SI ON NE SAIT Y RÉPONDRE ON PEUT ZAPPER CET ÉCRIT

on ne cesse jamais de répondre à ce qui a été écrit hors de toute réponse :
 affirmés puis mis en rivalité, puis remplacés, les sens passent, la question demeure…

Roland Barthes


le cri l’écrit
sur le papier
et dans la nuit

le cran l’écran
ça va cranter
dit le mécréant

tout en créant
cette variation
digne de Rabelais

de Perec de Queneau
et de tous les dicos
d’onomatopées

c’est du blabla
mais c’est d’un clic
que dame souris

envoie cet écrit
apparaître sur l’écran
énigmatiquement

CETTE LANGUE ÉCRITE





Cette langue écrite qui tamise, raffine, épure…
Nathalie Sarraute Les fruits d’or


Cette langue écrite qui se fraie (ou se fraye) un chemin de traverse dans le maquis du langage qui nous étouffe

Cette langue mon dieu auquel je ne crois qui dévie et jubile avec sa plume qui parle sans barguigner au papier

Cette langue écrite destinée aux lecteurs et lectrices solitaires qui la prolongent dans leur tête ou la recopient sur leurs carnets secrets

Cette langue miroir tendu par l’écrit sur cet écran qui incite les lecteurs et lectrices de passage à devenir les lecteurs d’eux-mêmes*


*Paul Ricœur


AVANT LE PREMIER MOT LE POÈME EST ÉCRIT





Avant le premier mot le poème est écrit

Il a tourné ta langue t’a donné l’impulsion

Dans une tête vide Sans aucun des feuillets

qui composent un livre – paradoxe insolite





(Maintenant tu les comptes Tes quatre alexandrins

ont fait 8+10+8+6 trent’deux)





Paradoxe insolent tu fais de ta tortue

la témoin attentive de toutes tes battues

Batucadas impromptues près du fleuve Amazone

La tortue à l’époque s’appelait Morocoy

Elle servait de siège aux indiens fatigués

D’avoir passé la nuit en chants hallucinés





Ce poème aux cent mots il faut vite l’oublier


	

RUMEURS DE PLAGE

écrit sur la plage
Rien de facile, et pourtant écrit dans ce paysage sans limites,
la plage, avec l'aide de la rumeur de la mer et le cri des enfants,
ivres de liberté.
Si une hirondelle de mer, une sterne au vol étourdi, passe et se
mêle à la polyphonie, à ciel ouvert, c'est un moment heureux,
avec ce monde-là qui se révèle à qui veut bien l'écouter.
Naturellement, il faut pour en jouir, avoir dit Non, résolument, 
aux pratiques que l'on voit proliférer autour de soi :
mots croisés, mot fléchés, et des plus grands maux, cette cap-
tation, l'œil rivé, un doigt glissant sur le portable, l'insupportable, 
comme l'avait baptisé à son apparition, mon ami ethnologue.
Cependant, lire "poètes et prosateurs", comme on disait jadis,
mais à petites doses, et en levant les yeux, ajoute au plaisir, 
et peut aussi le contrarier quelque peu...
Rien de facile, mais en attendant, nager insolemment, et oublier
nos infinis...
Un dictionnaire à part moi
17/08/2020