NOUVELLES DU CIEL

J’offre mes yeux entrouverts à la nuit Un iris m’éclaire de sa lumière mauve Ma main d’écriture cherche hasard les fleurs egarées dans les livres-bougies

Chères lectrices-lecteurs plutôt que de payer vos chagrins d’amour Lisez les poèmes chargés de vous donner des nouvelles du Ciel Jamais du Monde

SUNT LACRIMAE RERUM


Avec les citations dont je fais des bouquets
J’entretiens des rapports d’amitié
Sunt lacrimae rerum
et mentem mortalia tangent

« Toutes les choses ont leurs larmes
qui émeuvent le cœur des mortels »

Les livres désormais m’entretiennent durant le repas
Nulle chose ne me fait pleurer
Mais leur saveur enfuie qui me la fit partager
- et sans cesse apprécier –
Avec celle qui de l’autre côté de la table
N’est plus là

Et avec qui nous fêterions
Son anniversaire ce jour d'hui

Martigues 10 avril 2024

DES LIGNES DE GRATITUDE

Des lignes de gratitude
J’en ai beaucoup à gratter
À la plume sur le papier

Pour les vivants et les morts
Et d’abord pour mon épouse
Qui fut vivante jusqu’à sa mort

Pour mon père que je n’ai pas tué
Et ma mère que je n’ai pas épousée


(S’ils me lisaient
la référence au mythe d’Œdipe
leur manquant
ils seraient quelque peu désappointés)

Pour mes filles et leurs rejetons
Qui me prolongeront


Pour mes lectrices et lecteurs
Aussi rares que précieux

Pour les bonnes rencontres
D’amies et d’amis perdus
Et parfois retrouvés

Pour les livres de ma librairie 1
Et plus précisément
Ceux que je fatigue sans cesse


Ce sera tout pour aujourd’hui
Premier jour du printemps
De l’an deux mille vingt-quatre

1 ainsi Montaigne nommait notre bibliothèque

des signes de gratitude hypnographies du 26 mars 2024

J’AI BESOIN ET JE N’AI PAS BESOIN D’ÉCRIRE

J’AI BESOIN ET JE N’AI PAS BESOIN
D’ÉCRIRE

Le travail du Temps est ce qui fait qu’on s’absente de soi
Jusqu’à l’ultime absence 
Il est altération
Il est l’Autre qui s’insinue dans la place du Même

François Hartog

J’ai besoin d’écrire
Travail sur le temps permet
S’absenter de soi

J’ai besoin de rire
	De rire de soi permet
De rire des autres

Ceux qui la ramènent
Ceux qui donnent des leçons
Ceux qui nous emmerdent

J’ai besoin de lire
Voyager à l’intérieur
Sillonner des pages

J’ai besoin d’un rien
D’une page des Essais
D’Azertyuiop

J’ai besoin des nuits
Ou je prose tous mes vers
Au lit Litanie

J’ai besoin de l’œil
Que Nature m’a fait
Marron point vert

J’ai besoin plaisan
Terie à part de mentir
Pour faire plus vrai

J’ai besoin de soins
Alternatifs : l’air de rien
La lyre d’Orphée

J’ai besoin de voix
Les chères qui se sont tues
Les Nouvelles Nées

J’ai besoin de voie
Celle qu’on ne peut nommer
L’Arcancielesque 

J’ai besoin de toi
Toi qui fus ma seule au monde
Toi qui nages dans mes pages

J’ai besoin et je n’ai pas besoin
De lèvres sur les livres
Empreintes de soupirs

J’ai besoin d’écrire
Le mot fin le fin mot
D’une histoire inachevée

La nuit du 10 septembre 2023

L’INÉPUISABLE DU MURMURE

L’INÉPUISABLE DU MURMURE Entouré de livres comme un animal de gluant, de sec, de velours herbeux Comme un chaman de petites âmes rôdeuses de tabac liquide et de malades à réenchanter Entouré d’êtres chers qui dorment entre les pages On peut aussi lire à l’envers, à contre-sens des yeux d’un lecteur qui ne veut pas mal tourner Ou bien perdre le fil On peut lire à contre-courant, en amont de celui qui cherche l’inépuisable du murmure andré breton