Pour rien
Une forme
Qui ne rime
à rien
En chemin
Vers la tombe
D’Antonio Machado
À Collioure
Caminante
No hay camino
El camino se hace
Al andar
Sur ce chemin
Qui n’existe
Qu’en le faisant
(le fatiguant)
En chemin
Assis devant le fleuve
Qui passe
Et ne s’arrête pas
Faisant ces vers
De mémoire
estos días azules
y este sol de la infancia
ces jours d'azur
et ce soleil de l'enfance
dernier vers écrit par Antonio Machado à Collioure
ce lundi 26 février 2024
Tag Archives: Machado
UNE NOUVELLE HÉSITANTE
UNE NOUVELLE HÉSITANTE
Entre Séville et Grenade
Cette fois le choc des coïncidences t’entraîne à Grenade (si, en su Granada, comme dit un poème dédié à Federico García Lorca). Une dame à l’ancienne, avec une mantille de dentelle noire sur les cheveux, te montre ses travaux de broderies, qu’elle fit, faute de mieux, en attendant « son homme », le futur mari qui lui était destiné. Peut-être parce que tu apparais curieux, intéressé, elle détaille pour toi les mille et un motifs de fleurs, les points de croix, les initiales de noms et de prénoms entrelacés. Mais tu n’oses pas lui demander ce qu’elle en pense vraiment quarante ans après. Ce qu’elle pense de cette servitude volontaire; elle cousant, brodant en attendant de faire don de sa virginité, lui, la rencontrant de temps en temps, en tout bien tout honneur, faisant sérieusement ses études de médecine, mais, les choses étant ce qu’elles sont, courant avec quelques amis les bordels, après avoir fait le tour des bars à tapas, où l’on se raconte l’une après l’autre des histoires de sexe à mourir de rire. Une virée dans l’air du temps de cette Espagne franquiste du sabre et du goupillon.
De Grenade à Séville, il n’y a qu’une chanson légère de Iolanda Gigliotti alias Dalida, où l’on retrouve mantilles, « des yeux noirs qui pétillent », « par-dessus la charmille ». Toi, tu as découvert Sevilla, la maravilla, en pleine semaine sainte. Mais loin de te réjouir, les défilés d’encapuchados à la mode Ku Klux Klan, t’avaient glacé. Au son des tambours et des trompettes militaires, tu avais ressenti une véritable terreur. C’étaient des morts vivants qui portaient le fardeau d’un Jésus (Réssous) crucifié et d’une Vierge dolorosa, des Douleurs.
À ce moment du récit, tu t’aperçois que tu t’es engagé sur une mauvaise voie, les Stations, la Passion, ces restes de religion dolente, vulgairement parlant, c’est pas ton truc (à plume !) Tu aurais dû rester à Granada, toute une nuit où l’on boit de la manzanilla, (un vin très sec et doré), en écoutant le chant profond d’une guitare gitane : voy como ayer gitana, murerte mía, por estos aires de Granada, mi Granada Machado hommage à Lorca « Aujourd’hui comme hier, promenant ma mort gitane, dans l’air de Grenade, de ma Grenade ».
LA FLAMME VACILLANTE DES POÈTES DE L’EXIL
E qualquer margem serve Para receber o lamento Que não cabe no papel Nuno Júdice (1949- ) Et il est une marge qui sert à accueilir le lamento qui déborde du papier (ma traduction) Le poème évoque les poètes de l’exil -littéralement hors sol- Le poète cite Ovide, Dante, Camões (beaucoup de noms, reconnaît-il, lui échappent) Je songe à Clément Marot Poète non pareil Auteur de grandes merveilles Dont le catholicisme fanatique Eut la peau Y sueño a Antonio Machado Qué con facilidad Confundia Belleza y Bondad 1 La nuit quand les mots traversent plus aisément l’Esprit L’esprit de résistance pour celui qui maintient en lui La flamme vacillante de la poésie 1 Et je songe à Antonio Machado Qui, naturellement, fusionnait en lui, Beauté et Bonté.

J’ÉCRIS opus 9
J’écris pour je ne sais trop qui et contre je ne sais trop quoi J’écris sur l’Azur Et ce soleil de l’enfance J’écris sur cet ultime vers Tracé par la main de Machado : Estos días azules y este sol de la infancia J’écris pour après tant de paroles vaines Que survive la parole J’écris palabras, soledad, llovizna, en Lima : cette pluie fine, si fine, un jour où Dieu était malade, très malade, en fin de partie J’écris toutes les nuits Pour ne pas laisser brûler en vain La flamme de la chandelle J’écris sur toutes les paroles entendues et qui ne sont rien que du silence si j’en crois ce poète qui composa son recueil page à page devant la casse, devant le marbre, devant la machine, prenant une à une les lettres dans leur petit cassetin pour les aligner dans le composteur comme faisait son épouse Germaine qui venait de quitter définitivement leur imprimerie pour cause de décès J’écris sur l’oreiller Tant qu’il y a un peu d’espace vierge sur ma page J’écris à part moi et à part ça je pourrai dire que j’écris aux autre mois (faut-il les orthographier avec un s ?) Si j’écris Est-ce pour témoigner Est-ce pour me leurrer Est-ce pour me concilier la bienveillance des lecteurs privés d’images ? J’écris un livre nouveau sous le bras Comme celui qui vient d’acheter son pain frais croustillant J’écris sans ambages Préférant au bon grain L’ivresse la folle ivraie évocations citations Antonio Machado, Cesar Vallejo, Gaston Bachelard, Pierre-Albert Birot.
LA PREMIÈRE LIGNE
La première ligne
Nous ouvre un nouveau sentier
Elle est fortuite inattendue
C’est un pas dans la cendre
De nos déserts de nuit
Ou bien le premier rai du soleil
Qui fait lever l’aurore
Une poussée de glyphes
d’un calligraphe, en attente
de la direction,
que va lui indiquer le chemin :
Caminante no hay camino
se hace camino al andar.
Antonio Machado

Dorio 18/11/2020