Plupart du temps si je laisse aller la main à plume et tout son tralala je me répète c’est pas la peine faut donc changer casser le rythme et batailler les yeux fermés improviser dans sa caboche faire jouer ses trous d’air donner feu vert à l’acteur qui libéré de l’auteur va faire valser le théâtre des paroles
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JE RÊVE DE L’OURS DE TCHÉKHOV
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Pagaille de rêves Rêves en pagaille Je suis dans mon hamac me balançant me balanceo me balanceo J’avise la tortue du jardin qui trotte de ce fameux train de sénateur imaginé par le fabuliste Mais cette fois une saute de mistral soudaine la renverse la retourne comme une crêpe Comme je dois aller conduire M. à la crèche je me réveille trois minutes avant que la sonnerie du smartphone ne m’avertisse J’étais dans mon rêve entouré d’affiches de cinéma puis dans une salle pleine comme un œuf je m’approche de l’écran où tout devant il y a une palanquée de personnes arborant leur signe du Parti Communiste Français Cours cours camarade le cuirassé Potemkine est derrière toi Je me sens un peu perdu et interdit dans cette atmosphère de militants quand une ancienne partenaire de Mai 68 viens vers moi -Viens me dit-elle on est attendu pour répéter L’Ours de Tchékhov (et en effet il y a quarante nous l’avons joué, ainsi que Grand peur et misère du III° Reich, dans les théâtres à l’italienne et les usines occupées par les camarades ouvriers)…
NUITS INVENTIVES

IL EST DES NUITS PLUS INVENTIVES QUE D’AUTRES Allez savoir pourquoi C’est comme des voix intérieures qui prennent l’accent de tel ou tel comédien (cette nuit celle de Roger Blin qui dialogue avec Delphine Seyrig, la comédienne) Il est des nuits où mon encre à micro-pigments résistant à l’eau court la page dorée avec le stylo pointe fine qui a la qualité de l’archive, C’est comme une fugue radiophonique enregistrée le 5 mai 1966 et diffusée trois jours après Tu seras seul au monde avec ta voix Il n’y aura au monde d’autre voix que la tienne * C’est comme la voix que je lançais au printemps 1978 du haut du théâtre d’Épidaure La voix qui descendait vers toi mon amoureuse qui me faisait de grands gestes au centre de la scène Toi dont le cœur n’est plus que cendres et qui aurait tant aimé partager le secret de cette nuit trop inventive * Voix de Delphine Seyrig jouant Ada dans Cendres de Samuel Beckett
UNE PROSE SUR LE DÉPART
Pas un jour sans poème que je poste la nuit
Mais cette fois c’est une prose sur le départ.
C’est une prose sur le départ et son enfant hésite,
il voudrait bien la remplacer par un saxophone
ou par un coup de théâtre, comme au cinéma.
C’est une prose sur les marges d’un exemplaire abandonné
aux flots des Voix-Autres, à contre-courant des livres primés.
C’est une prose de l’U topie, de l’A topos, du papillon
qui rêve sur les fleurs de l’amandier, de la Voie
qui ne doit pas se dire sous peine de disparition.
C’est une prose de chenapan, de mots taillés dans les haillons
d’argent et sotz folha d’albespi :« sous le feuillage de l’aubépine. »
C’est une prose à petits pas, à petits feux, d’un amoureux
sur le papier et dans la voix de l’aurore.
C’est une prose de lèvres rouges et du sang des innocents,
d’une femme brûlée par les rayons d’la mort.
C’est une prose inachevée qui passe et qui prend feu
après beaucoup d’années de miscellanées…
UNE ENCYCLOPÉDIE ÉCLAIRÉE



