plaisir d’écrire la nuit remue une danseuse issue de la plume d’Henri Michaux la nuit bavarde cot cot couet couet couteau planté dans le cou du coq chantant la mort de Socrate plaisir de lire ses dialogues platoniciens où à la fin c’est cul par-dessus tête que se retrouve l’interlocuteur du sage athénien la nuit m’atteint jusqu’au matin
Tag Archives: Michaux
J’ÉCRIS opus 13
J’écris de bric et de troc de titres de romans édités par Balland le Seuil Albin Michel Minuit et Calmann-Lévy J’écris pour calmer l’ardeur à rechercher L’homme à tête d’oiseaux, La femme Schibboletch, L’enfant des grandes lessives J’écris sans réveil, montre, monstres marquant le temps des horloges et qui font sommeiller la raison J’écris d’un seul coup d’un seul ou par à coups : arrêts plus ou moins longs, points morts et reprises J’écris depuis peu aussi sur l’application Samsung Notes de mon smartphone, premier texte devant l’exposition Zao Wou-Ki, à l’hôtel Caumont d’Aix en Provence : l’animal l’animot le torrent de coulures les pattes de la lune la tête de Michaux […] bateau ivre à la Sainte Victoire le pin palpite sur la montagne de Cézanne saisie par un calligraphe octogénaire qui livre sans le savoir son dernier combat […] J’écris conscient que moi aussi un jour ou plutôt une nuit je perdrais définitivement la voie J’écris avec mon stylo fétiche V5 hi-tecpoint réfractaire à l’invention du baron Bic J’écris ornithorynque pour voir ce que ça va donner sur le papier (les internautes recherchent aussi échidnés, monotrème, wombat, castor, koala…) J’écris « bec de canard cousu sur la fourrure d’un animal », comme l’écrivirent les scientifiques anglais découvrant le dessin du premier ornithorynque rencontré en Tasmanie, croyant qu’il s’agissait d’un canular J’écris sans prétention aucune : orgueil, vanité, amour-propre, suffisance (je recopie lintern@ute) J’écris pourtant comme s’il s’agissait de petits secrets échangés à la récré avec les élèves Perec, Montaigne, Mallarmé J’écris imaginant les lettres échangées entre eux J’écris à Jean Jacques Dorio comme si je m’appelais Marot J’écris de haut en bas et quand j’ai atteint le bas, je referme les yeux et rêve de Rio de Janeiro
J’ÉCRIS opus 11
J’écris en m’aidant d’une corde reliée à mes origines ...toujours à venir J’écris avec le cordon qui relie les enfants d’une sortie pédagogique J’écris depuis un temps zéro Passé néant Futur inexistant J’écris sur le pont d’un navire Où peu de voyageurs écrivent le français J’écris pour une répétition générale Qui laisse la place à des variations Indiquées à tel et tel endroit Comme le fait Phil Glass sur ses partitions J’écris l’endroit et l’envers d’un décor Qui s’estompe dans la brume de mon inconscient J’écris sans faire d’histoire, de contingence, de survivance, de désir de faire briller mon étoile dans la constellation des rêveurs éveillés J’écris attentif à reprendre certains termes de vieille coutume dont le lecteur inattentif ne mesure pas toujours l’arrière plan historique J’écris malgré les plaies et les bosses, les boss qui fanfaronnent devant les peuples de la Grande Garabagne imaginés par Henri Michaux J’écris fuyant les genres littéraires et le sommeil cousu de fil blanc J’écris avec la terre et l’eau les courants en feu le naturel qui plonge le corps humain dans un apprentissage sans fin J’écris par Jupiter ! par Confucius ! par Nobles Messieurs et Gentes Dames Chers et Chères amies J’écris Tao Tao J’écris sur le temps qui n’existe pas selon le cours dicté par Norbert Elias alors qu’il entrait dans le royaume borgésien des non-voyant J’écris en refusant de me laisser prendre aux mots J’écris Arrêt en cours en perdant le mélange de toutes ces choses que je viens d’écrire J’écris pour me désencombrer l’esprit
JE LIS MICHAUX DANS MON PUCIER
Je lis un peu de Michaux
avant de me lever matin
de mon pucier
Repos dans le malheur
Je l’assieds sur ma page
Et en fait mon bonheur
Emportez-moi
Çuila je l’ai dit bien des fois
Et même je l’ai mis en une chanson
De vieille et douce caravelle
L’âge héroïque
Où Henri Michaux tout en jouant
démantibule une à une
les parties du corps
des deux géants
devenus frères ennemis
Mais c’est gai comme Rabelais
et presque pépère
au contraire d’Homère
(C’est Poumapi et Barabo
Au cas où vous auriez oublié
Le nom de nos deux héros)
Voilà mon exercice terminé
Il est temps que je me secoue les puces
Pour entamer ma nouvelle journée
Michaux c’est bon un peu pour la plume
Mais pas trop
Car alors on risque d’être attrapé
par l’Opaque
CE TOIT TRANQUILLE (un don des dieux)
Le don des dieux, disait Paul Valéry,
du premier vers amorçant son poème
« Ce toit tranquille, où marchent des colombes »
Mais après, son daimon se retirait,
le laissant seul penser et remuer
sens et sons, mots perdus devant sa tombe.
Tout ce qui rend « intranquilles » les poètes
qui se donnent du mal comme Personne,
Pessoa et ses hétéronymes, vivant à Lisbonne.
Il faisait du patron de son « tabac »
Un héros de papier vendant ces cigares
Comme Descartes sa métaphysique,
Ou, Michaux, le Belge, ses chocolats.
Mais je m’égare dit Fol erratique,
le Fou Triboulet blasonné
par François Rabelais.
Minuit passé, la boucle se referme,
L’espace de la page n’en peut mais,
Sens et sons ont semé leurs germes sur
« Ce toit tranquille, où picoraient des focs.»