UNE MANIE DE POÈTES

manuscrit premier jet 22/09/2020




Les poètes ont la fâcheuse manie

De parler de leurs maladies

Je suis…cette vieille douleur

qui hurle par les yeux*





Manie, mania, folie,

ils en font des manières !

Douleurs, plaintes, ruades,

Chacun, chacune, font leurs livres de sable

où ils couchent leurs vertiges.





Je t’écris, je tressaille, je soubresaute,

déchiré, déchirant cette feuille,

que tu ne liras pas.





*Serge Sautreau

22-23/09/2020

L’AUBE GRISE L’AUBE BLEUE













un poème écrit
à l’aube de ce jour
29 mai 2020
en vers trisyllabiques
dit par son auteur


L’aube grise
l’aube bleue
la méprise
Lao-Tseu

La douleur
retenue
la douceur
ingénue

Le travail
d’écriture
Hokusaï
la Nature

La souffrance
le remords
le silence
de nos morts

L’aube rouge
le vin noir
à Montrouge
chez Nadar

La pitié
la manière
psalmodier
Baudelaire

Le passage
d’un poème
dans la marge
où l’on aime
le langage
des promesses

(trisyllabes du mois de mai 2020)








mis en chanson
jj dorio

SILLONS TRISYLLABIQUES

année 2020

dite des devins

indication :

lire des yeux puis de la voix  ces textes écrits en trisyllabes

le lecteur idéal laisse le texte capter tout son présent          

n’oubliez pas les diérèses.

Janvier

PAROLES SANS ROMANCES TRACÉES À LA POINTE FINE

Il ne sert  à rien  d’expliquer  Dorio  dans le texte  Dorio  n’exist’pas  mais il trace  des sillons  en passant une araire  pointe fine  va et vient  de paroles  sans romances  Il ne sert  à rien  sur la page  des fragments qui se perdent  roue errante  d’une main  du tressage  sans dressage La sibylle  peut bien rire les idylles  et rondeaux  s’en aller  Je persiste  et je signe

Février

SOLITAIRES SOLIDAIRES DES RAISONS ET DES RIMES

Février  découpé  en vingt neuf  vers sans rimes  à jets d’encre  sur la page  puis clavier  pour l’écran Février  cette année  apporta corona  un virus  une grippe  pas d’Espagne  mais de Chine  Tchin tchin tchin Qu’opposer  à la mort  si ce n’est  la richesse  d’exister  avec et pour  nos semblables  solitaires  solidaires des raisons  et des rimes chuchotées

Mars

POÈMES DE COVID EN RÉA POÉTIQUE

Tout oublier phrases cul par-dessus gentillesse tout ouvrir à ton bic laissé seul sur la page Mon hôtesse tout futur enjambant passerelle au-dessus de l’abîme Tout connaître du regard des mourant.e.s à la douane du grand soir Tout écrire en réa poétique des poèmes de covid des patient.e.s aimables qui sourient avant de trépasser Tout ainsi qui passa

Avril

FANTAISIES D’INSOMNIES

Connerie c’est la guerre tragédie c’est Corneille Tu l’as dit c’est Bouffi comédie c’est Molière c’est parti mon kiki ouistitis c’est au zoo ou c’est pour la photo ‘piphanie dans le gâteau des rois hélianthes tournesols du Midi Tout ceci je l’écris dans mon lit d’insomnie que la vie est amère dit ma mère qui s’endort Bonne nuit

POUR CALMER LA DOULEUR





Pour calmer la douleur faites des fantaisies

Coupez vos livres en deux comme ce vers à l’hé

mistiche Amusez comme le psy Lacan

la galerie Nyania Pour dire et suggérer

Tirer les vers du nez nyania beaucoup à faire

On songe à Cyrano ou aux âmes bien nées





Pour calmer la douleur la tenir plus tranquille

La forêt du langage la cacher par un arbre

Nyania le baobab et le baba au rhum

Nyania le pin d’Alep et celui de Cézanne

Le chêne le roseau le bambou mal pensant

Le hêtre le néant et le baron perché

sur la littérature d’Italo Calvino





Pour calmer la douleur se plaindre est inutile

https://www.youtube.com/watch?v=5-IxkvaXlzE

Max Richter (Return)


J’écrirai le mot fin comme arrivé au port
Cette fin n’est autre qu’un recommencement
Raymond Queneau (1903-1976)





	

DOUCE DOULEUR





De la douceur





Peut-être est-ce dû

au milieu qui m’entoure :

le bois de pin en surplomb

d’un étang aux mille reflets

et ce mur antique

en grand apparat*

sur lequel je me suis adossé





Tout élément

Qui aussi bien

Aurait pu me faire écrire





De la douleur





*formule des archéologues

poème écrit sur l’oppidum de Saint Blaise

commune de Saint Mitre les Remparts

LA POÉSIE N’A PAS DE PRIX





En ce monde étiré, parcouru en tous sens, volubile et affairiste,

la poésie survit, langue de sable, déploration surannée, etc.

Gaston Puel





I

La poésie n’a pas de prix

Elle se donne pour rien

hors des marchands

des cuistres et des théoriciens

qui se font mousser

avec les mots des insurgés

II

La poésie n’a pas de prix

C’est un peu d’air qui est passé

sur cette colline sur cette rue

ce ru de figures invisibles

qui bouillonnent

moitié  pierre moitié écume

III

La poésie n’a pas de prix

Trésor caché des nuits

Elle lève ses barricades mystérieuses

au carrefour des rêves

et des réalités

IV

La poésie n’a pas de prix

inadaptée à ses marchés

où ceux qui inscrivent « poète »

sur leur carte d’identité plastifiée

troquent l’or du temps

pour leur petite monnaie de signes

V

Innocente dérangeante pauvre et sans prix

Poésie n’est pas un nom facile à porter

Elle est pourtant – toujours – l’humaine mesure

Un cami compartit Un chemin partagé

Qui relie maille après maille ses lecteurs dispersés

Joie et douleur mêlées dans un simple poème

Qui ne fait que passer