


poésie Victor Hugo voix musique jj dorio arrangement accompagnement Philippe Bruguière studio Le Petit Mas été 2019
Jean Jacques Dorio Un poème inédit par jour



poésie Victor Hugo voix musique jj dorio arrangement accompagnement Philippe Bruguière studio Le Petit Mas été 2019
http://reveusedemots.blogspot.com/

LE TEMPS QUI COURT
Le temps qui court est arrêté
Dans le jardin des grands récits
Le mien est si petit
Il n’y aura bientôt plus personne
dans la course à l’abîme
du Dante ou de Shakespeare
Le mien est si petit
qu’il tombe dans l’oubli
au fur et à mesure
que je le décline
sur ma page de nuit
blanche
La course infinie
des grands poètes et prosateurs
m’a toujours fait peur
La mienne ressemble
au petit trafic des fourmis
que quelques spectateurs abrutis
couvrent de poudre grise
L’Enfer gémit la Tempête hurle
Les morts hantent la scène
De fosses peu communes
Dans mon petit jardin
à l’écart des grands récits
J’enterre mes fourmis
« Ça a coulé » dit Flaubert, parlant du temps qui a fui, comme un tonneau percé. « Ça a calé », ai-je écrit, dans la chanson que j’ai faite sur ce thème. J’évoque ainsi, « les calades », ces chemins en pente faits de galets de rivière. Nul n’est censé savoir, que c’est sur une calade de Vaison la Romaine, que fut prise notre dernière photo, en amoureux, au printemps 2013.
Sous l’histoire la mémoire et l’oubli
Sous la mémoire et l’oubli
la vie
Mais écrire sa vie est une autre histoire
Inachèvement
Paul Ricœur
(avec ma mise en espace
et une modification)
J’écris avec des mots
des images un stylo
J’écris à l’aveuglette
sans réfléchir sans infléchir
le projet de remplir
mes papiers d’identité
J’écris avec les données éparpillées
d’une vie de mémoires pillées
-la mienne et celle des gens de rencontre
croisés dans les livres,
les films, les musiques, les tableaux –
et en réalité
J’écris avec mes proches
mes deux filles qui me tiennent éveillé
J’écris avec celle qui s’est dérobée
mais qui demeure
mon art premier
J’écris avec ma femme
que j’appelais pour plaisanter
mon épouse préférée
avec sa joie de vivre
nos lettres d’amoureux
J’écris avec ses maux derniers
atroces cruels injustifiés
J’écris avec son absence
hors du temps
dans le lit solitaire
des mille et une nuits
J’écris avec des cris
et des outils
que j’essaie au mieux de maîtriser
pour comprendre cette histoire
au présent d’une vie
que « nul fil d’or
ne relie »*
*Jean Vilar
Chronique romanesque
(un livre qu’il avait « sur le métier »
quand une crise au cœur
l’a terrassé)
nb le titre fait référence
à la formule du poète Jean Bouchet (1476-1557)
qui se désignait comme
« LE TRAVERSEUR DES VOIES PÉRILLEUSES »