Lettre mal faite et mal écrite
Vole de par cet écrivant
Vers le plus noble Clément
Qui cinq siècles après est vivant
Pour Clément Marot
Et Pauline Dorio
dont le livre
« La plume en l’absence »
« Le devenir familier
de l’épître en vers »
Paraîtra
Quand Seigneur Corona
Le permettra
Tu es né à la fin du XV°
et moi à la mitan du siècle XX
Ça nous fait une belle trotte de différence
Et pourtant me voilà t’écrivant d’accointance
Toi le non pareil des mieux disant en vers
Moi que l’époque ou peut-être le non talent
A relégué aux portes de la N.R.*
Mais ami Marot tu ne peux pas savoir
Comment seul dans ma couche
Je suis heureux
De lâcher ainsi la bride à ma plume
Allant me répétant :
Tu es le seul vivant asteure
À tenir la gageure
de t’adresser à Maître Clément
Ainsi s’avance cette épître écrite sans trop d’égard
Aux règles que tu inventas peu à peu
Passant du courtisan aux lettres familières
« Au Roy des François pour le délivrer de prison »
« Aux dames de Paris » « À ton ami Lyon »
Je t’écris de Provence
Pays béni des troubadours
Où le cœur en ballade
D’un mot l’on fait cent**
J’avance sur ma nef fragile et je rame
Étonné amusé libre de toute demande
Aux princes de ce temps
Qui règnent sur les Lettres
Prises dans les glaces de l’unique roman
Poèmes et poésie ils s’en fichent les bougres
Toi ce fut au contraire des demandes sans fin
« Faute de pécune » mais jamais au grand jamais
Tu ne te permis de quémander
En tordant le bâton du déshonneur
Ton père il est vrai t’initia aux subtilités
Du bon rhétoricien qui savait composer
C’était son ars nova dont tu feras tremplin
Pour t’en aller créant tes nouveautés
Sonnets églogues épigrammes
Et tes épîtres que ma fille Pauline
Connaît sur le bout de ses dix doigts
Mais foin du catalogue sérieux que tu connais
Ce qui me plaît encor et qui n’a pas bougé
Ce sont tes engouements badinages étrennes
De mots plaisants gaillards facétieux
Tout ce qui hérissait cagots et sorbonnagres
Qui te le firent durement payé
Tu mourus en exil pour n’être pas brûlé
Mais le cœur mis à nu tu sus tenir le cap
Le cap que dis-le le timon
Ta main ouverte sur Amour
Ton guide sûr
dans la fête ou la défaite
Et en tes batailles exaltées
pour Justice et pour Paix
J’arrête là ma louange
Pardonne- moi pour cette trop longue laisse
Pleine de prose et de maladresses
Mais avant que je ne te perde
Je vais encor te citer
Bien écrirai encor autre chose
Mais mieux me vaut rendre ma lettre close
Close peut-être mais toujours à réinventer
Ainsi merci
Et mille fois te remercie
D’avoir permis à Dorio
Humble facteur ès lettres et mots
De poursuivre à sa manière
Rimailles et ce blason éternel du bon Marot
La mort n’y mord
L’amour y garde son mystère
Voilà pourquoi cet écrit je t’adresse
*Non Reconnaissance
** « Eu m’o escount en rizen
E’n deman per un mot cent »
Peire Vidal
Je t’écoute en riant
Et d’un mot j’en fais cent
JJ Dorio dont la maman naquit Vidal
Martigues 30 mars 2020