ET VOUS COMMENT VOUS DÉBROUILLEZ-VOUS AVEC MAI 68 ?

« Que tu sois environné par le chant d’une lampe ou par la voix de la tempête, par le souffle du soir ou le gémissement de la mer, toujours veille derrière toi une vaste mélodie, tissée de mille voix, où de temps à autre seulement ton solo trouve place. »
Rainer Maria Rilke





Avec Mai 68 je me débrouille comme je peux…

manière de parler sur un sujet des plus embrouillés

et qui risque, si l’on n’y prend garde, un jour de disparaître

Ou bien, encore pis, d’être confondu avec les révoltes culturelles

de Civilisations Autres que celle mise en branle

par les Éblouis de la Sorbonne et les Affichistes des Beauzarts





Avec Mai 68 dont les papiers collés ornèrent les murs symboliques

d’une muraille de Chine serpentant autour du Quartier Latin

Hybridations de signes en rouge et noir qui affolèrent les bêtes à cornes

Cours cours camarade le vieux monde est derrière toi

Et les mandarins et mandarines de Nanterre

C’est la faute à Voltaire C’est la faute à Bendit





Avec Mai 68 le Corps Social tel un géant de Rabelais

envahit le Grand Bazar et se dresse écrivant,

écrivain collectif d’un corpus pulvérisant les vieilles lunes

de l’Odéon du Panthéon de l’Académie des vieillards

du Temps proustien momifié





Avec Mai 68 je me retrouve raturant au stylo bic

les pages de littérature imprimées à Saint Germain d’Après

avec l’éponge qui enlève la poussière du tableau noir

pour le rendre apte à accueillir les paroles

dictées une à une par les participant.e.s

des Comités D’Action, dans une cour d’école,

un coin de rue, la cantine d’une usine occupée…





En ces lieux imprévus où fleurit ce texte collectif,

magnifique, moqueur, moteur d’une voix anonyme,

ouvrant de temps en temps, cette voie individuelle,

où depuis Mai 68, nos solos  trouvent  place…


	

GESTES BARRIÈRE





Gestes barrière Arrière Corona !

Geste du desdichado : se pendre au réverbère.

Geste chimère : ôter ses sandales d’or

et plonger dans l’Etna.

Geste Molière : se parer de son habit de scène

pour sa dernière représentation.

Geste Voltaire : sauver la mémoire de Calas.

Geste en l’air d’un calligraphe

qui mime le vol des oies sauvages.

Geste incongru : aux chiens j’apprends

la Rhétorique.*

Geste tout court : il court il court

le gibier du texte,

que nul chasseur n’attrape,

lançant en vain ses rets

de Sémantique.





*Mathurin Régnier (1573-1613)





25/01/2021

LIRE EN LEVANT LES YEUX





Grâce à mon livre

à la mi-temps de la nuit

j’entre dans « un havre de grâce » :

-un titre à double entrée

de Raymond Queneau-





Et Montaigne

en ses Essais

qui sont ma petite bible portative

fait de « grâces »

qui coulent sous la naïveté

et la simplicité

« une beauté délicate et bien cachée »





Les lecteurs grincheux

qui ne jurent que par « déconstruction »

et négativité »

me prendront pour un Candide attardé





Mais je leur ris au nez

Un balai un balai chassant leurs poussières





Et merci à Voltaire

Raymond la Science

&

Michel de Montaigne

RETIENS BIEN CE QUI T’ÉCHAPPE

 
 
J’ai perdu ma mine  ma petite mine de crayon gris
Aussi ce que tu lis lecteur anonyme ne fut pas écrit
Mais pensé ruminé avec l’impératif de le retenir
   Un pari bébête    un pari de tête :
«Retiens bien ce qui t’échappe».
 
  C’était ton être en lambeaux que tu essayais de reconfigurer
  Avec tes armes et bagages
tes lettres de l’enfance
   Où tu t’imagines toujours bondissant
en jouant au jeu de barres
  à la course au sac  à la marelle
   Avec les mots de Gavroche
et la faute à Voltaire
 
Et c’est maintenant ton être au présent
actif imaginant
posé sur ta chaise en bois blanc
les pieds sur ta table d’écriture
avec pour boucler le tout
deux doigts sur le clavier
 
Et puis mine de rien
Tu te dis que ce que l’exercice imaginait
S’est réalisé