J’écris sur les murs du Grand Mai et sur les pavés des cathédrales J’écris sur la plaque d’égout de Pont à Mousson à Pont Saint Esprit J’écris à dire vrai en attendant ces mots cachés qui soudain m’apparaissent et que je couche sur le papier J’écris ce dialogue intérieur d’un scribe qui pratique la déformation systématique, la moquerie, la gibe J’écris à ce corps éphémère sous l’espèce de persévérance que Spinoza, si j’ai bien lu, appelait l’éternité : De ce qu’un peu auparavant j’ai été il ne s’ensuit pas que maintenant je doive être le même J’écris appuyé sur un grand livre à la couverture moutarde J’écris aspiré par le bord de la nuit à pas de loup dit le haïku J’écris à la renarde qui passe entre les lignes d’un poète animalier J’écris l’été de mes douze ans dans un chalet loué en Gaspésie J’écris petit moineau à qui on donne la becquée J’écris à côté du laboratoire central becquets et paperolles sur de petits papiers J’écris à la Nébuleuse de l’Aigle à sept mille années-lumière J’écris en aveugle sur le banc des accusés de fuite en avant dans le poème
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J’ÉCRIS opus 1
J’écris en levant les lièvres d’un gîte Où La Fontaine songe : cet animal est triste et la crainte le ronge J’écris en écoutant les quatuors de Beethoven devenu à cette époque sourd, sourd sublime J’écris en traçant dans l’air la langue des signes J’ai l’air d’un idiot (d’un idiot utile ?) J’écris en posant des questions à mon lecteur futile Fût-il pervers polymorphe ou slameur insigne J’écris sur les nuages qui passent ici Et sur les pavés que se passèrent de main en main les petits gars et les jeunes filles de Mai 68 J’écris sur l’océan qui bouge depuis le premier bain de vagues et de houles avant mes premiers vagissements J’écris sur l’estuaire, exutoire d’un fleuve Qui baigne mon poème mystérieusement
DIS MOI FRÈRE HUMAIN
– Dis-moi frère humain, pourquoi malgré le maigre public qui s’intéresse de nos jours à la poésie,
(la vraie), poursuis-tu ta quête du vers parfait ?
– Quelle étrange question dont tu suggères la réponse.
– Mais encore.
– Le vers parfait tu le sais bien n’existe que partagé avec ceux qui semblaient résignés, avec celles qui cherchaient la manière d’échanger leurs lourds secrets.
– Poésie de la multitude ?
– Poésie des formes et des figures au temps des vérités étouffées par la censure, l’humour noir noyé dans l’eau de Vichy, comme poésie hors du temps, issue du rire d’un enfant ou d’une complainte kafkaïenne.
– Je sais bien, mais quand même si tu avais un vers parfait qui te vient spontanément ?
– Tagué à la bombe sur les murs en béton de mai 68 : Sous les pavés la page !
Dialogues intérieurs VI
Ce 4 avril 2021 où Dany Cohn-Bendit fête ses 76 ans, putain déjà !
LE CORPS D’UN POÈME

LE CORPS D’UN POÈME
C’est de l’or et du purin
Le sable fin des pavés
La Commune utopique
Le sang versé par les Versaillais
C’est ma communale
Mon école accordéon
Des apprentissages rêvés
Et d’une vita nova
C’est ce qu’il nous faut creuser
Malgré tous nos déboires
Cherchant à y voir clair
Face à ce qui se dérobe*
Maintenir nos petits dispositifs
Qui font de l’écriture d’un poème
Mille ajustements créatifs
Où le corps en action
Élève notre esprit
*Henri Michaux
poème écrit ce 18 septembre de l’an 2020
POST 07/05/2020
IL EST INTERDIT D’INTERDIRE
Fougère de mai Fou j’erre
Dans les signes d’une nuit
Toujours amoureuse du Grand Mai
La marquise de la Révolution
N’est toujours pas sortie
A las cinco de la tarde
Elle a négligé l’invitation
De l’architecte du cimetière marin
« La Honte est un grand sujet »
signé P.V.
Pavés Pas vrai ?
Pour la première fois de leur histoire
Les plages sont interdites
À nos pas à nos pieds
Alexandrins ou décasyllabiques
Sous peine de pévés
Idem pour les bois et les prés
Où il est interdit de promener
Dans la verte campagne
où je suis né
Mais tout n’est pas perdu
Dit en off Godard
le plus zinzin des Suisses prochinois
qui ne croit pas au Corona
Il y a toujours moyen
D’inventer une autre police
Que la covid 19
Une police collective
D’individus errants
Libérés du Cogito
Et toujours en mouvement
Il y a des poètes partout
Dans les fougères et les vignes
Des marges et des clandestins
Clandestino clandestino

9h35
prémices des grappes de raisin
et vue sur le rosier
et l’olivier
ceux qui « s’abandonnent saisis à l’essence de toutes choses »
Aimé Césaire