À Paris il y a
Un quai aux fleurs un marché aux oiseaux
Une foire à la ferraille une rue du Congo
Une place Pigalle une gare Saint Lazare
Un musée du Louvre une rue Vaugirard
Un champ de Mars une rue de l’Échaudé
Une place Saint Michel une rue du Bac
Une statue de Montaigne mais pas de Bachelard
Un jardin des Plantes un boulevard Bourdon
où se rencontrent Bouvard et Pécuchet
Un quai de Passy une place Saint-Sulpice
Un boulevard Malesherbe un quai de la Mégisserie
et une place Saint Germain des Près
après laquelle il n’y a plus d’après
Tag Archives: Paris
FAIRE ROMAN
Les histoires n’arrivent qu’à ceux qui sont capables de les raconter a dit je ne sais plus qui
Un jour peut être quand j’en aurai fini avec mes exercices poétiques je ferai du roman
avec plein de drames et de rebondissements
J’enfermerai mes personnages dans un labyrinthe d’incertitudes
à Paris les années paires
à New York les impaires
Ce sera un roman qui n’en finit pas comme ce commencement écrit de bonne foi à la mi-juin de cet an 2024
(Un roman dans lequel cependant réflexion faite j’hésiterai à me lancer car dixit ceux que l’on nomme les écrivain.e.s croire au pouvoir des livres de fiction submerge tout le reste et en comparaison notre propre vie se rapetisse au point à la fin du parcours de tendre vers zéro)
JJ Dorio
Martigues 15 juin 2024
UNE PROSE À L’EAU DE ROSE
Prose de nuit à Paris sous un couvre-lit pour atténuer la fraîcheur à mon goût d’une pièce louée à Airbnb Mais c’est excellent pour me sortir de la zone de confort de ma maison méditerranéenne
J’ai descendu la rue du Temple passé devant le majH musée d’Art et d’Histoire du judaïsme que j’irai visiter demain devant l’Hôtel de ville puis la cathédrale en reconstruction avec le nom des métiers impliqués inscrits sur de grands panneaux (charpentiers forgerons chaufourniers verriers carriers bûcherons cordiers menuisiers charretiers cloutiers couvreurs jusqu’aux « pêcheurs de sable ») tous ceux en train de relever la Grande Brûlée
Après un tour dans le Quartier où un dernier bouquiniste fermait sa boîte passant rue Saint Séverin devant le fantôme de la librairie mythique la Joie de Lire je me suis réfugié au bar du Départ autre nom fantôme de l’époque d’Apollinaire et consort pour y consommer une soupe à l’oignon gratinée me rappelant celles de la rue Bayard à Toulouse O Toulouse quand nous étions étudiants poil au dents
Ça fait ronron tout ça à l’eau de rose et de violettes des maraîchers de Lalande qui fournissaient les vendeurs place du Capitole ou devant Saint Sernin s’illuminant le soir d’une fleur de corail que le soleil arrose…
Paris 11 janvier 2024
UNE NOUVELLE QUI RESSEMBLE À UN DISQUE RAYÉ
Pour Sophie et pour Jean-Louis,
Il faut nager juste ce qu’il faut afin de s’abstenir d’essayer de sauver autrui. Il faut écrire juste ce qu’il faut afin de s’abstenir de vouloir être lu à tout prix. Il faut lire un roman juste ce qu’il faut afin de s’abstenir de se prendre pour son auteur (Enrique Vila-Matas) qui se prend dans ce premier essai romanesque Paris no se acaba nunca (Paris ne finit jamais) pour Papa Hemingway et son célèbre Paris est une fête.
« Tu ressembles à un disque rayé » dit la maman peu amène à son fiston au téléphone, elle à Barcelone, lui à Paris. « Paris est rayé », aurait écrit dans une lettre Kafka. Vila-Matas fait une liste de raies : le toit de verre situé au Grand Palais, les grilles des balcons, la Tour Eiffel qui se compose de traits, les petites chaises que l’on voit en plein air et les petites tables de café dont les jambes sont (encore) des traits.
Tu ressembles au lecteur qui lut tous les premiers livres de poche qui parurent et que tu te procurais au sous-sol du drugstore de Saint Germain : Kœnismark de Pierre Benoît, Les clés du royaume de A.J. Cronin, Vol de nuit de Saint-Ex (comme nous l’appelions), Ambre (le prénom de ta petite fille, soi dit en passant) de Kathlen Winsor.
Couchant ses souvenirs sur le papier, tu espères qu’à l’avenir ils auront disparu dans la poche trouée de la postérité. Juste ce qu’il faut afin de s’abstenir d’essayer de devenir un romancier.
On espère parfois l’avenir sans souvenirs Ne plus rien voir des tours d’ivoire Sœur Anne qu’avez-vous à signaler ?
Jean-Louis Rambour Y trouver la fièvre Éditions L’Herbe qui tremble
Martigues 10 décembre 2023
ALORS QU’EST-CE QUE T’AS ÉCRIT CETTE NUIT 2 L’AMOUR DES BISTROS
2
L’AMOUR DES BISTROS
-Alors qu’est-ce que t’as écrit cette nuit ? – Ah ! je me suis perdu dans le labyrinthe des cafés de Paris. – Des bistrots, veux-tu dire ? -Oui, et même des bistros. J’ai longtemps écrit sur leur table. -Et tu ne t’es pas fait jeter ? -Non, pas sur la table même (encore que), mais sur un carnet posé sur la table d’un troquet, à côté d’un demi ou d’un café. D’ailleurs mes carnets s’appelaient « Bistrotable ». -Et tu ne peux pas m’en donner un échantillon ? – Pour ça, faudra que je cherche dans mon cafouch. – C’est quoi ça ? – Le cafouchi, un mot de Marseillais et donc de Martégal (c’est mon cas), c’est l’endroit sous l’escalier ou ailleurs, où tout s’entasse, pêle-mêle. – Mais je suis sûre que tu en as gardé une version sur ton ordi. – Promis je chercherai demain, mais vu ton impatience je vais improviser, style I remember. – Je suis toute ouïe. -Je me souviens de À la bonne bière, rue du faubourg du Temple, à côté de la piole de mon pote Juan qui m’hébergeait. Y avait un type qui passait chaque soir en promenant un rat au bout d’une ficelle. Je me souviens du Cluny sur le Boulmich. C’est là que j’ai lu la « Théorie de la démarche » de Balzac. Il décrivait les gens qui passaient devant lui et les classait dans des catégories qu’il inventait au fur et à mesure, comme Arlequins, Marins, Militaires, Cocottes, Napoléons, et tutti quanti. Je me souviens du Zimmer, place du Chatelet, où j’imaginais Proust dansant sur les tables. Et, bien sûr, je me souviens du Mabillon, où j’imitais Perec, nommant (il s’enregistrait et on peut entendre toujours sa voix sur un postcast de France cul.) les autobus, le 86, le 87, les ouatures et camionnettes portant parfois des réclames « Les cocotiers sont arrivés ! » et même parfois les passants avec ou sans parapluie. Je me souviens …-Super. J’attends avec curiosité que tu me sortes tes vieux rossignols nichés quelque part sur ton disque dur. -Oh tu sais, je crois qu’avec le temps, ce sont devenues de vieilles chouettes.