VIVRE DANS LES LIVRES

Vivre dans les livres

D’Emma Bovary (née Rouault)

Et d’Élise (ou la vraie vie)

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Vivre dans les livres

Des classiques Garnier

Et des romans de gare

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Vivre dans les livres

De Sylvie et de Jérôme

Dans l’univers des Choses

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Vivre dans les livres

Des bibliothèques liquides

Qui entourent

l’enfant de la haute mer

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Vivre dans les livres

Ivres de Cripure

Et des Pieds Nickelés

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Vivre dans le livre

De l’homme des Essais

Sujet merveilleusement

Vain divers et ondoyant

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Vivre dans les pages

Des Calligrammes

Cœur Couronne Miroir

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Vivre et mourir

Des Promesses de l’aube

Aux Mémoires d’outre-tombe

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De nos fortunes et infortunes

Faire le livre du Conatus

Persévérer joyeux et libre

Par ces paroles sur le papier

Chargées d’amour ou tues

UNE DIMENSION INCONNUE DU VERBE

Je voudrais et j’essaie toujours de circuler en aveugle éveillé à travers les miroirs du monde qui m’entoure pour faire circuler cette dimension inconnue du verbe : L’écriture m’a toujours ravi.e parce qu’elle me permet de formuler ce à quoi, si j’étais resté.e à bâiller aux corneilles, je n’aurais jamais pensé

Je comprends que beaucoup d’écrivains en herbe ou à la tête chenue abandonnent la partie

Ils n’ont pas trouvé leur principe dit l’un

Ils n’adhèrent pas totalement à ce qu’ils font se laissant happer par la rumeur du monde dit l’autre

Ils écrivent pour être lus dit un troisième qui ajoute que cette éjaculation collective de l’écriture tourne à l’apocalypse

Un poète du XVIe se qualifiait avec humour de banny de liesse

Être unique à ses yeux dans son verbe son identité imaginative est la seule clé qui vaille pour continuer

Unique c’est à dire singulier, seul à subir  les coups durs de la vie ou à jouir des épiphanies du quotidien

Unique c’est à dire reconnaissant aux chercheurs inassouvis, artisans de la langue compte tenu des circonstances

Ce patchwork par exemple s’est passé de motifs

C’est celui d’un voyageur dans une cité inconnue qui croyait faire un voyage plus ou moins préparé

Mais c’est le voyage avec ses aléas qui va me faire voyageur ailé ou me défaire éternel insatisfait

C’est ainsi que je me comprends et suis stimulé par la conclusion du livre d’Albert Camus revisitant le mythe grec  : Il faut imaginer Sisyphe heureux

Copenhague 19 mai 2025

DICTIONNAIRE MA BABEL





Dictionnaire ma Babel
Ponge tournait et retournait
en tout sens
son Littré
Moi c'est Robert
alias Alain Rey

Dictionnaire agité
Telle l'argile du potier
Qu'il nous faut bien malaxer
Afin de la désaérer

Dictionnaire me voilà
Écumant tes signes émigrants
Épuçant une page manuscrite
de l'oncle Gustave (Flaubert)
à l'état brut, 
Écrite, disait-il, comme un ornement de marquèterie

Dictionnaire mon algèbre
Réduisant les fractures de la langue
Mon dico rebouteux, 
Boute en train qui me traîne,
me trouble et m'incarne,
Me fait subir, article après article,
ses coups de marteau spirituel

Dictionnaire labyrinthe
Impasses et fausses pistes
Chemins qui bifurquent
Où l'on exerce ses yeux fertiles
Tâchant toujours d'y persévérer




TROIS POÈMES POUR PERSÉVÉRER





3 poèmes écrits cette nuit (29 octobre2020)

après l’annonce du confinement général,

en temps de détresse.





Pandémie : la passé bat avec plus de force que jamais.





« il suffit que viennent à manquer les étais ou les soutiens concrets et relationnels de notre autonomie

pour que l’on se rende compte que cette vulnérabilité fondamentale, perdure la vie durant. »

Marie Garrau





1

La folle de Chaillot je ne sais plus qui c’est

Tayaut tayaut tayaut

Le roi de la pampa ça je connais bien mieux

Queneau Queneau Queneau

Fabliaux sur les parvis Poèmes in-folio

Mon dictionnaire de rimes ne connaît pas Dorio

Yoyo yoyo yoyo





2

Est-ce bien moi qui fait le zouave ?

Ou Reverdy dans la détresse ?

J’entends dans son gueuloir Gustave

Verlaine compose Sagesse

Est-ce le bon vieux temps douceâtre ?

Ou Breton au père Lachaise ?

Je cherche l’or du temps

A t-il fait inscrire sur sa pierre





Oui c’est bien moi qui fit ces tresses





3

Les pages de mes livres

Ont une vie difficile

Il y tombe des larmes

Aussi bien que des rires

Les pages de mes livres

Blanchissent dans la nuit

Putains se refont une virginité

J’aimerais que Villon les lise

Clément Marot et Jean Tardieu

Ce sont poètes qui m’inspirent

Les pages de mes livres m’obligent

à persévérer





Martigues nuit du 29 octobre 2020

IL FAUT PERSÉVÉRER





il faut persévérer

il faut percer les murailles de l’Éthique de Bénédict Spinoza

il faut scandaliser

et polir ses lentilles ou ses vers en silence

 quand tous les dogmatismes qui ont pignon sur rue

vous excommunient

il faut se libérer

rire de ses bêtises et jouir de ses désirs réalisés de liberté

il faut se cacher

du petit doigt des imbéciles des envieux des intolérants

des rois-soleils-de-pacotille des fanatiques et des joueurs de tambour

il faut disparaître

sans laisser de traces qui seraient des réponses faisant long feu

il faut il faut

relire les nuits blanches

de Robert Desnos

en défiant la mort

sa faux

et ses balances