J’ouvre la fenêtre et laisse entrer quelques instants la fraîcheur après un orage sur la passe maritime . Un poème nouveau m’attend dans sa discontinuité essentielle et son essai de recomposition . L’éclair d’un geste qui ouvre sans le vouloir la porte de ce poème comme un éventail
Escrever de não escrever selon ce que me dicte le fantôme de Pessoa J’écris de ne pas écrire ce que d’autres ont déjà écrit J’écris pour que d’autres écrivent sur mon texte palimpseste, pâles insectes trempés dans l’encrier et qui dans un dernier sursaut font des tortillons sur la page J’écris cette littérature à soi semblable au balancement de l’abanico, figure de style évoquant l’éventail J’écris en éventant et réfutant les livres noirs qui vont s’ailleurisant J’écris ici et maintenant
Pagaille de rêves Rêves d’un pagaious Je rêve de l’ail des ours dont j’ai lu hier dans un grimoire les vertus magiques Je persuade je-ne-sais-qui d’en cueillir une fleur et de la porter sur sa poche ventrale (elle a une salopette) pour préserver l’enfant à naître Je rêve de mon petit fils tout petit à qui je donne la main dans un chemin forestier La neige tombe soudain d’abondance et nous voilà sur des skis lui avec un casque noir moi le protégeant derrière lui Je rêve que je vois des rayons multicolores qui tombent du ciel féériquement Je veux faire partager le spectacle à ma fille P. qui me dit : Mais papa c’est déjà sur le « 1 » le journal qu’on déplie comme un dazibao Je rêve de la grande salle de l’Université d’Oxford où des portraits montrent le docteur Dodgson alias Lewis Caroll Je rêve d’Harry Potter dont le premier tome traduit en français vient de paraître et que je fais lire à mes élèves du collège Je rêve d’une corrida à Séville où Jo à côté de moi agite son rouge éventail je lui crie dans le tumulte de la feria : Enfants voici les bœufs qui passent Cachez vos rouges tabliers…Victor Hugo
Cette rue qui longeait la rivière
Je ne l’emprunterai plus
Et la porte de ma maison d’enfance
Que nécessité me força à mettre en vente
N’est plus qu'un panneau de bois dur
Fermé pour moi à jamaisMais je laisse là les souvenirs sans suiteJ’ouvre la fenêtre et laisse entrer quelques instants
la fraîcheur sur la passe maritime
d’une première nuit de septembreUn poème nouveau m’attend
dans la discontinuité essentielle
et son essai de recompositionL'éclair d’un geste
Qui ouvre sans le vouloir
La porte de ce poème
Comme un éventail