UN PETIT CRI

Un petit cri dans la nuit

C’est Alice qui rêve

Un crissement sur la page

C’est mon stylo qui écrit

.

Mais de quoi rêvait-elle ?

D’un vieux rosier dit-elle

Mais qu’est-ce qui est écrit ?

De la mélancolie

Un petit cri dans la nuit
A small cry in the night

C’est Alice qui rêve
It’s Alice who dreams

Un crissement sur la page
A rustle on the page

C’est mon stylo qui écrit
It’s my pen that writes

.

Mais de quoi rêvait-elle ?
But what was she dreaming of?

D’un vieux rosier dit-elle
Of an old rosebush, she says

Mais qu’est-ce qui est écrit ?
But what is being written?

De la mélancolie
Of melancholy


Alice et son papa version anglaise

MON ÉCRIT EST DE SURFACE

MON ÉCRIT EST DE SURFACE

Il court sur le papier il sonne sur le clavier il se projette sur la toile

Mon écrit est de surface

Intuition mimesis une flûte invisible un mot pour un autre une tache de soleil noir

Mon écrit est de surface

un mur arborescent un accord de guitare désaccordée une page perdue dans un livre fermé

Mon écrit est de surface 

C’est une dédicace donnée par un auteur fictif imaginé par Borges

ou le catafalque bleu blanc rouge sur le cercueil de Paul Valéry

Ce sont les trois minutes trente-trois de silence d’une partition de John Cage

Mon écrit est de surface 

Couché par écrit chanté au studio Le Petit Mas

Projeté sur des toiles d’abstraction lyrique

posées à plat sous l’olivier de mon jardin 9 rue de la Bergeronnette

Mon écrit est de surface 

Grains de voix collés sur bandes magnétiques

Traits d’encres appliqués sur le calcaire coquillier ou la plage de Fos sur Mer

Cris du soir des martinets

Mon écrit est de surface 

Livre de sable infini

Clavier plus ou moins tempéré

Page unique qui termine sa boucle

Comme un œil qui ne veut pas se fermer

mes abstractions lyriques Dorio 28 juin 2024

comme un œil qui ne veut pas se fermer

SI ON NE SAIT Y RÉPONDRE ON PEUT ZAPPER CET ÉCRIT

on ne cesse jamais de répondre à ce qui a été écrit hors de toute réponse :
 affirmés puis mis en rivalité, puis remplacés, les sens passent, la question demeure…

Roland Barthes


le cri l’écrit
sur le papier
et dans la nuit

le cran l’écran
ça va cranter
dit le mécréant

tout en créant
cette variation
digne de Rabelais

de Perec de Queneau
et de tous les dicos
d’onomatopées

c’est du blabla
mais c’est d’un clic
que dame souris

envoie cet écrit
apparaître sur l’écran
énigmatiquement

CETTE LANGUE ÉCRITE





Cette langue écrite qui tamise, raffine, épure…
Nathalie Sarraute Les fruits d’or


Cette langue écrite qui se fraie (ou se fraye) un chemin de traverse dans le maquis du langage qui nous étouffe

Cette langue mon dieu auquel je ne crois qui dévie et jubile avec sa plume qui parle sans barguigner au papier

Cette langue écrite destinée aux lecteurs et lectrices solitaires qui la prolongent dans leur tête ou la recopient sur leurs carnets secrets

Cette langue miroir tendu par l’écrit sur cet écran qui incite les lecteurs et lectrices de passage à devenir les lecteurs d’eux-mêmes*


*Paul Ricœur


AVANT LE PREMIER MOT LE POÈME EST ÉCRIT





Avant le premier mot le poème est écrit

Il a tourné ta langue t’a donné l’impulsion

Dans une tête vide Sans aucun des feuillets

qui composent un livre – paradoxe insolite





(Maintenant tu les comptes Tes quatre alexandrins

ont fait 8+10+8+6 trent’deux)





Paradoxe insolent tu fais de ta tortue

la témoin attentive de toutes tes battues

Batucadas impromptues près du fleuve Amazone

La tortue à l’époque s’appelait Morocoy

Elle servait de siège aux indiens fatigués

D’avoir passé la nuit en chants hallucinés





Ce poème aux cent mots il faut vite l’oublier