Comme un enfant me dis-je Plus tu vieillis plus tu accueilles les paroles des livres Comme un enfant écoute les contes Que Maman lui lit Comme un enfant tu prends la phrase Qui s’allonge se tortille Sombre et minutieuse comme une ancolie 1 Même si parfois les yeux t’en tombent Comme un enfant qui dort Tu poursuis dans ta tête les belles formes d’art au malheur exercées, Du côté de chez Proust 1 relisant Baudelaire 2 Au fond de l’inconnu pour trouver du nouveau 2
Archives de l’étiquette : maman
SONNET DU CRÉTINOS
Et il arrive que le sonnet nous fasse dire
Ce que nous ne pensons pas
André Ughetto 1
Personne ne t’a sonné
Dit le sonnet qui s’amuse
À faire bisquer René
Philosophe sans sa Muse
Ainsi l’art de moquer
renaît Je pense et j’en use
Car dire : bon, d’accord, ok,
C’est faire douter Janus.
Mon crétinos, * dit Maman
à Marcel, que de bêtises
sur le papier tu attises !
-Mais ne crains rien, c’est pour Hahn,
Reynaldo sur son piano
Chantera mon Cogito.
1 Trois pièces d’histoire de Provence
Éditions Tituli (2021)
*Conversation avec Maman Marcel Proust (Contre Sainte-Beuve)
SONNET DE L’ÉTRANGER
Cette nuit maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas.
Albert Camus (L’Étranger)
Plutôt que d’accepter le cours des événements
Je lis dans mon lit innocent
Cette nuit par exemple maman n’est pas morte
Devant son feu de cheminée.
Je lui ai dit dans mon rêve
Que j’allais lui ramener une orchidée en or.
Je lui ai dit de ne pas s’inquiéter.
Que le petit chat n’était pas mort.
Je lui ai dit que si la mort heureuse n’existait pas
Du moins le dernier livre que j’avais écrit
Lui ferait oublier la sienne.
– Et comment l’as-tu appelé, fils ? m’a-t-elle demandé.
– L’étranger, maman.
L’extraordinaire étranger.
DU NYANYA DE LACAN AU NYAPROU DE MA MAMAN
Je me souviens du nyanya de Jacques Lacan qui ajoutait un brin pervers
C’est pour que rapport nyait pas
Je me souviens de la cantatrice chauve d’Eugène Ionesco
Celle qui selon Mme Smith se coiffe toujours de la même façon
Je me souviens de l’incipit le plus répété de la littérature française
ouvrant Du côté de chez Swann
et que ce farceur de Perec
transforma en
Durant un grand laps on m’alita tôt
(lipogramme en « e »)
Je me souviens du sonnet de Georges Fourest
Un travertissement burlesque du Cid de Pierre Corneille
Impassible et hautain drapé dans sa capa
Rodrigue-As-Tu-Du-Cœur
Suscita ce vers inoubliable de la plaintive Chimène
Qu’il est joli l’assassin de Papa !
Je me souviens que certains membres de l’Oulipo
L’Ouvroir de Littérature Potentielle
sont excusés au début de chaque réunion
pour cause de décès
Je me souviens du Pantoum négligé
de Paul Verlaine
Trois petits pâtés ma chemise brûle
Ma cousine est blonde elle a nom Ursule
Et par ricochet je me souviens de
Ô U Ô U
Ô Ursule
Pour toi d’amour
Mon cœur brûle
Je me souviens de Certains l’aiment chaud
et de la chute du film
Nobody’s perfect !
Conclusion d’une blague de scène de ménage
La femme : Tu es un parfait idiot !
Le mari : Personne n’est parfait !
Je me souviens du nyanya de Lacan
et du nyaprou de ma maman
cette expression issue de l’Occitan
et qui signifie
Ça suffit !