Rien La reprise D’un poème Mille fois écrit Mille fois oublié Rien Ne pas Nier Ce côté niais Ce parti pris De partir de Rien Comme une répétition D’acteurs muets Avant la première Les pièces poétiques sur le Rien Sont en effet légion Plus rien sauf Cette joie de l’oubli 1 Rien encore Tout déjà 2 Rien Nada Je nage sur ma page Et toujours À contre-courant Pourquoi le nier ? 1 Philippe Soupault 2 Jacques Dupin
Archives de l’étiquette : rien
BÛCHER
Faire quelque chose de rien et surtout Tout savoir suprême non-sens. Paul Valéry Je bûche des bouquins du temps d’Hugo, de Baudelaire Je ne suis rien, je le sais, mais je compose mon rien, avec un petit morceau de tout. Rien n’égale en longueur les boiteuses journées Quand…l’Ennui fruit de la morne incuriosité Prend les proportions de l’Immortalité J’ai de quoi avec ça m’occuper longtemps à ricocher à composer, à mon tour et depuis ma modeste place, une petite pièce, bribe, esquisse, écrites avec une insatiable curiosité. La poésie des mots venus de rien, Qui se languissent sur ma page ; Des mots qui boitent, Toc, toc, toc. (La poésie doit être faite par tous. Non par un. Pauvre Lautréamont, tic, tic, tic, tic.) La poésie des cris des martinets, que mon père appelait les faucilhs. Tout un poème, Troué d’un air d’azur Qui vire au noir Quand vient la mort.1 1 Noël Dorio (03/12/1912-03/12/199) Martigues 03/12/2021
PARLER DE RIEN
Parler de rien en se mordant la langue
En écrivant en vers cette petite prose
Parler de tout à son chat Archimède
Qui naquit à Syracuse à Pâques ou à Kairouan
Et chanter du Dimey
Un dix mai 68
Parler à Cohn Bendit
À Nanterre la Folie
Parler le nez en l’air
À Gavroche éternel
Mort sur la barricade
En sifflant tel l’oiseau
C’est la faute à Rousseau
Parler et puis se taire
Faire ce pied de nez
À dame Camarde
Sur les marches de la mort
Sur toutes les pages blanches
Écrire Liberté
Dimey Bernard est l’auteur de la chanson Syracuse
Mise en musique par Henri Salvador
Gavroche est la petite grande âme d’une scène des Misérables
écrite par Victor Hugo
Les deux derniers vers sont extraits de Liberté
De Paul Eluard
NE RIEN FAIRE
NE RIEN FAIRE, sauf respirer…et lire, mais en levant souvent les yeux, jetant alors, comme négligemment, sur le papier, cette prose musicale- du moins, je l’essaie.
Le personnage d’une nouvelle de Poe, si j’en crois le romancier espagnol qui rapporte le fait, prend « un interés tranquilo pero inquisitivo hacia todo ». Pour toute chose, il manifeste, deux attitudes en apparence contradictoires. Un intérêt tranquille (je suppose qu’il prend son temps, ne se met aucune pression pour résoudre l’énigme), mais « inquisitorial » ! (il tourne et retourne, « littéralement et dans tous les sens », ces choses qui passent sous son radar ? il fait du Ponge sans le savoir ?). Je n’oublie pas, toutefois, que le tout se déroule dans le flux et le rythme musical, créés par une « nouvelle ».
NE RIEN FAIRE, c’est déjà bien assez pour écrire ainsi, en vis-à-vis, sans compter/conter.
J’envie l’époque de Baudelaire, où ces petits poèmes en prose, flottaient, apparemment perdus, au milieu des pages de journaux de Paris.
NE RIEN FAIRE, la suite m’appartient. Elle ne paraîtra pas sur cette page cartonnée, blanche, dos de couverture de mon premier recueil de poèmes publié.
Oublie tout ce que tu sais sur la littérature, la poésie, la vie écrite dans les journaux du matin ou du soir ou, désormais, sur l’écran (cette mort programmée du lecteur de papier). Passe ta mine dans le taille-crayon, prends un livre, une page vierge en vis-à-vis, et sans rien faire, commence, ici et maintenant, ton exercice de petite prose poétique, limité à une page, pas plus.
Petites proses poétique en une page
En temps de Covid (sévère), je vous propose un exercice de lecture et d’écriture, partagées.
Pour faire simple, il s’agit d’écrire une série de « petites proses poétiques, en une page ».
1 Tracez sur votre feuille A4, un rectangle de 16×20 cm. (c’est le format commun).
2 Lisez le texte-souche, ci-dessus, 3 minutes, puis quittez-le des yeux.
3 « NE RIEN FAIRE, sauf… » ce sera votre début (l’inducteur). Que vous répèterez, autant que vous voudrez. (anaphore)
4 Écrivez à la main, en essayant de ne jamais raturer. (ce qui impose un certain « régime d’écriture », maîtriser sa vitesse, ne pas s’emballer).
5 Quand il n’y a plus d’espace sur la page, le texte est terminé.
6 Le recopier (mais rien ne presse, on peut laisser la pâte reposer), sur le clavier de l’ordinateur. Cette fois, vous avez toute latitude pour le modifier (mais à la marge).
7 Envoyez-le en doc joint à mon adresse doriojeanjacques@gmail.com, et je le posterai, tel quel, sur le blog.
8 Il n’est pas sûr que à partir de mes braises le feu se propage, mais sait-on jamais ?
9 Il en est des livres comme du feu dans nos foyers : on va prendre ce feu chez son voisin, on l’allume chez soi, on le communique à d’autres, et il appartient à tous. Voltaire
EN SOURDINE

EN SOURDINE
On ne pense à rien
mais un reste
un zeste de phrase
a laissé cette trace
sur le papier
Et maintenant
au lieu de froisser le tout
et de le jeter
avec sa tête coupée
dans le panier
On maintient
sa phrase sa tête sa pensée
l’esprit
de cet horizon particulier
Où ce rien a donné
ces liens ces bribes
cette appartenance
au monde qui glisse
et palpite
en sourdine…