J’ÉCRIS DE NE PAS ÉCRIRE

Escrever de não escrever 
selon ce que me dicte le fantôme de Pessoa
J’écris de ne pas écrire ce que d’autres ont déjà écrit
J’écris pour que d’autres écrivent sur mon texte palimpseste,
pâles insectes trempés dans l’encrier
et qui dans un dernier sursaut font des tortillons sur la page
J’écris cette littérature à soi semblable au balancement de l’abanico,
figure de style évoquant l’éventail
J’écris en éventant et réfutant les livres noirs qui vont s’ailleurisant
J’écris ici et maintenant

Martigues mardi 5 mars 2024

PALIMPSESTE

PALIMPSESTE « Écrire sur soi peut-être aussi une façon de s’effacer, comme un palimpseste sans transparence. » Gérard Genette « Apostille » Rien de plus imparfait que le texte « à venir ». Il naît de mon bric-à-brac personnel, à nul autre pareil :  -ceci dit sans la moindre forfanterie – livres qui se tournent le dos, émissions de radio que l’on peut réécouter, mémoire trouée et têtue et ce stylo noir qui court la poste des gens isolés et des fugitifs des nuits transfigurées. Pensée sauvage et Bricollages – que j’écris depuis un texte patchwork de 1970 avec deux ailes. Comme si chaque nuit, vous réveillant d’un premier somme, vous vous confiiez à la main qui écrit, et qui va, chemin faisant, vous révéler ce à quoi, sans cet outil fragile et précieux, vous n’auriez jamais pensé.

ESCREVER DE NÃO ESCREVER

J’ÉCRIS SUR UNE CARTE SAUMON escrever de não escrever selon ce que me dicte le fantôme de Pessoa J’écris de ne pas écrire ce que d’autres ont déjà écrit J’écris pour que d’autres écrivent sur mon texte palimpseste, pâles insectes trempés dans l’encrier et qui dans un dernier sursaut font des tortillons sur la page J’écris cette littérature à soi semblable au balancement de l’abanico, figure de style évoquant l’éventail J’écris en éventant et réfutant les livres noirs qui vont s’ailleurisant J’écris ici et maintenant martigues samedi 11 février 2023

INCIPITS SECONDE TRESSE

LE PLAISIR DE LIRE UN PATCHWORK

Abecquer ses oiseaux de nuit, avec ces quelques mots rares aux sens le plus souvent inconnu. Il arriva chez nous un dimanche de 189…Colin terminait sa toilette.  « Je l’ai interrogé sur cette époque, où nous étions encore si jeunes, ingénus, enthousiastes, stupides, naïfs. Il en est resté quelque chose, sauf la jeunesse – m’a-t-il répondu. » C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar. Le Rêve est une seconde vie. Vous avez mis le pied gauche sur la rainure de cuivre, et de votre épaule droite vous essayez en vain de pousser un peu plus le panneau coulissant.  Qui suis-je ? Si par exception je m’en rapportais à un adage : en effet pourquoi tout ne reviendrait-il pas à savoir qui je « hante » ?  Comme le temps s’y prêtait à merveille et qu’on était samedi, journée que sa fonction lui permettait de chômer, Anthime est parti faire un tour à vélo après avoir déjeuné.  Anton Voyl n’arrivait pas à dormir. Il alluma. Son Jaz marquait minuit vingt.  Pour être heureux, ça j’étais heureux. Je vous garantis que ça n’a rien de folichon ce patelin d’Alliance, dans le Nébraska ; surtout quand je vous aurai dit que je me faisais tellement tartir dans ce bled qu’il commençait à me pousser du sainfoin dans la cafetière.  Nel mezzo del cammin di nostra vita Mi ritrovai per una selva oscure

QUI A ÉCRIT ET DANS QUEL LIVRE ?

13 Abecquer ses oiseaux de nuit, avec ces quelques mots rares aux sens le plus souvent inconnu. 14 Il arriva chez nous un dimanche de 189…15 Colin terminait sa toilette. 16 « Je l’ai interrogé sur cette époque, où nous étions encore si jeunes, ingénus, enthousiastes, stupides, naïfs. Il en est resté quelque chose, sauf la jeunesse – m’a-t-il répondu. » 17 C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar. 18 Le Rêve est une seconde vie. 19 Vous avez mis le pied gauche sur la rainure de cuivre, et de votre épaule droite vous essayez en vain de pousser un peu plus le panneau coulissant. 20 Qui suis-je ? Si par exception je m’en rapportais à un adage : en effet pourquoi tout ne reviendrait-il pas à savoir qui je « hante » ? 21 Comme le temps s’y prêtait à merveille et qu’on était samedi, journée que sa fonction lui permettait de chômer, Anthime est parti faire un tour à vélo après avoir déjeuné. 22 Anton Voyl n’arrivait pas à dormir. Il alluma. Son Jaz marquait minuit vingt. 23 Pour être heureux, ça j’étais heureux. Je vous garantis que ça n’a rien de folichon ce patelin d’Alliance, dans le Nébraska ; surtout quand je vous aurai dit que je me faisais tellement tartir dans ce bled qu’il commençait à me pousser du sainfoin dans la cafetière. 24 Nel mezzo del cammin di nostra vita Mi ritrovai per una selva oscure

INDICATIONS (à lire en un second temps)

13 De l’auteur du blog, son livre « abécédaire ». 14 Un roman culte dont l’auteur mort après sa parution à la guerre infâme de 14 ne put jouir. 15 « L’histoire est entièrement vraie puisque je l’ai imaginée d’un bout à l’autre » proclamait l’avant-propos de cet auteur qui aimait les jolies filles, la musique de La Nouvelle-Orléans et Duke Elligton. 16 Traduit de l’italien Composé de 9 histoires, « avant de trouver vie dans ce livre, elles ont existé dans la réalité. Je me suis limité à les écouter et à les raconter à ma façon. » avoue l’auteur, qui a choisi comme titre général un fragment présocratique : En suivant l’ombre, le temps… 17 Tous les grands égarés de la Littérature connaissent Mégara. 18 « Je n’ai pu percer sans frémir ces portes d’ivoire ou de corne qui nous séparent du monde invisible ». « Une dame que j’avais aimée longtemps et que j’appellerai du nom d’A… était perdue pour moi ». 19 À l’exception de rares passages ce roman qui fit date est écrit à la deuxième personne du pluriel : c’est vous-même lecteur que le romancier semble mettre poliment en cause…20 Par un parti-pris « anti-littéraire » l’auteur élimine toute description par l’abondance d’une illustration photographique. Mais là n’est pas l’essentiel, l’essentiel est la rencontre de l’auteur avec « une jeune femme très pauvrement vêtue, si frêle qu’elle se pose à peine en marchant, curieusement fardée, le bord des yeux si noir pour une blonde. 21 Le titre du roman est un nombre qui évoque le début d’un événement historique : « l’Histoire avec sa grande H. » 22 Anton Voyl aurait pu s’appeler Antony Voilo, mais pas Antoine Voinel. 23 Marcel Duhamel, l’ami des surréalistes, traduit le premier livre de la « Série Noire » (le titre lui aurait été suggéré par Prévert). 24 Inutile de traduire. L’auteur, « au milieu du chemin de sa vie », en écrivant ainsi, invente dit-on l’italien. (Il aurait hésité avec l’écriture en Provençal).

LIVRES

13 Un dictionnaire à part moi Jean Jacques Dorio 14 Le grand Meaulnes  Alain Fournier 15 L’écume des jours Boris Vian 16 Le temps vieillit vite Antonio Tabucchi 17 Salammbô Gustave Flaubert 18 Aurélia Nerval 19 La Modification Michel Butor 20 Nadja André Breton 21 14 Jean Echenoz 22 La disparition Georges Perec 23 La môme vert de gris Peter Cheyney (traduction Marcel Duhamel) 24 La divine comédie L’Enfer Dante

médaille d’or pour les recherches et les réponses :

Maria-Dolores Cano

http://reveusedemots.blogspot.com/

DANS LE SOLEIL DE RESSEMBLANCE

Il voit les soleils se coucher
dans le soleil de ressemblance
                René Nelli
                   
Je mange à petit feu le dictionnaire rare
Les lignes manuscrites de quatre en quatre vers
Impeccables pour le rythme le compte des « e » muets
                       
Le dictionnaire rare des fleurs en leur courtil
Du torrent désentravé des prisons abracadabrantes*
            
Sous le lyrisme affirmé les cycles naturels
Les images la respiration verbale
L’amour métaphysique se heurte au néant
                    
On voudrait l’oublier s’interdire ces grands noms
Depuis longtemps brisés par les modes éditoriales
                   
Mais maladroitement nous sommes entraînés
La main court sur la feuille 
Grattant le palimpseste insomniaque
Qui nous ressemble
                          
 
*René Nelli (La vie que s’interdit la vie) 
Collections manuscrits Encres Vives 1969

la main court sur la feuille grattant le palimpseste insomniaque Dorio : Miroir de Miró