Nul fanal Ni conseils Ni rage d’écriture Un petit feu d’ardoise Maintenu mot à mot La craie de l’écolier Le stylo noir qui grince La source d’un autre âge Le rossignol des pièces Sur cette scène autre Où l’on tend la toile D’être et de n’être pas

Jean Jacques Dorio Un poème inédit par jour
Nul fanal Ni conseils Ni rage d’écriture Un petit feu d’ardoise Maintenu mot à mot La craie de l’écolier Le stylo noir qui grince La source d’un autre âge Le rossignol des pièces Sur cette scène autre Où l’on tend la toile D’être et de n’être pas

J’écris en catimini
J’écris à Cathy Taquité
J’écris pour lui expliquer
Que ma tactique était toc
J’écris de tics et de TOCS
J’écris en aparté
J’écris À l’Écart
dans la maison de Michel Butor
J’écris a parte
J’écris sur un papier bon public
J’écris en regardant Arte
J’écris en me souvenant des petits bonhommes de Folon
Qui ouvraient et clôturaient les programmes d’Antenne 2
J’écris comme ces drôles d’oiseaux
Portant chapeau sur la tête
J’écris d’abord dans ma tête
J’écris comme on parle au papier
J’écris de ma main gauche
(la plus gauche des deux)
J’écris Sauve qui peut
J’écris mais je ne m’enfuis pas
J’écris que je mourrai à Paris au cours d’une averse
Un jour dont déjà je me souviens
J’écris I Remember
J’écris de remembrances en remembrances
J’écris en brassant des souvenirs plus ou moins inventés
J’écris faux Narcisse et vrai…
(le mot me manque)
J’écris en état de frayage
J’écris en cherchant le chemin qui n’existe qu’en le frayant
J’écris sans routine ni brouillon
J’écris dans les parages
J’écris l’enrage (de l’écriture)
L’an rage (le mois de Mai de 68)
J’écris sur une table qui avant d’avoir été installée dans le salon
a voyagé dans un wagon parti de la Forêt Noire
J’écris sur de petits carreaux d’écolier
J’écris sur une seule face
J’écris pile poil après minuit
(sauf si je m’endors pour un premier somme autour de minuit)
J’écris en imitant mon écriture au tableau
Quand je l’enseignais au CP
J’écris à grands coups d’épées
Sur mon carnet de citations
J’écris sans mon Mont Blanc
Que m’avait offert Nadège
Et que j’ai perdu connement dans la neige
J’écris -vous l’aurez reconnu- en écoutant Nougaro (le mont blanc)
et Thelonius Monk (Round Midnight)
J’écris en lisant Cesar Vallejo
(Me moriré a Paris con aguacero)
J’écris avec Boby Lapointe (Ta Cathy t’a quitté)
J’écris avec Montaigne (comme il parlait au papier)
J’écris vivant heureux en attendant la mort
(selon le dérisoire projet de Desproges)
J’écris vie critique,
tissée d’expériences multiples
J’écris Liberté
Écrire selon l’orthographe. Pour les mots compliqués je m’y reprends souvent. Mais je n’aime pas raturer. Alors je laisse les erreurs premières, qui ne sont jamais « fautes », et je fais des lignes d’écolier pour peu à peu corriger cette orthographe que d’autres parmi les lettrés abhorrent.
Je n’ignore ni le jour funeste, le lundi 8 mai 1673, où les académiciens prirent la décision d’adopter une orthographe unique, ni le florilège d’incohérences orthographiques qui fait le délice des linguistes pervers.
Je sais bien que les poules du couvent ne couvent que des œufs sans germes et que l’abbaye regorge de jeunes cobayes novices, mais quand même, un brin malicieux, je continue à lire et à tirer pour mon petit-fils, les fils des aventures de Petit Ours Brun.
Enfin bonne pâte j’utilise ma patte pour tracer à nouveau à la bombe de peinture rouge ce slogan jouissif de mai 68 : l’Ortografe est une mandarine !
SUR MON CAHIER DE VIEIL ÉCOLIER
Sur ce cahier d’écolier, les titres occupant la marge, sont comme une entrée aimantée. Et pourtant, pour le vieil écolier qui les imagine, ça n’a rien d’évident. Une fois écrits, il ne sait plus bien à quel fragment les raccrocher. Il aimerait d’ailleurs souvent abandonner, arguant de la vieille utopie qui voulait laisser le lecteur continuer, à sa manière, la poésie faite par tous et par chacun.e. À condition, tout de même, que ce soit sur un cahier d’écolier.
CITATIONS
Accumuler mille et une citations. Cette nuit celle d’un Basile (de Césarée), évoquant la complicité d’un vrai lecteur avec le travail des abeilles. Mais sous la citation recopiée, je ne donne jamais le nom de l’auteur.e qui pourrait induire un sens préétabli. (Après le corpus, je le rappelle cependant.) Ce que à quoi je m’astreins, par contre, c’est d’écrire quelques mots pour préciser la cible ou l’objet de la citation. Ainsi pour « citation » :
1 texte tissu réseau d’écritures et de citations 2 une œuvre enfilant les citations 3 pièces empruntées dont chacun fait son miel 4 de la citation aucune définition n’est possible 5 se citer soi-même : « Si on ne se citait pas quelquefois soi-même, qui donc le ferait jamais ? »
ENCYCLOPÉDISME
Si, dans un premier temps, on prend plaisir et goût à cette accumulation de faits, d’idées et de théories en transformation constante, on n’oublie pas l’apprentissage en miroir, celui « d’apprendre à ignorer et à douter. » Raymond Queneau
COLLAGE
« Se daba cuenta de que, más que escribir un libro, lo que estaba haciendo era componer un collage hecho de centenares de páginas de citas, de fragmentos de libros, de apuntes esbozados que no tenía tiempo para desarollar. » Antonio Muñoz Molina (Un andar solitario entre la gente)
Il se rendait compte, que ce qu’il était en train de faire, bien plus qu’écrire un livre, était de composer un collage fait de centaines de pages de citations, de fragments, de notes ébauchées qu’il n’aurait pas le temps de développer. (ma traduction, comme on dit).
Une encyclopédie flottante et galopante texte en cours





perdu