Je vais voir ailleurs si j’y suis C’est le parcours obligé de tout poème Je vais voir le champ de marguerites Où repose Suzanne ma mère Je vais suivre le sillon que mon père Destine au blé au maïs à la luzerne Il est tard c’est la nuit noire C’est ainsi que j’écris le mieux L’œil distingue parmi mes notes orphelines Des lettres dont vous n’avez aucune idée Mais si vous les lisez étonné.e.s Ailleurs sur le pas de votre porte Ou à votre fenêtre éclairée Ne me laissez pas sans nouvelles
Lettres brèves Sous forme de souvenirs Ornés de quatre brins de lilas Lettre à l’enfant Qui disputait trois grains de riz Aux vautours des ordures Sur les hauteurs et puanteurs de Caracas Lettre à l’ivrogne Qui titubait sur la place Mouffetard Dans le reflux post-soixante-huitard La bouche pleine de poèmes Sans lecteurs et sans but Lettre à l’actrice Que j’accompagnais à la guitare Chantant sur scène Les intermèdes que j’avais mis en musique de Grand peur et misère du III° Reich La dernière missive Est pour les inconnu.e.s Qui perpétuent le monologue pluriel : nous sommes entretissés…
Frayer
encor avec les Romains lettrés, écrivant poésies, – avant J.C – « Ainsi rien ne périt malgré les
apparences Puisque tout se transforme Et que toute naissance en ce monde a
besoin du secours de la mort »
« Petit moineau,
délices de Lesbie »,
becquetant les doigts de la Belle.
Jouer
encor de nos chants alternés, avec les Dieux enfuis, comme pour prolonger ces
impossibles souhaits : « Essayons
par magie de guérir, de séduire ».
Avant que ne nous happe, notre lyre
brisée, la gueule de ce monstre, qu’un poète, déjà, nomma la bouche d’ombre.
avec Lucrèce, Catulle, Virgile, Properce.
manuscrit premier jet fond : aplats d’acrylique, « hypnographies » encre de Chine Dorio
Qui vive ? Des amours et des morts En sourdine Ou à coups de trompettes De l’Apocalypse Qui vive ? L’autre en soi-même Cette fable que l’on tisse Sur de petits cartons intimes Qui vive ? Toi Dont le deuil Est impossible Qui vive ? Nos ami.e.s Et leur sollicitude Lettres échangées Dernières nouvelles Qui vive ? Musique de chambre Des solitaires Solidaires De nos vulnérabilités Qui vive ? Morceaux en forme de poèmes Dans la vague d’Hokusai Tu entends la vigie : La nuit sera belle !