QUENEAU Y YO

QUENEAU ET MOI  

Je reviens à l’enfant que nous fûmes Queneau et moi

Lui naquit au Havre un vingt-et-un février en mil neuf cent et trois (signe astrologique : Poisson)

Moi à La Bastide de Besplas (Ariège) dans la chambre de mes géniteurs le vingte- quatre mars mil neuf cent quarante et cinq (signe astro : Bélier)

Ses père et mère étaient merciers

Les miens petits paysans

Petits car s’ils possédaient leurs terres c’étaient quelques arpents

On le mit en nourrice qui lui tendit ses seins

Ils allèrent acheter une vache aux mamelles abondantes mais qui hélas me provoqua forces chiasses

Son père débitait des toises de soieries des boutons de l’extra-fort et des rubaneries

Le mien labourait ses champs du terre-fort semant orge (pommelle) et blé, plantant maïs, soignant sa vigne (de madame, c’était son nom) élevant quelques vaches qui procuraient du lait que les villageois venaient quérir le soir avec leurs pots

C’est ma mère qui à la louche les servait

Elle s’occupait aussi des volailles et des couvées

La mère de Queneau (sa « pauvre mère » dit-il allez savoir pourquoi ?) avait une âme musicienne et jouait du piano

Il était fils unique

Comme bibi

Et comme moi encore il alla à l’école apprendre Bâtons Chiffres et Lettres

Dans un livre qui a pour titre les quatre mots précédents Queneau se soumet à un entretien à la question « Comment avez-vous commencé à écrire » il répond : « J’ai commencé vers cinq ans je crois et il en résulta des bâtons et des pâtés…et puis, comme un certain nombre d’adulte, j’ai persévéré. Il m’a fallu de la persévérance, parce que quand on a publié mon premier poème dans une revue, je devais avoir dans les trente-cinq ans. »

Moi j’en avais trente et ça s’appelait Papiers hygiéniques il y avait huit prosèmes et l’un faisait état (je m’autocite) d’ « une petite voix de flammes et d’allumettes rouges léchant le cul des mots »  

Queneau vécut 73 ans immensément connu inspirateur créateur avec le mathématicien Le Lionnais de l’Oulipo  -« Est-ce que vous avez peur comme tout le monde ? » lui demandait le même interviouveur : L’avenir n’existe pas pour moi Je suis très imprévoyant, répondait l’impétrant

J’écris ce texte (icule) à 78 berges et nul (ou presque) ne connaît mes talents mais je n’y pense pas je poursuis l’écriture de mes proses et poèmes alternatifs ligne après ligne jusqu’à L’Instant fatal

LAISSANT COURIR SANS FIN MON IMAGINATION

Laissant sans fin courir son imagination
Parfois l’assaillait la vision d’un idiot

(deux lipogrammes en e vous aviez remarqué)

Un idiot momo à Nyouyork au Moma
Un Dorio loriot pratiquant l’art brut-plaisir
d’Artaud Tarahumaras hallucinations
Jusqu’au tournis d’Achab poursuivant Moby Dick
Qui soufflait sur l’horizon lapis-lazzuli

Bijoux d’azur bols pour ablutions nuit sur nuit
Laissant courir sans fin mon imagination

Italiques extraites de La Disparition Georges Perec





















AUTOPORTRAIT du mercredi 18 août 2010

Qui es-tu JJ Dorio ?

Je suis une présence

Je suis un sommeil de plume

Je suis un presque rien un petit chose 

un goût de cendres et de miel noir

Je suis une notion un rêve d’indien Goajiro

Je suis un chemin de passage et de doutes

une route de promesses

un dictionnaire du premier mot

D’où viens-tu JJ Dorio ?

Je viens de la terre glaise

du labour du ahan et des bœufs joints

Je viens des rimes équivoquées

et des boustrophédons

Je viens des borborygmes 

de l’encre et du papier de la mairie

de La Bastide de Besplas

en Ariège

Je viens de l’an 14 et du trépas de mon grand-père Bernard-Jean Dorio

Où es-tu JJ Dorio ?

Je suis ici ma main gauche tenant une feuille intitulée Autoportrait du 6 mars 1998

ma main droite faisant cette variation sur le clavier noir

Je suis ailleurs dans le bazar et le hasard

de ma roue de fortune

Je suis l’un des doigts qui traça les taureaux de la grotte de Niaux

Je nage dans le gouffre des signes multipliés

revigorés par le glyphe solaire et la spirale des mythes cosmogoniques

Je suis dans l’étoile blanche qui se lève au crépuscule de la vie

Je suis et je ne suis pas dans cette liste qui s’écrit

sans moi

Où vas-tu JJ Dorio ?

Je vais vers la fin annoncée de cet autoportrait

Je vais vers les mots les plus humbles des enfants et des lettrés

l’hirondelle et le martinet le flux et le reflux l’eau et l’air

Je vais vers le rire qui emporte le fol dans l’éclair du sacré

Je vais vers le pays où le « je » disparaît

Que fais-tu JJ Dorio ?

Je me tais

nb : Le modèle des questions et l’élan de l’écriture m’ont été donnés par Michel Butor 

https://www.leseditionsdunet.com/livre/un-dictionnaire-part-moi

DORIO JJ (un dictionnaire à part moi)

UN DICTIONNAIRE À PART MOI
Jean Jacques Dorio
Les Editions du Net

Le livre vient de paraître : il est disponible sur tous les sites internet de vente de livres (exemple La Fnac) et sur demande chez votre libraire 


Des fragments autobio-sémantiques, un abécédaire singulier où le plaisir de l'écriture ne nous quitte pas. On déambule aux détours des lettres et des mots et on découvre des alcôves lyriques, géographiques et poétiques. Prose ou poésie ? Abécédaire ou Autobiographie ? Provence ou Ariège? Tout n'est qu'hybridité pour le plus grand plaisir du lecteur. 

Camille Blancher  

DORIO JJ

Qu’importe mon nom or ou cuivre
Perle ou goutte d’eau dans la mer
Victor Hugo
 
La folle de Chaillot je ne sais plus qui c’est
Tayaut tayaut tayaut
Le roi de la Pampa ça je connais bien mieux
Queneau Queneau Queneau
Fabliaux sur les parvis poèmes in-folio
Mon dictionnaire de rimes ne connaît pas Dorio
Yoyo yoyo yoyo 

Mes poèmes ne racontent pas d’histoires,
mais mes histoires y figurent,
fragmentées, mouvantes,
miscellanées cousues d’un fil d’or (io),
que je m’efforce de rendre invisible.

voix Dorio JJ sur une musique de Gato Barbiéri « Le roi de la pampa »

HYPNOGRAPHIES FAÇON DORIO

Nuit blanche sur la page

La main sans maître projette

Son alphabet des ombres

Jacqueline Saint-Jean

BRASIER DES OMBRES

Livre d’artiste en 12 exemplaires

Poèmes Jacquie Saint Jean

Hypnographies Jean Jacques Dorio

2014

C’est toujours ça d’écrit
Se dit l’apprenti calligraphe

C’est toujours le pinceau qui chine
L’encre des mots et des eaux
D’une poésie dont l’essence est idéographique
Me souffle un fin lettré
Qui feint d’être idiot

Ouvrir aux confins
Mettre le désordre
C’est ainsi que s’ordonnent
Mes pratiques limites chamaniques :
Hypnographies façon Dorio


hypnographies 3 juin 2022