PRÉSENTS POÉTIQUES


Estos días azules y el sol de la infancia 
Antonio Machado
Ces jours d’azur et le soleil de l’enfance


Poèmes ce matin
Sont ces présents
Dans l’œil

Bois de pins
Palmiers
Mistral léger

Et ce ciel bleu
Qui tant exaspère
           Les poètes nuageux          

https://www.leseditionsdunet.com/livre/un-dictionnaire-part-moi

QUINZE DÉPARTS DE TEXTES FULMINANTS

1

DES VENTS

Des vents, louvrage dun poète philosophe aristotélicien, des vents étésiens, du zéphyr toujours doux, du terrible Mistral, du vent de mer provoquant sur ma plage du Golfe de Fos, une petite houle qui fait crier de joie les enfants et leurs papis. Faisant frémir, en marge de tout ce qui sécrit dans les derniers journaux imprimés, ma page.

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SOUFFLER n’est pas jouer





Un poème est une durée, pendant laquelle, lecteur, je respire une loi qui fut préparée; je donne mon souffle et les machines de ma voix, ou seulement leur pouvoir, qui se concilie avec le silence.  Paul Valéry





Souffler n’est pas jouer Souffler un pion sur le damier Souffler profession d’un souffleur de vers Souffler sur le cordon d’amadou pour rallumer sa pipe, sa vieille pipe en bois Souffler la fumée d’une Craven A Souffler sur les braises de ses tisons après avoir ôté les cendres de la veille Souffler le chaud Souffler le froid Souffler le siroco Souffler la bise imaginaire sur la cigale et la fourmi Souffler au poil le lièvre et dans les plumes de la perdrix Souffler à la figure les imprécations d’un personnage de Tragédie Souffler dans sa trompette coudée du Be Bop ou du jazz funk Souffler avec furie ses rafales de Mistral qui rendent fadas les Phocéens Souffler l’esprit joyeux de Mai sur le Boulmich qui descend vers la mer Souffler à Murano le verre en cristal de Bobo de Bohème Souffler sur les années perdues et les feuillets de Marcel disséminés au pied du lit Souffler sur un exemplaire dépareillé de Moby Dick Souffler comme un taureau mis à mort à las Ventas ou à la Maestranza Souffler sur cette page que j’ai composée de brique et de broque pleine de nostalgies et de futilités


	

LES DEUX SOURCES DE COLETTE





Il y a un demi-siècle, et plus, que je parcours un livre avant de m’endormir.

Cette nuit c’étaient ces lignes cocasses de Colette évoquant le voisin d’un jardin attenant,

qui bêchait parlant à son chien blanc qu’il teignait au 14 juillet « la tête en bleu et l’arrière-train en rouge. »

À mon réveil, un peu avant 7 heures, je reprends « Sido », stupéfait, étonné et ravi,

d’apprendre que cette mère unique réveillait l’été sa gamine à trois heures et demie !

La petite « Beauté, Joyau-tout-en-or », s’en allait « un panier vide à chaque bras, vers les fraises, les cassis et les groseilles barbues ». Revenant à la cloche de la première messe, mais pas avant de s’être saoulée des fruits sauvages recueillis et d’avoir goûté l’eau de  deux sources perdues.

Quand sa plume lui dicte ce dernier souvenir, l’écrivaine qui a atteint les trois quarts de sa vie,

souhaite qu’ « au moment de tout finir », la saveur des sources emplisse encore sa bouche, « et que j’emporte, avec moi, cette gorgée imaginaire*… »

Avant de tout finir, formule ouverte à tous les vents.

Ce matin du lendemain de Noël 2020, c’est Mistral fou qui retient un temps mes volets.

Durant ses derniers jours, ma femme, ma « semblance », ma moitié, ne voulait plus qu’on les ferme la nuit.

Elle voulait encore goûter la saveur des étoiles, le pâle dernier reflet d’un monde qui allait la quitter.





*Et que j’emporte entre mes dents un flocon des neiges d’antan. Brassens (Le Moyenâgeux) Hommage à François Villon