PASSAGE D’UN RÊVE

Le rêve de passage
S’est posé sur mon oreiller


C’était un lièvre roux
Qui fuyait sur une route des Pyrénées


C’était un cheval sans ses rênes
Dans une ville d’Italie


C’était un oiseau de passe blanc
Dont j’admirais le vol hautain hésitant
Mais qui soudain fondait sur moi
S’agrippant à mes cheveux en nage
Sur l’oreiller des Songes


Bêtes et lieux reparus
Dans la contrée étrange
Où volette Phénix

lièvre d’Ancizan Hautes-Pyrénées
cheval de Turin
oiseau de La Bastide de Besplas Ariège

poème mis en ligne le 07 mars 2006

PHÉNIX

Je suis tout feu tout flamme
Je suis l’eau remontant à mes sources
Je suis l’air de rien
Je suis la terre des Dorio (tous laboureurs)


Je suis le souffle qui ravive dès matines les braises du foyer
Je suis l’eau de l’orage sur le visage de Rrose Sélavy
Je suis la terre que le blé vert adoucit
Je suis l’air dont s’abreuve l’alouette de Ventadour


Je suis poète contumace 1 à l’esprit follet
Je suis la mer la mer toujours toujours recommencée 2
Je suis la Mère Terre
(va-t-elle mourir la Pacha Mama ?)
Je suis Phénix qui écrit des poèmes après Auschwitz*



1 Tristan Corbière 2 Paul Valéry



*Dans cette ville (Francfort), Theodor Adorno a prononcé une grande phrase : on ne plus écrire de poèmes après Auschwitz.
Disons-le autrement : après Auschwitz on ne peut plus respirer, manger, aimer, lire.
Mais quiconque a déjà inspiré une première gorgée d’air,
quiconque s’allume une première cigarette a décidé de survivre,
de lire, d’écrire, de manger, et d’aimer.


Heinrich Böll



MADAME X.

Que de mots !
Issus de maux
Et merveilles
Et de visages
Venus d’un temps
Où l’on chantait
Pour un oui
Pour un non
Des paroles
Qui s’envolent

Que de mots !
De syllabes
Sur le sable
C’est l’été
Sur la dune
Sous la lune
Quatre accords
De guitare
De Brassens
De Béart

Que de maux !
Mis en mots
Dans l’incendie
Du temps
Que nous traversons
Grand brûlé
Ou Phénix
Avec Mallarmé
Et son ptix
Ou la mystérieuse
Madame X.




Elle était brune Un turban noir prenant sa tête
Comme deux mains gantées y fixait une aigrette
Tremblante avec un petit nœud papillon d'or
Et tout cela faisait très bien dans le décor

Manège qui tourna huit jours puis s'arrêta
Brusquement le huitième ne laissant sur la piste
Que treize chaises et les mégots de Madame X.
Évanouie comme le Nil dans son delta

Roger Vitrac Énigme qu'on ne sait sur quel pied danser

PHÉNIX

En procédant à l’impossible rangement des livres de mes bibliothèques, j’ai effacé tous les noms d’auteurs. Des voix anonymes s’élèvent du papier, images de l’évidence poétique ou paroles qui peu à peu s’éteignent.

À la fin, ma librairie est réduite à une planche branlante de cerisier.

Le peu de livres réunis ont retrouvé un auteur unique refusant de mourir ;

Oiseau des vents, pierre vive, arbre enchanté, métaphores vives embrasant Phénix.

Jean Jacques Dorio <doriojeanjacques@gmail.com>)

https://www.leseditionsdunet.com/livre/un-dictionnaire-part-moi