IL PLEUT DOUCEMENT SUR L’UKRAINE

A tous ceux, (à toutes celles), qui, de tout temps, sous un régime totalitaire,
Ont cherché refuge dans les livres, l’art, la beauté, 
Au péril de leur vie.

Ossip Mandelstam (1891-1938)
Mort en déportation pour avoir écrit 
Épigramme contre Staline
Il pleut doucement dans ma tête
Romances sans paroles comme écrivait Verlaine
Des mots pleins de stupeur
Pour apaiser ce cœur qui s’écœure
Devant l’invasion de l’Ukraine

Il pleut doucement sur ma page
Comme il pleure sur cette ville
Qui aspirait à vivre comme nous
À Paris Berlin ou à Vienne
Et qu’un autocrate sanguinaire
À la mode de Staline et d’Hitler
Veut rayer de l’Histoire

Il pleut doucement sur ma nuit
Sur la fureur et le bruit
De cette tragédie

26/02/2022





FEUILLETS ÉCRITS SOUS LA FEUILLÉE





J’ai tant aimé les Arts
Que je suis artilleur

Apollinaire


Je découvre cette nuit (16 janvier 2022) les photos reproduisant les 16 feuillets manuscrits (14x9 cm), sortis de la plume de l’artiste artilleur Apollinaire, assis dans la tranchée entre deux salves de tirs. J’écris accroupi, sur mon genou…sur le sol rempli de vermine.

Du coton dans les oreilles, tel est le titre parodique imaginé 1, souligné de deux traits qui simulent des vagues. 
De même que le nom de Guillaume Apollinaire qui continua à remplir comme un forcené ses petites feuilles de vers rimés avec aussi quelques calligrammes, ce mot-valise qu’il inventa au temps où la mandoline ignorait le bruit du canon

1 Ne mettez plus de coton dans vos oreilles Ça ne vaut plus la peine
 

Quelle merde ! C’est le cas de le dire
Sortie des longs boyaux où tu chemines
Dans ta tranchée en première ligne
Allô la truie Allô latrines
Que l’on appelle ici des « feuillées »1

Je lis et relis sans cesse tes seize feuillets
Que tu écrivis à la plume
Je les dévore assis dans mon plume
Cent trois ans après

Après la balle qui froisse le silence
de ta cagnat 
Que tu as baptisé
Par je ne sais quelle percussion mentale
LES CÉNOBITES TRANQUILLES

Toi sentinelle au long regard
Fondue dans l’œil des Chartreux
Quand Dieu le grand Toto
Les démange


1 Ne prenez pas les feuillées pour autre chose qu’elles ne sont, comme faisaient pas mal d’auteurs avant la guerre.



MOTS PRÉSENTS EN CE BOUQUET





Je dis : une fleur ! et hors de l’oubli où ma voix relègue aucune couleur, en tant que quelque chose d’autre que les calices sus, musicalement se lève, idée même et suave, l’absente de tous bouquets.

Mallarmé

Mot c’est presque mort
Air c’est un peu art
Un fourbis to be or not to be

Mort c’est presque mare
Art c’est un peu Pars !
C’est Dora Maar
La femme qui pleure
Pour ce cochon de Picasso

Moraine c’est presque ma reine
Mohair c’est un peu Hair
La scène où sur une bande-son rock and roll 
Faites l’amour pas la guerre

La guerre c’est une connerie
Rappelle-toi Barbara
Tout le barda tout le fourbis

To be or not to be

PICASSO RUIZ LE ROSSIGNOL





Maintenant on est dans Picasso

Nez tordu bouche cousue statue nègre

Femme nue de dos assise au bras levé

Un bras d’honneur à la peinture académique





Picasso le nom de sa mère

-Qui signa un temps Ruiz

ruiseñor rossignol de mes amours-

nous assied dans une chaise cannée

par des guitares sèches

et des journaux d’avant la guerre

la boucherie des bœufs saignant

pendus au clou par Soutine





Papiers collés et déchirés

Ça fait un bruit sec

Mais les enfants qu’on amène au musée

en bande désorganisée

Ça les fait rire ça les fait se marrer





On n’est pas sérieux quand on a sept ans

Devant les coups de pinceau de l’ami Picasso





Picasso sur la plage 07/03/2021
le même dessin mais pas à la même heure
dessin au roseau de Camarde

MON PETIT-FILS ET LE CORONA





Mon petit-fils veut s’amuser

JJ i m’dit on cache-cache ?

On fait bagarre ? On joue au foute ?

Mon petit-fils veut que l’on fasse

Combat du rire nez à nez





Mais je peux pas papy est vieux

I veut pas attraper l’corona





Alors on joue par écrans interposés

On fait les pitres

On imite les singes et les oiseaux

Chant de la pie Roupie de sansonnet





À la guerre comme à la guerre

Mais on se languit que revienne la paix