PHÉNIX

Je suis tout feu tout flamme
Je suis l’eau remontant à mes sources
Je suis l’air de rien
Je suis la terre des Dorio (tous laboureurs)


Je suis le souffle qui ravive dès matines les braises du foyer
Je suis l’eau de l’orage sur le visage de Rrose Sélavy
Je suis la terre que le blé vert adoucit
Je suis l’air dont s’abreuve l’alouette de Ventadour


Je suis poète contumace 1 à l’esprit follet
Je suis la mer la mer toujours toujours recommencée 2
Je suis la Mère Terre
(va-t-elle mourir la Pacha Mama ?)
Je suis Phénix qui écrit des poèmes après Auschwitz*



1 Tristan Corbière 2 Paul Valéry



*Dans cette ville (Francfort), Theodor Adorno a prononcé une grande phrase : on ne plus écrire de poèmes après Auschwitz.
Disons-le autrement : après Auschwitz on ne peut plus respirer, manger, aimer, lire.
Mais quiconque a déjà inspiré une première gorgée d’air,
quiconque s’allume une première cigarette a décidé de survivre,
de lire, d’écrire, de manger, et d’aimer.


Heinrich Böll



LES MONDES SE MÉLANGENT L’ANCIEN ET LE NOUVEAU

Les mondes se mélangent l’ancien et le nouveau
Ô monde, mais immonde ! Ô grand tout mais un rien !
Tous ces cercles roulants qui embrassent le monde :
J’y amarre le feu, l’air, la terre avec l’onde

Je recopie ces vers en ôtant le divin
Seigneur Dieu la cause de l’entier gouvernement
Mais Grevin qui l’affirme sait noyer le poisson
Lecteur assidu de Platon et d’Aristote
Il fait douter ses ouailles : Je n’en retire rien
Qu’un chaos plus souvent Nulle ferme assurance
de son propos ne se dégage, de son gentil tourment

Ô mélange du monde ô mondaine inconstance
Vivons donc constamment ma toute désirée !


Jacques Grevin (1528-1570)
Venus du Beauvaisis, il étudia dans l’Université de Paris.
Il joignit à la connaissance des Belles Lettres la science de la médecine.

L’AIR DE RIEN





l’air de rien 
refrain connu

l’air venu
j’enchaîne les paroles

l’air le feu
le souffle du fluide gazeux

l’air la brise
que brisent ifs et cyprès

l’air qui donne
cet air de famille
d’une liste à la Prévert

l’air sur l’aire
qui sépare le bon grain
de l’ivraie

l’air délivré
par ce pauvre hère tuberculeux

l’air de Corbière
poète maudit
mort à trente ans de phtisie

l’air de Tristan
à sa jument Souris
à Sir Bob
à son chien Pope

l’air de Titan
satellite géant de Saturne

l’air de Saturne
morne et taciturne
du père Brassens

l’air d’un vanneur de blé aux vents 1
cependant que j’ahane
cet air oublié
que je te chantais


1 Joachim du Bellay

UN PEU D’AIR

1

Un peu d’air qui court dans les rues

Un peu d’air qui bat la campagne

Un peu d’air pour fendre les flots

Un peu d’R aimons Queneau





Un peu d’air sur l’identité

Un peu d’air bâti sur le roc

Un peu d’air sur les buildings de New York

Un peu d’air Do Rio de Janeiro





Un peu d’air qui va à tout vent

Un peu d’air sorti d’un accordéon

Un p’tit air de manouche à Saint Ouen

Un peu d’air de jazz blues rouge et blanc





Un peu d’air à voix de Sirène

Un peu d’air  pour nous dire Adieu

Un peu d’air sur nos joies nos peines

Un peu d’air dans l’inachevé









7 POÈMES DE MAINTENANT LE CORPS AU NAGUÈRE

Que ton vers soit la bonne aventure
Éparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe et le thym...
Et tout le reste est littérature.
Paul Verlaine
JADIS ET NAGUÈRE