UN VERS VOLAGE





Un vers volage me poursuit

Mais que dis-tu ? Mais que lis-tu ?

Alcools qui zonent dans ma nuit

Mélange détonant de Proust

et de Guillaume Apollinaire





Et puis je me transforme en ver

Confondant cheville et chenille

Un vers à soie un vers pour toi





Son avenir est incertain

À moins que tu le fasses tien

POÈME PERDU

Poème perdu comme l'on dit du bon pain
Qui a la fin devient rassis
Et qu'il faut réveiller avec du lait d'ânesse

Poème égaré dans la ciguë de Socrate
Le boute-selle de la guerre
Et qu'il faut raviver d'un vers d'Apollinaire

Poème dépensier généreux et candide
Hardi mais qui tient par sa plume
Qu'il faut laisser aller mais sans en être l'otage



QUELLE EST CETTE ÉCRITURE ?

LIRE LE TEXTE
CI-DESSOUS
Quelle est cette écriture ?
Je ne sais je ne sais
et pourtant c’est ma main
qui l’a tracée
ce dix mai
à « une heure » précisément
à l’horloge de ma chambre
en moins d’une minute
qui l’a tracée
au cœur de la nuit
comme dans un rêve
une main qui rêve et se lance
sans retenue
à la recherche d’une écriture
qu’elle a nommé
-faute de mieux-
HYPNOGRAPHIES
un mot maison
entré une nuit intime
nuit en moi nuit en dehors
je connais par cœur
cette ligne de Supervielle
qui m’émerveille
comme un bestiaire
dont chaque animal est un signe
qui représente une part de moi-même
de ce dictionnaire à part moi
que je m’efforce de fabriquer
j’ai relu hier les quatrains
ou les quintils
du Bestiaire
ou Cortège d’Orphée
d’Apollinaire
illustrés des bois de Dufy
mentalement puis en les chantant
sur mon piano
et maintenant c’est comme si
chacun de mes glyphes
composés cette nuit
était un œuf en chocolat
trouvé sous les étoiles





UN PEU DE FEU





6

UN PEU DE FEU





Un peu de feu né du silex

Un peu de feu au seuil des grottes

Un peu de feu falot falotte

Un peu de feu de ma jeunesse





Un peu de feu haletant dans la nuit

Un peu de feu du soleil noir

Un peu de feu flambant comme un virus

Un peu de feu infectant notre toile





Un peu de feu qui brûle ton poème

Un peu de feu de jeune fille en fleurs

Un peu de feu sous l’abat-jour des peines

Un peu de feu de cage thoracique





Un peu de feu de Guillaume Apollinaire

Soleil cou coupé jeté aux orties

Un peu de feu de nos présocratiques

Quand il y avait encor des dieux !





28/03/2020

06h02

J’AI RÊVÉ

J'air rêvé que l'on me préparait une horchata  de chufa
C'était dans un café qui faisait face au Lyceo
Sur les Ramblas
en 197..

J'ai rêvé que je mâchais de la canne à sucre
pour tenir le coup jusqu'au soir
quand on rentrerait de la pêche
avec les indiens panaré
Et que l'on dégusterait assis sur nos cuisses
le poisson boucané

J'ai rêvé que j'allais à mon enterrement*
Dans la forêt pleine d'esprits
Où l'on installe ton corps sur un arbre
Avant de faire de tes os
Une poignée de poudre

J'ai rêvé qu'en jouant du violon
devant notre haie de pittosporums
Tu m'étais apparue
Dansant la plus que lente**
J'ai rêvé de nos adieux
Et de cette brassée de bruyère
Que je déposerai demain dès l'aube*** sur ta tombe

Odeur du temps brin de bruyère
Et souviens-toi que je t'attends*



*Guillaume Apollinaire **Claude Debussy ***Victor Hugo