures s’il vous plaît

C’est la consigne pour ce nouveau carnet

qui nécessitera une préparation mentale

ou tout au contraire de foncer plume déployée

à la manière de l’écriture des champs magnétiques

Ainsi vont le corps et la pensée

Unis comme mari et femme

une image énigmatique lue dans les Essais

Pas de littérature s’il vous plaît

COMME UN BON PAIN

Faire lever 
comme un bon pain
des poèmes
des inédits
comme on dit
Ou bien
Pousser la porte
simplement
Sans attente d’images
Mais en revoyant
ému
Celles de ton jardin d’enfant
Et se souvenir
Que l’amour a été
Tout pleins d’été
Où l’on faisait
lever des poèmes
comme du bon pain
sans fin

D’UN TRAIT DE PLUME

D’un trait de plume 
encore
J’illumine la nuit
de ma maison natale
Face à l’église qui sonne minuit
Ma maison disparue
ainsi que tous ceux qui l’habitèrent
de la cave au grenier
Et j’oublie les paroles
les images perdues
Juste cette rencontre
D’un trait de plume
encore
Qui me maintient en vie

AU TRAVERS DE MA NUIT

Je ne vois plus le jour
qu'au travers de ma nuit

Je ne vois plus la nuit
Que comme un jour sans fin
Toujours en mouvement
De rêves en rêveries
Les images me fuient
Les images me font
Un corps de magicien
Un corps écartelé
Qu'un poème parvient
À rassembler parfois
Et d'autrefois je laisse
Aller le pur hasard

l'amorce en italique est de Jules Supervielle




J’IMAGINE

J’imagine Montaigne sur le cheval du temps à sauts et à gambades
J’imagine Mallarmé remodelant sans cesse son pitre châtié
J’imagine Tristan Corbière écrivant après chaque marée sur la plage des Amours jaunes
J’imagine Tardieu monsieur Jean qui danse le tango avec la Môme Néant
J’imagine mes amis Claude et Jacqueline l’une au jardin d’Alice poussant l’escarpolette du temps suspendu, l’autre faisant et défaisant sa cibiche de papier païs
J’imagine les Images que la lecture d’un poème nous donne et qui nous touche en profondeur parce que nous aurions pu les créer être parlant et résonnant
J’imagine sans fin tant que vivrai tant que vie vraie nous est permise en faits et dits en chansons en accords

précisions : les amis Claude Brugeilles et Jacqueline Saint-Jean, l’Image selon Gaston Bachelard, les dernières lignes de Clément Marot
À sauts et à gambades Jean Jacques Dorio Encres Vives 402 janvier 2010

J’imagine 3 hypnographies du 7 mai 2024