Ici les proses d’un poète mineur
Ici la manie d’agencer les mots
En lisant en écrivant
À nos vivants et à nos morts
Ici l’amour des oxymores
Et les petits gestes du quotidien
Pour nos enfants et nos anciens
Ici les points de suspension
Quand notre chant s’égare
Dans un buisson de questions
Ici un long silence
Qui fut la source
De ce poème en suspens
Tag Archives: quotidien
LE QUOTIDIEN ET LE DISPARATE
Le quotidien et le reste : ce qui semble échapper aux mots de la tribu, le disparate, la disparité (vieux ou littéraire), mais que l’on tente par essais successifs de saisir malgré tout. (C’était à cette époque avec un porte-plume muni d’une sergent major écrivant sur un bloc de feuilles A4 posé sur une table blanche en Formica -for(à la place de) mica (matériau stratifié revêtu de résine artificielle).
Nous étions le vendredi suivant le jeudi de l’Ascension 1983, France Musique diffusait d’une oreille l’autre, une émission consacrée aux troubadours, en particulier Bernard de Ventadour (Bernard de Ventadorn en occitan, la langue maternelle de mon père, soit dit en passant).
Tiens me voilà me désignant. Et pour continuer j’écrivais tout de go que je vivais et travaillais à un collège d’enseignement public (le Pagnol), dans une ville de Provence donnant sur l’étang de Berre, traversée de chenaux (pluriel de chenal), qui la faisaient pour le pittoresque nommer La Venise provençale.
Le haut étang fume continuellement / Quelle sorcière va se dresser sur le couchant blanc, Quelles violettes frondaisons vont descendre…de ces Phrases des Illuminations écrites par un garnement de 17 ans que son aîné qui les recueillit et les dévoila dans la rubrique Poètes maudits, baptisa « l’homme aux semelles de vent »
à suivre
NOS QUOTIDIENS
NOS QUOTIDIENS
passent
peu ou prou
dans l’indifférence
ou l’échange vif
le feu en nous
ou les contes glacés
une page blanche
ou quelques paragraphes
posés
sur nos journaux intimes

Nos quotidiens texte 14 mars 2024 Martigues
3 hypnographies Londres 20 janvier 2024
PROSE DU QUOTIDIEN AU TEMPS DU CORONA
Depuis le Corona personne plus je ne côtoie
Plus de super marchés
Plus de balades sur ma plage préférée
Plus de poste où je vais peser mon courrier
Ma fille d’à côté me fournit en fruits et légumes
qui viennent de paysans de Croix Sainte
-un quartier des Martigues-
de daurades et de loups
qu’ont apporté les pêcheurs des « petits métiers »
de bonnes miches du boulanger
Ma fille de New York où frappe la pandémie
me raconte ses cours où s’affichent
ses élèves du lycée Français
le ouikend on joue ensemble au scrabble
une application qui compte les points et les secondes
micros ouverts nous devisons
de ses travaux sur les épistoliers du XVI°
de mes poèmes en construction
et j’entends toujours au moins une fois
les sirènes des pompiers de Manhattan
C’est bien d’avoir des filles
à qui l’on a donné
Alain Caillé appelle ça très justement
extensions du domaine du don
Et pour le reste alors pendant le Corona
le reste ?
Je fais le ménage
Un peu de la maison pour la poussière
Beaucoup de mes écrits
qui comportent les manuscrits sur les cahiers
les pages en A4
les feuilles cartonnées comme celle-ci
où je trace ma prose
Et aussi
tout ce qui est en stock sur l’ordi
ne serait-ce que sur ce blog
que j’ai intitulé sans trop savoir pourquoi
poésie mode d’emploi
C’est la 15° année
que je « poste » au moins un texte nouveau par jour
Il est grand temps de trier de conserver
de composer
et de rayer des pans entiers de ma littérature
Depuis le Corona
– non ce n’est pas fini
tout ça vient en vrac
et très mal dit
mais ce sont des choses que je fais
et que je vis-
Depuis le Corona aussi
j’ai la chance de prendre l’air
je me promène tous les après midi
et sans autorisation écrite
-mais je ne contredis en rien les consignes
pour éviter que ne se propage la bête immonde
qui tue-
je promène comme on dit ici
à deux pas de ma maison
au-dessus où y a un petit bois de pin
ses sentiers et ses senteurs
de thym et de romarin
la couleur des fleurs
de cistes et de pâquerettes
et le champ d’olivier que j’admire
et au-delà en suivant le fil de l’horizon
c’est la mer la mer toujours recommencée
la passe maritime
ses gros bateaux
qui attendent leur tour d’être chargés ou déchargés
Depuis le Corona aussi
avec les ami.e.s
on se téléphone on se maille
on whatsappe
un peu plus un peu mieux
Au fond et pour terminer
Je ne suis pas pressé d’en finir avec cette vie
une phrase je sais que l’on peut retourner en tous sens
comme ces malheureux que nos saints gens hospitaliers
s’efforcent de sauver
post scriptum
avant le Corona je vivais presque pareil
de livres des autres
d’écrits personnels
de petites ballades sur plage et sur piano
de rencontres magnétiques
avec ceux qui sont loin et proches de mon cœur
je vivais et je vis avec toi
qui n’es plus là
pour me faire rire un peu
et me délivrer de tous ces gens
qui pleurent sur leur sort
au temps du Corona