KRAFTPAPPER OU LA FORCE DU PAPIER

UNION DES CONTRAIRES

Union des contraires

Je parle en faisant mes caractères muets

Je parle dans ma tête comme d’autres parlent au papier

Le mien d’ailleurs comme tu peux le constater n’est pas blanc

C’est du kraftpapper : littéralement, mot suédois, « force du papier ».

Le mien est cependant force tranquille, un doux bruit, traçant comme un esquif.

C’EST UNE AUTRE PAGE

C’est une autre page

Bien posé sur ton oreiller, au lieu de tourner, retourner,

cherchant dans le noir le sommeil,

Tu bénéficies des lueurs de ta lampe

Tu essaies en premier lieu de tenir ferme le stylo des signes inédits

que personne d’autre que toi n’est capable de tracer

(Ce n’est qu’un constat amusé, tu ne t’appelles pas Flaubert qui prétendait

que pour faire de la Littérature comme lui, il fallait « se monter le bourrichon »)

Des traces et un élan que tu prolonges par un festival de mots

Guirlande de tes rêves provoqués

BON JOUR BON SOIR BONNE NUIT

Bon jour Bon soir Bonne nuit

Je te souhaite bon jour de fête

Une école grecque encourageait ses disciples

à faire fête pour chaque jour vécu

Même dans la perte et la défaite

Te deseo buena tarde

Ces soirs de rambla ou de paseo

où avec mon Andalouse

nous promenions main dans la main

dans la rumeur bienfaisante

du farniente

Et pour la nuit déjà

Tu l’entends la redoute

Mais non Vois tes petits actes créatifs

ont desserré ses nœuds

Elle scintille

« Nuit étoilée »

23/06/2020

2h22-2h45

UN DICTIONNAIRE À PART MOI

	

LE CŒUR JOYEUX DANS LA DÉFAITE COMME DANS LA FÊTE





Le cœur joyeux dans la défaite

Comme dans la fête





Souvent, nos maîtres nous enseignent à serrer les poings pour gagner,

rarement ils nous apprennent à perdre,

ou plutôt à rendre à l’universel ce qui lui appartient,

à l’image d’Épictète, le cœur joyeux dans la défaite comme dans la fête.

Chantal Jacquet





Dans le château de Barbe Bleu

Sous les pas du cheval d’Henri IV

Sur le champ de bataille de Waterloo

Au chemin des dames rouge de nos morts

Dans le fond d’un Sahara brumeux





À la Bastille

Sur l’île des Rêveries

Sur le chemin des indiens morts

Sur la promenade des Anglais

Sur les quais de Palos de la Frontera





Au cœur des mots

germes de vie

aube croissante

Sur l’écume des jours

et les soirs de demi-brume à Londres





Sous le mur de Berlin

Avec Bach et Mstislav Rostropovitch

Dans l’enfer de Dante

et à Dachau

chez l’ogre des Petits Poucets





Chez les dieux de l’Olympe

Sur la bateau de Panurge

et dans l’Isle Sonnante

En poussant la roue à aubes

des Grands Matinaux





Au cœur des Utopies sanglantes du XX° siècle

À la Kolyma

avec le poète Osip Mandelstam





Dans l’antre du Cyclope

Les prisons de François Villon

de Clément Marot

et de Théophile

Dans l’Atelier de Picasso

sueños y mentiras de Franco





Dans les livres de haute graisse

Et sur les murs fantastiques de la casa del Sordo





Sur l’herbe de tous les déjeuners

le flot du sourcelet

l’ache et le serpolet





Sur les parois du Mas d’Azil

et les empreintes de Lascaux

Dans le hamac de palmes tressées

par les indiens Panaré





Sur la barque des morts de Pharaon

Sur l’Arize et sur l’Achéron

Sur un accord de piano

de Thélonius Monk





À l’asile des fous de Rodez

Sur l’aviron de Cambridge

et sous le pont des mathématiciens

Sur les toits de Manosque

et ceux du cimetière marin





Sur le maître du silence

et le rire inextinguible des enfants

Sur l’énergie du vide

et la bonne imagination

Sur les fleurs rouies

et les fêtes de Fraternité





Dans un champ de l’Ariège

où passent de toute éternité

Mascaret et Mulet

Tirant la charrue d’or

Des vers et des boustrophédons

Pour la plus grande joie

Des oiseaux sautillant

Au Paradis des Éphémères