SUR NOS TEMPES PASSE LE TEMPS

fatras & fatrasies (une erreur de manip)
sur nos tempes passe la voix qui vient d’une personne qui n’existe pas

Sur nos tempes passe le temps et la nue, la nuit où, terminant mon texte manuscrit, je l’écris étendu, non dans l’herbe, mais (banalement) dans mon lit où, tout en traçant par intermittences les lettres, simultanément, je les lis.

Sur nos tempes passe le temps et sa lie, le temps mauvais des crimes de guerre, actuellement commis par un autocrate au cerveau pourri, au nom de la Sainte Russie.

Les deux trois rouges au côté droit d’un dormeur du val, jeune, tête nue, tranquille, se sont convertis en des corps déchiquetés, explosés collectivement dans des théâtres, des gares, des supermarchés et aussi, quand le missile aveugle détruit les immeubles, en de pauvres corps d’enfants serrant leurs doudous ensanglantés.

Sur mes tempes où ce que j’écris là, a quelque chose de funèbre, dans des décors noirs et rouges comme ceux de l’ancien Dieu Pan Creator.

Écrire pourquoi, si ce n’est pour ce déchirant appel à l’écriture d’un livre, heurté, troué d’éclairs, en vertu de la loi inévitable, qui veut que qu’on ne puisse imaginer que ce qui est absent.

« Plume en l’absence » et vocation d’un être proustien appréhendant, après tant de temps perdu, un peu de temps à l’état pur.

https://www.leseditionsdunet.com/livre/un-dictionnaire-part-moi

DE L’ATELIER INVENTIF À LA PLUME EN L’ABSENCE

Nada se edifica sobre la piedra, todo sobre la arena, pero nuestro deber es edificar como si fuera piedra la arena…Borges

On ne bâtit rien sur la pierre, tout se fait sur le sable, mais notre devoir est de construire comme si le sable était la pierre…

Mon atelier n’est pas réduit à une pièce particulière, mais ouvert à tout vent. L’atelier je m’y attelle, je m’y lance, de coups de dés en coups de hasards, je m’y livre, m’y aboute, m’y accroche, m’y occupe, m’y attache, m’y astreint, m’y amuse.

Ô Muse conte-moi l’aventure de l’atelier inventif 1

L’atelier des jeux et des rimes, celui du sable sous les pavés, l’atelier des poèmes élastiques, l’atelier du papier à grain de folie et celui de ce poète dépourvu, 2sans ressource, sans audience ni reconnaissance, mais qui persiste, persévère, maniant à qui mieux mieux, sa plume privée pour des lettres envoyées à ses dernier.e.s ami.e.s, dispersé.e.s dans le monde entier, « en absence »3

1 pastiche du premier vers de l’Odyssée traduit par Philippe Jaccottet 2 figure (topos) des poètes de la Renaissance 3 LA PLUME EN L’ABSENCE le devenir familier de l’épître en vers dans les recueils imprimés de poésie française (1527-1555) PAULINE DORIO (Droz 2020)

PLAISIR D’ÉCRIRE ?

premier jet




PLAISIR D’ÉCRIRE ?

                Sans le plaisir d’écrire, d’abord avec la main tenant ce stylo bleu ou noir, avec sa pointe plus ou moins fine, nul texte chez moi ne naît.

                Nul texte ne s’enfante.

                Mais cependant,  ce premier jet réalisé, la plupart du temps, je m’arrête.

Plaisir d’écrire conduit trop aisément au bavardage. Le bas vardage c’est pour le pépiement, les clichés, les lettres moribondes

L’écriture, tout au contraire, se fait dans « la plume en absence » du bruit autour de soi, des certitudes, des évidences désuètes.

Cette page, par exemple, a accepté le vide, l’attente de cette voie sans personne, dont j’ignore, à cet instant précis, si elle va m’ouvrir un chemin nouveau ou me conduire à une impasse.

Soumettre ce texte au « grand  ordinateur » me permettra, de le modifier « à la marge », avec le désir d’y voir un peu plus clair.

01/02/2021

ON N'ÉCRIT PAS SANS Y LAISSER DE PLUMES




On n’écrit pas sans y laisser des plumes

Plumes d’écolier

plumes gauloises

ou sergent major

que l’on mouillait

sur son poignet

avant de suivre la ligne

des pleins et des déliés

Lundi 14 mai 2018

Morale :

il faut s’appliquer et persévérer.

On n’écrit pas sans y laisser ses plumes

de jeune oiseau piailleur

puis de vieil oiseau gouailleur

emmêlé à la fable du monde

On n’écrit pas sans ses rêves d’enfant

oiseau de vie « oiseau secret qui nous picore »*

oiseau de mort qui disparaît avec nos corps





*Supervielle





Astoria dans le quartier du Queens

New York

14 05 2018

ODE AUX POÈTES DES ÉPÎTRES





Parfois c’est court la forme casse l’esprit bavard

Bah ! Personne n’entre ici s’il n’est un peu poète





Poète ? Tu veux rire le poste est déserté

Entre le poème et toi il y a le monde qui te broie

Brouhaha brou de noix gaulée sur le noyer





Le noyé c’est bien toi qui nages dans l’obscur

D’une nuit blanche

Sous la neige

D’une « plume en absence »





« Poète dépourvu »

De lecteurs et de reconnaissance

Mais que main tient

Et sans art-gens

Écrits et cris
Rage admise

Par les seuls amis





nuit du 24/09/2020

« La plume en l’absence »
Pauline Dorio
(vient de paraître)

LETTRE EN FORME TRISYLLABAIRE

original

Lettre en forme

trisyllabaire





C’est la fin

du mois d’août

pas de doute

On m’écrit :

Cher ami

que deviens-

tu tu tu ?

Écris-tu

en vers doux

ta marotte ?

De bon cœur

tes « épîtres

en absence »

du visage

de l’aimée ?

On m’écrit

Je réponds

Sur le pas

d’un silence

libérant

les bons flux :

J’avais peine

J’ai soulas

Ouverture

familière

de liesse

soudaine

-éphémère

mais certaine-

Dernier dé

Que je lance

Pour jourd’hui

Temps passé

Sur papier

Nous éclaire

Et nous lie

J.J.D.

« La plume en l’absence » Pauline Dorio
Le plus grand bien qu'ayant amis présents,
c'est s'entrevoir : puis quand ils sont exempts...
C'est la plume en l'absence

Charles Fontaine (1555)